Une sorcière à la mer

Le soleil brillait, réchauffant le sable de la plage. Elle somnolait sur sa serviette de bain, les yeux fermés et un sourire sur son visage en entendant le bruit des vagues et des mouettes, et les cris des enfants qui jouaient.

Après une demi-heure de nage, la fatigue se faisant sentir, elle s'était allongée sur le sable. Elle devait se reposer souvent à cause de son âge. Elle retournerait peut-être dans l'eau plus tard, la mer était si chaude, en rien comparable à la Mer du Nord, où elle se baignait lorsqu'elle se rendait à Hambourg.

Pour ce jour ensoleillé, elle avait opté pour un maillot de bain violet et l'apparence d'une vieille femme. Après tout, elle était née au XIX° siècle et elle voulait voir à quoi elle ressemblait en faisant un peu plus son âge. Alors elle avait adopté des cheveux blancs courts et le visage de cette actrice américaine qui jouait dans ce film d'horreur avec le tueur en série dont elle ne se rappelait plus le nom, celui avec un masque.

Une petite brise se mit à souffler, fraîche et appréciable. Elle ouvrit un œil et regarda les mouettes voler dans le ciel bleu clair. Puis, prise par la soif, elle se rendit au bar de la plage pour commander une boisson ou peut-être une glace à manger sur sa serviette rose. Le sable était chaud sous ses pieds. Arrivée au comptoir, elle commanda une pina colada, une boisson qu'elle n'avait jamais bue. Elle apprécia immédiatement le goût de la noix de coco.

— Cette pina colada est la meilleure de toute la ville, fit une voix à côté d'elle.

C'était celle d'un homme, assis sur la chaise voisine. Il avait environ 65-70 ans, avec des cheveux gris clair et d'incroyables yeux bleus glace en forme d’amande. Il était assez grand et plutôt musclé pour son âge. Elle lui sourit, le trouvant plutôt séduisant, avec ses cheveux presque blancs parsemés de quelques mèches rousses. Son sourire était trop blanc pour être vrai, mais il semblait sincère. Il portait un short de bain bleu et un t-shirt vert avec "Île de la Réunion" écrit dessus.

— Puis-je vous offrir un autre verre ? Demanda-t-il en anglais.

Elle accepta. Elle n’avait rien à perdre, elle était là pour passer de bons moments, loin du magasin. Il avait l’air sympathique et avec de bonnes manières. De toute manière, elle ne le reverrait certainement plus la semaine prochaine. Il n’était qu’un touriste, comme elle. Et alors qu'il lui commandait une autre pina colada ainsi qu'une caïpirinha pour lui-même, elle remarqua d’étranges cicatrices sur son poignet. Mais ce n’était pas encore le temps de poser des questions.

— Voilà pour vous, monsieur, dit le barman en servant leurs boissons.

L’homme le remercia et paya les deux consommations. Elle décida de se laisser porter par les événements et de voir où cette rencontre la mènerait. Il n’y avait rien à perdre, se répéta-t-elle, alors pourquoi ne pas essayer ?

— Voilà votre pina colada, ma chère.
— Merci, monsieur.

Ils commencèrent à parler. Comme elle le pensait, lui non plus n'était pas du coin : il était en vacances, comme elle. Lui parler était facile, son anglais était compréhensible, même s’il y avait un léger accent d’outre-Rhin.

— Vous êtes allemand ? Demanda-t-elle.
— Non, mais pas si loin que ça : je suis de Nancy.
— Oh, je suis allée plusieurs fois à Metz, ce n’est pas si loin.

Elle ne lui dit pas que c’était durant l’occupation allemande. À la place, ils commencèrent à parler allemand. Ça ne semblait pas être un problème pour lui, il parlait même mieux allemand qu’anglais. Pour elle, c’était beaucoup plus facile.

— Je ne vous ai même pas demandé votre nom.
— Je m'appelle Regula. Je viens de Francfort et j'ai 66 ans.
— Je vous en donnais moins.

Bien sûr, il appliquait la règle selon laquelle on sous-estime toujours l'âge d'une dame. Bien élevé par sa mère.

— On vous a déjà dit que vous ressembliez à Jamie Lee Curtis ? L'actrice de Halloween.

Elle éclata de rire.

— On me le dit souvent, mais non, ce n'est pas moi.

Lui s’appelait Laurent. Ancien chasseur alpin, aujourd’hui retraité, il allait avoir 69 ans. Tandis qu’ils parlaient, elle remarqua de nouveau que le blanc de son sourire ne semblait pas réel.

— Vous utilisez quel dentifrice pour avoir les dents si blanches ?

Question idiote, Mira, se dit-elle, en colère contre elle-même de l'avoir posée. Elle s’attendit à ce que le chasseur alpin s’en aille ou s’énerve. Pourquoi es-tu si maladroite avec les hommes ?. Mais il éclata de rire.

— C’est un dentier, c’est pour ça qu’elles sont si belles.
— Oh, je suis désolée, répondit Regula, rouge de honte.
— Non, ne vous ne faites pas, il vaut mieux avoir de fausses dents que pas de dents du tout. Quand on devient vieux, on perd ses dents, qu’est-ce qu’on y peut.

Elle resta un peu gênée, même si elle voyait bien que Laurent n’était pas vexé. Mais il sembla comprendre qu’elle se sentait un peu embarrassée et il changea subtilement de sujet.

— Vous travaillez encore, Regula ?

La question sensible. Elle ne savait pas vraiment quoi répondre sans trop en dire. Peut-être qu’il ne la croirait pas. Elle avait toujours cette petite pointe de paranoïa lorsqu'elle commençait à parler de ses activités professionnelles.

— Je suis gérante d'un petit magasin à Mayence.
— Un magasin de quoi ?
— Euh… comment le décrire ? Un petit bazar, mes collègues et moi vendons énormément d’objets de la vie de tous les jours, des petites cuillères jusqu’à des produits de maquillage. J’ai ce magasin depuis trente ans, peut-être plus.

Il sourit pour montrer son intérêt. Elle commença à lui décrire l’ambiance du magasin, avec toute l’extravagance qui s’y trouvait, et plus elle parlait, plus Laurent riait.

— Comment s’appelle votre magasin ?
Le Cabinet des Merveilles.
— Joli nom !
— Ça colle bien avec ce que je vends, je trouve.

Leurs verres étaient vides. Laurent s’étira. Regula vit d’autres cicatrices sur ses bras, et un petit tatouage avec deux noms. Olympe et Christina.

— Qui sont Olympe et Christina ?
— Mes filles. Olympe a 32 ans, Christina en a 37. Je vois souvent Christina, mais Olympe vit aux États-Unis.

Elle pensa à son propre fils, qu’elle n’avait pas vu depuis des années. C’était toujours un sujet sensible, donc elle demanda à Laurent s’il voulait l'accompagner dans l'eau, afin de se changer les idées .

— Bien sûr !

Il prit sa main et ils coururent vers la mer, parmi les autres touristes. Peut-être que quelques brasses lui permettraient d’oublier ses mauvais souvenirs.


Elle avait choisi un hôtel proche de la plage. À travers la fenêtre, elle regardait un ferry quitter le port vers des destinations qu’elle ne connaissait pas. Corse ? Italie ? Algérie ? Elle visiterait peut-être ces pays un jour. Mais pas maintenant, car elle était au téléphone avec ses collègues restés en Allemagne pour tenir le magasin. Elle était heureuse d'avoir de leurs nouvelles.

— Tu penses que tu vas le revoir dans les prochains jours ?

Bien sûr, elle leur avait parlé de l’homme qu’elle venait de rencontrer. Évidemment, Candis et sa force surhumaine, Amber l'informaticienne, Nils le contorsionniste et toute la bande voulaient en savoir plus. Mais Regula Mirabilis ne voulait pas tirer des plans sur la comète.

— Je sais pas, on verra. Comment ça va, vous et le magasin ?

Ils allaient bien. Après deux mois de vacances, les affaires reprenaient. Annemarie la voiture consciente était sur la route pour Munich, pour discuter avec Herman Füller à propos d’objets de cirque. S'ils décrochaient la vente, ces objets permettraient à leurs client d'améliorer leurs futurs spectacles. De très belles fournitures toutes nouvelles pour des cirques, des artistes indépendants ou des entreprises un peu plus… étranges. Regula était toujours à la recherche de ce genre d'objets pour sa boutique. Ballons, rubans, baguettes magiques… Pour les experts, mais aussi pour les débutants.

— Vous en êtes où avec le projecteur d’hologrammes ?

Amber et Nils travaillaient toujours dessus. Leur plus gros projet. "Tu ne veux pas aller à l’école ? Envoie ton Holo-toiTM à ta place ! L’hologramme le plus réaliste de tous les temps !" Ils avaient eu cette idée en visitant l’usine allemande d’Anderson Robotics. Grâce aux dons technologiques d’Amber et au talent de Nils en matière de marketing, Holo-toi pourrait devenir leur meilleur produit.

— Il est presque fini. La direction d’Anderson Robotics a l’air de vouloir le vendre, donc nous avons une marge de négociation.
— Je suis contente de l’entendre, dit Regula en souriant. J'espère que vous sortirez gagnants de ces négociations.

Elle était tellement fière de ses collègues. Ils étaient passionnés par leur travail, qu’il savaient très bien faire et se débrouillaient parfaitement sans elle. Depuis des années ils l’aidaient à gérer son magasin, en fabriquant des objets ou en les vendant. Le Cabinet des Merveilles était devenu en peu de temps une affaire d’objets anormaux dirigée par d’étranges personnes. Ils avaient toujours des idées loufoques et amusantes. Regula appréciait grandement leur compagnie et ils lui manquaient déjà.

— Ne t’en fais pas, Mira, dit Amber. Le magasin se porte bien, et nous aussi, on se porte bien. Tu dois te reposer et t’amuser. Va à la plage, va visiter, enivre-toi, va nager, danser avec cet homme. Peut-être que tu peux aller… plus loin avec lui.

Elle s’assit sur le lit une fois l’appel terminé.

En évoquant Laurent, une pensée inquiétante traversa son esprit. Et si il était seulement intéressé par ses activités et non par sa personne ? S’il n’était pas vraiment chasseur alpin retraité mais autre chose ? Elle se savait importante, et peut-être était-il au courant. Ces imposantes cicatrices sur ses poignets. D’où venaient-elles ? Avait-il été capturé lors d’une mission dangereuse ?

Avant de lui faire confiance, elle devait enquêter un peu sur lui.


Cette semaine avait été merveilleuse. Elle l’avait vu tous les jours. Ils avaient fait ce que tout touriste se devait de faire pendant des vacances dans cette ville : des visites. Notre-Dame de la Garde, le musée des civilisations, l’abbaye de Saint Victor, la Cité Radieuse, ils avaient bu quelques cafés dans les rues du Vieux Quartier, et même pris le bateau pour faire un tour sur les îles proches de la ville. Évidemment, ils avaient aussi visité les calanques, avec des plages cachées où ils avaient dormi avant de se baigner dans le bleu presque turquoise de la mer.

Pendant toute la semaine, Laurent s’était comporté en véritable gentleman. Il avait vraiment de bonnes manières, comme elle l’avait remarqué lors de leur rencontre. Doux, délicat, attentif à son bien-être. Tout le contraire de son ex-mari. Il y avait toujours cette petite étincelle de joie dans ses yeux bleus. Hier, ils étaient allés à la plage et une fête improvisée avait commencé. Il l’avait invitée pour une valse, comme au bon vieux temps. Ses bras étaient forts mais doux, et il savait danser. Peu à peu, elle avait commencé à se persuader qu'il n'était effectivement qu'un ancien chasseur alpin et que sa méfiance n'était rien d'autre que de la paranoïa.

Ce soir, ils étaient au restaurant asiatique. Un petit restaurant caché dans le vieux quartier, qui servait de la nourriture vietnamienne. En entrant, Laurent avait commencé à parler un étrange langage que tout le personnel semblait comprendre.

— Qu’est-ce que tu dis ?

Il sourit.

— Oh, rien, je dis juste bonjour.
— Tu parles vietnamien ?

Il rougit.

— Oui. Je suis né au Vietnam et j’ai grandi là-bas. Mon père était… soldat pendant la guerre d’Indochine.
— Tu m’as dit que tu étais de Nancy !
— Ma mère et moi sommes rentrés en France après la mort de mon père. On s’est installés à Nancy et j’ai fait ma vie là-bas.
— Je comprends. Ça explique la… forme de tes yeux.

Laurent regarda ses pieds, clairement embarrassé.

— Mon père a toujours pensé que ma mère l’avait trompé avec un vietnamien, justement à cause de mes yeux bridés. J’ai jamais cherché à savoir si c’était vrai ou pas. Je sais même pas si ça m’importe, en vérité.

— Je suis désolée, Laurent, dit Regula, contrite.
— C’est pas la peine, tu pouvais pas savoir. De toute façon il est mort, il a eu que ce qu’il méritait.

Inconsciemment, Regula regarda les poignets de son amant, couverts de cicatrices. Avait-il souffert de sa relation avec son père et déchargé sa frustration sur lui-même ? Se sentait-il responsable ? Ou son père était-il cruel au point de traiter son fils de la sorte ?

Elle posa une main sur son bras. Il émit un petit sifflement de douleur.

— Oh, pardon. Je t’ai fait mal ?
— Non, c’est un genre de… réaction psychologique. Ça me le fait à chaque fois qu’on me touche les poignets. J’ai… vécu des moments compliqués quand j’étais dans l’armée. Un jour, mon équipe et moi avons été… pris au piège. Et… c’est arrivé. Je suis pas prêt à en parler pour l’instant, je suis désolé.
— Je comprends.

Prise d'une étrange pulsion, elle passa une main sur sa joue et l’embrassa passionnément. Il la laissa faire. Elle se surprenait elle-même, après des années sans fréquenter un homme. Après tout, ce n'était qu'une aventure, n'est-ce pas ?


Ils traînaient dans les rues et depuis qu’ils avaient quitté le restaurant la veille, Regula avait une idée en tête. Un nouvel objet pour son magasin, qu’elle avait mentalement mis au point alors qu’elle regardait Laurent manger avec des étincelles dans les yeux. Il adorait vraiment la nourriture vietnamienne et elle voulait faire un dessert ou un gâteau qui la lui rappellerait pour toujours. Elle était vraiment amoureuse de lui, elle ne pouvait pas le nier. Pour lui, elle voulait créer des bonbons ou des gâteaux qui auraient le goût de tous les desserts vietnamiens existants. Elle avait soumis l'idée à ses collègues et comptait entrer en contact avec Chaz Ambrose pour qu’il l’aide.

— Laurent ? Pourquoi il y a autant de gens en maillots bleus ou jaunes dans les rues ?
— Il y a un match de rugby ce soir au stade. Australie contre Écosse. J’avais des tickets mais l’ami qui devait venir avec moi est malade, donc tant pis, je n’irai pas.

Regula n’était pas très fan de rugby, donc elle ne se proposa pas pour l’accompagner. Elle n’avait jamais vraiment aimé le sport.

— Je suis désolée pour toi.
— C’est pas grave, ne t’en fais pas. Je trouverai peut-être quelqu’un qui me les rachètera.

Elle sentit alors une présence derrière elle. Une présence étrange, pesante. C’était normal d’avoir quelqu’un derrière soi dans la deuxième plus grande ville de France, mais elle avait encore le sentiment d’être espionnée. Elle n’avait de cesse de regarder derrière elle afin de savoir qui la suivait. Un pickpocket ? Quelqu’un qui pensait qu’elle était vraiment Jamie Lee Curtis ? Un espion ? Elle n’arrivait pas à le savoir, mais elle savait qu’elle ne se sentait pas à l’aise.

— Regula, ça va ?

Elle secoua la tête.

— Tu ne te sens pas… observé ?

Laurent hocha la tête.

— Ouais, moi aussi j’ai l’impression qu’on me suit. Ça te met mal à l’aise ?
— Oui, un peu.

Son amant regarda derrière lui. Bien sûr, il ne remarqua rien, mais il comprenait ce qu’elle ressentait. Ils essayèrent de marcher dans plusieurs directions, se tenant fermement la main pour éviter de se séparer, mais ça ne changeait pas leur impression. Jetant un énième regard derrière elle, elle reconnut l'un de ses poursuivants. Tara Singh, capitaine de la FIM DE20 "Rena" à l'allure de femme fatale et diabolique, l'observa de ses yeux noirs pendant une demi seconde. Sans céder à la panique, elle profita du minuscule moment d'interrogation dans le cerveau de Singh pour jeter un sort de confusion pour qu'elle oublie qu'elle était sur sa piste.

— Laurent ? Demanda Regula. À quelle heure est le match dont tu m’as parlé ?
— Dans une heure.

Une troupe de touristes anglais portant un maillot jaune et vert débouchait du boulevard Euroméditerranée. Laurent n'avait absolument pas remarqué ce qu'il s'était passé entre Regula et Singh, qui regardait autour d'elle dans la plus grande confusion, ne sachant plus ce qu'elle faisait ici.

— Tu veux venir avec moi ? proposa Laurent en observant les touristes avec envie.

Elle prit sa main alors qu’ils se fondaient dans le groupe de supporters qui se dirigeait vers le métro. Singh rebroussait chemin, suivie de ses agents.

— Bien sûr que je veux !


L’ambiance était surréaliste. Des milliers de curieux et de supporters étaient venus encourager leur équipe préférée. Ils avaient traversé la Manche pour certains, l’Océan Indien pour les autres, pour voir ce qui s’annonçait comme un match épique. Australie contre Écosse. L’ambiance était magique pour Regula, qui n’avait jamais vu ça auparavant. Entouré de drapeaux et d’écharpes qu’on agitait dans les airs, Laurent chantait de sa voix la plus forte et profonde, emporté par l’énergie du stade et des supporters qui criaient autour d’eux. Il n’était même pas australien ni écossais, mais Regula admettait qu’il était compliqué de ne pas chanter avec les cornemuses et le chœur des supporters.

Flower of Scotland
When will we see
Your like again
That fought and died for
Your wee bit hill and glen
And stood again him
Proud Edward’s Army
And sent him homeward
To think again

Il y avait environ 67000 places au stade Vélodrome et pas loin de 50000 personnes étaient venues voir ce match. C’était énorme pour une ville plutôt intéressée par le football et son bien-aimé Olympique. Elle était sûre qu’ils ne la trouveraient pas. C’est pour cette raison qu’elle avait accepté l’invitation de Laurent pour voir ce match. Il ne savait pas qui elle était vraiment, et c’était mieux comme ça. Pour lui, elle était juste un amusant et extravagant sosie allemand de Jamie Lee Curtis et pour les supporters, ils n’étaient qu’un couple de personnes âgées curieuses de voir un match de rugby. Avec ses cheveux anciennement roux, Laurent pouvait vaguement passer pour un irlandais. Mais, sincèrement, elle pensait que personne ne se soucierait d’eux et de qui ils pouvaient vraiment être. Et alors que les cornemuses se taisaient, elle se faufila dans la foule en essayant de ne pas renverser ses deux verres, et rejoignit Laurent, qui continuait à chanter avec les supporters écossais. C’était magique, il n’y avait pas d’autres mots. Elle en avait des frissons, même en étant allemande. Comme son amant le lui avait expliqué, au moment du vers "L’armée du fier Édouard", certains criaient un "L’ANGLETERRE" venu du fond du cœur, comme pour montrer qu’ils ne voulaient plus obéir à la couronne du roi Charles.

Those days are past now
And in the past
They must remain
But we can still rise now
And be the nation again
That stood against him
Proud Edward’s army
And sent him homewards
To think again

Tout le stade applaudit. Certains supporters écossais pleuraient d’émotion. Regula passa entre deux rangées de sièges et se glissa sur la gauche de Laurent, qui sursauta en la sentant à côté de lui.

— Je ne t'avais même pas vue arriver, tu es réapparue par magie ?

Il éclata de rire et enlaça Regula.

— Ma petite sorcière.

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