Carl Glasko ne s’attendait pas à se trouver sur le palier de la maison du Directeur Bright. Quand il fit cette petite blague dans les toilettes au sujet de Jack étant amateur de miroirs, il pensait que c’était juste de l’amabilité. Mais cette blague mena à une discussion au sujet des autoportraits, ce qui mena à une invitation. Et quand le Directeur du Site-19 vous demande si vous voulez voir sa collection d’autoportraits, il est difficile de refuser.
"Ah, Carl ! Vous êtes là", s’exclama Jack quand il ouvrit la porte.
"Eh bien, vous m’avez invité, après tout. Qui suis-je pour refuser un dîner ?"
Jack lâcha un petit rire, "Vous seriez surpris de savoir combien de gens refusent. L’une des malédictions dont ceux qui sont célèbres au sein de la Fondation sont victimes, c'est que tout le monde a 'peur de déranger'."
Jack guida Carl dans l’intérieur de sa maison. C’était un bâtiment à deux étages, rien de trop luxueux mais toutefois, quelque chose avait l’air vide à ce sujet. L’écho des bruits de pas se faisait entendre un petit peu trop. Les murs avaient l’air un peu trop nus.
Mais Carl n’y fit pas vraiment attention. Lui et Jack mangèrent à une table prévue pour six personnes. Ils s’assirent tous les deux à une extrémité et laissèrent l’autre complètement vide. La conversation sauta de sujet en sujet, atterrissant éventuellement sur des thématiques plus graves, plus philosophiques qui arrivaient généralement à s’introduire dans n’importe quelle bonne discussion. Ils parlèrent des plaisirs et des douleurs qui venaient avec la compagnie des autres. Ils parlèrent d’identité. Ils parlèrent de visages.
"J’ai un Redbreast vieux de 18 ans, j’avais besoin d’une excuse pour l’ouvrir", finit par dire Jack, qui se leva de sa chaise. Carl hocha la tête. Il pouvait bien prendre un bon whisky.
Après quelques verres, Jack se sentit assez relaxé pour montrer à Carl le grenier. Il se trouvait derrière une petite porte que Carl avait pris pour un placard ou une pièce supplémentaire servant à faire un peu de place. Les escaliers étaient à peine illuminés. Quelques petites lumières ici et là. Jack blâma quelque chose comme "l’atmosphère" comme raison mais la vérité était qu’il ne les avait pas changées depuis plusieurs décennies.
Après avoir conduit Carl au sous-sol, Jack appuya sur un interrupteur. Quelques ampoules s’allumèrent faiblement, illuminant un mur couvert d’autoportraits. Excepté que c’était des portraits de différents visages.
"J’imagine que votre visage change plus souvent que la plupart d’entre nous", dit Carl. Jack rit un petit peu puis se dirigea vers une table au centre de la pièce. Sur cette table se trouvait un miroir, une tablette graphique et un grand nombre de crayons. Sur la tablette, un portrait inachevé du Jack avec qui Carl venait tout juste de dîner était affiché. Jack s’installa et regarda les portraits autour de lui en souriant. Après quelques minutes, Carl brisa le silence.
"Est-ce qu’ils vous parlent ?"
Jack se tourna vers Carl, le même sourire collé à son visage mais avec quelque chose de pesant derrière ce regard.
"Voulez-vous entendre quelques histoires ?"
Carl hocha la tête et s’assied sur un siège à côté de Jack.
Jack termina ses histoires, puis les deux tombèrent dans un lourd silence. Il reprit une petite gorgée de son whisky, étant donné qu’il l’avait apporté avec lui. Carl avait fini sa boisson il y a une heure de cela, alors au lieu de faire ça, il regarda l’homme se perdre en regardant les portraits accrochés sur les murs.
"Est-ce que votre corps d’origine vous manque toujours ?", demanda Carl. C’était une question bête. Il connaissait la réponse. Il voulait juste entendre Jack lui dire.
"Oui, toujours."
"Est-ce que vous vous souvenez à quoi il ressemblait ?"
Jack lâcha un petit rire en réponse à cette remarque avant de répondre.
"C’est drôle, vraiment. La majorité des hôtes sont tellement angoissés en voyant quelqu’un d’autre dans leurs corps qu’ils ne réalisent jamais à quel point ils semblent étranges quand ils sont dans le mien."
