Surprise Dimensionnelle partie 2

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Is anybody there?
Does anybody care
What I'm feeling?
I wanna disappear
So nobody can hear
Me when I'm screamin'

'Cause I could use a hand sometimes
Yeah, I could use a hand sometimes

They say pain is an illusion
This is just a bruise
And you are just confused
But I am only human
I could use a hand sometimes
I am only human.

The night is bitter cold
I wonder if you know
That I'm sleepless
Waitin' like a ghost
When I need you the most
I go unnoticed

'Cause I could use a hand sometimes
Yeah, I could use a hand sometimes

They say pain is an illusion
This is just a bruise
And you are just confused
But I am only human
I could use a hand sometimes
I am only human.

The weight of the world is pullin' me down
(Where are you now, where are you now?)
Every breath feels like I'm gonna drown
(Where are you now, where are you now?)
I'm the only one left alone on this Earth
Singin' this song but can't find the words

'Cause I could use a hand sometimes
Yeah, I could use a hand sometimes

They say pain is an illusion
This is just a bruise
And you are just confused
But I am only human
I could use a hand sometimes
I am only human.

Krewella - Human


Unité médicale Delta-3-2, Finlande. Dimension Angstrom - 08/08/2010, 03h56.

Le ronflement des appareils médicaux était la seule source de bruit dans la chambre. Cela faisait douze heures qu'il tenait sa main. Elle n'avait toujours pas repris conscience. Il pouvait toujours deviner son visage sous les bandages. Les médecins avaient dû lui raser la tête pour opérer et retirer les morceaux de casque figés dans son crâne. Son état n'avait fait qu'empirer et, si elle passait la nuit, elle aurait de lourdes séquelles. Si elle passait la nuit…

Il réprima un sanglot de désespoir.

Zone médicale d'urgence 21, Finlyandiya. Dimension Driscoll - 08/08/2010, 03h56.

Le ronflement des appareils médicaux était la seule source de bruit dans la chambre. Cela faisait douze heures qu'elle tenait sa main. Il n'avait toujours pas repris conscience. Elle pouvait toujours deviner son visage sous les bandages. Les médecins avaient dû lui raser la tête pour opérer et retirer les morceaux de casque figés dans son crâne. Son état n'avait fait qu'empirer et, s'il passait la nuit, il aurait de lourdes séquelles. S'il passait la nuit…

Elle réprima un sanglot de désespoir.

Z̼̹o̫̯̻͚n̟̳͔͔̹̹͓͡i̝͖̝̻t̟͕̺̰͓ͅé̖͚̮̹͔͜ ́m̗͙̪̲̤̻͘é̩̰̬̳di̦̥̯c̀al̵͙͖e̲͖͍̮͇ ̼͞d͏͚͈̱̬͇͙͎'͙͇ͅu̵̗̗̠̟ŕ̬g͉̝̹̱e̺̲͚̦͠n͏̟̜c̲e̼̘̜̘̫ͅ D̰͍͈̺͓͍ͅe҉̦̳͎̹ͅl̤͇͔t͓̤͙͙̣̖̲ḁ̸̘͎͈͕̫-̭͝2̶͇͚1͓̰̖͙̝,̵ F̠i̷̼n̩̥̟͍͉͟l͇̩͖̣͇̟a̗̺̜̣̤̦̫n̙̜͇d̢͚̤̣ï̪̯͓̙ỳ̹͈͈̺̰ͅḙ̻̕.̝ ̧̥̰̺̩̝̖̖Dimension ̙̙̱͚Ąṋ̢̤̮̮̮g̣͖͚̯̥͝ͅs͏͎̼͎͈c̛͓͍̮o͎̕l̛̦͚͙̳̹̞l͖͖̳̯̻̞ ̘͟-̗̠ ҉̜͙̝͉̼08/08/2010, 03h56

- Ne t'en va pas…

Zone administrative Ansuz-1, Salle de réunion 1. Dimension Driscoll - 08/08/2017, 09h52.

Ils étaient des professionnels. Tous. Bien que Viviane et Neremsa eurent un peu plus de mal que Benji et Octavio, ils reprirent une attitude normale. Le belge et la jeune femme restaient néanmoins pâles. Ni François ni le jeune homme au T-shirt "Iron Man" ne semblaient comprendre ce qu'il se passait. Ils interrogèrent Viviane du regard. Elle répondit d'un signe négatif de la tête et s'avança.

- Bienvenue sur le Site Ansuz, messieurs. Je suis Viviane Brewilh, directrice de la sécurité. Vous connaissez déjà François Esperonne, chargé des opérations de censure, et voici Benjamin Hemseheim, notre responsable principal du bloc RDTC, Recherche et Développement de Techniques de Confinement.

Ce n'est qu'en entendant le prénom du responsable RDTC qu'ils se rendirent compte qu'il s'agissait d'une version organique de l'androïde. Une surprise supplémentaire.
Octavio se présenta à son tour, suivit par Benji et par Neremsa.

- Allons dans la salle de réunion, reprit Viviane.

La salle était spacieuse et bien éclairée par les nombreuses fenêtres dont elle était dotée. Une vingtaine de chaises étaient disposées autour d'une grande table ovale portant le logo de la Fondation. Sur l'extrémité gauche de la table se trouvaient trois carafes d'eau, de café et de thé ainsi que six verres et six tasses. Un projecteur pendait du plafond, pointé sur un tableau blanc. Il y avait des blocs multiprises incrustés directement dans la table afin de permettre à toute personne s'y asseyant d'y brancher téléphone, tablette ou ordinateur portable. Ils s'installèrent près des rafraichissements et débutèrent ce pourquoi ils étaient là. Les arrivants d'Angstrom se rendirent compte que les prises standardisées de Driscoll n'étaient pas du tout les même que les leurs. Le DI&ST local aurait à plancher sur un adaptateur dans les jours qui suivraient.
François prit la parole en premier.

- Nous sommes fiers de vous accueillir dans le site Ansuz pour cette réunion d'échanges et nous espérons que ce sera enrichissant pour nos deux sites. Dans ce but, nous allons d'abord dialoguer sur les différentes fonctions de nos sites respectifs, puis nous nous répartirons avec notre homologue afin d'échanger sur nos domaines respectifs. Pour ce faire nous avons reçu l'autorisation pour que nos chers invités puissent se séparer à condition de rester accompagnés par leur homologue ou un membre du département de sécurité.

La première demi-heure de la réunion consista en l'échange de banalités administratives. Effectifs des sites, fonctionnement général des départements, gestion globale… Des menus détails, en l'occurrence. Si Octavio et Benji avaient été surpris en voyant Viviane, ils étaient à présent motivés à l'idée de passer le reste de la journée, voire de la semaine à échanger ou discuter avec leur homologue, et ce, dans leur domaine de prédilection. Neremsa, lui, redoutait le moment où il serait seul avec Viviane. Il avait du mal à se concentrer sur autre chose que son visage. Elle conservait une apparence calme et décontractée et arrivait à simuler une certaine attention pour la réunion. Ceci dit, cette Viviane semblait en tout point similaire à celle que Neremsa avait connue. Et le belge l'avait connue dans l'intimité durant plusieurs années. La directrice de la sécurité du site Ansuz avait le même tremblement presque imperceptible dans ses mains quand elle avait pris une tasse de café ainsi qu'un léger plissement du coin des yeux. Des signes de nervosité qu'elle cachait admirablement bien aux personnes présentes. Tout l'inverse du barbu, qui avait renversé un peu de café et avait dû s'y reprendre trois fois avant de pouvoir remplir sa tasse. Personne ne lui en avait tenu rigueur. Même à la Fondation, on ne voyait pas souvent des fantômes.

Zone administrative Ansuz-1, Bureau de la directrice de la sécurité. Dimension Driscoll - 08/08/2017, 10h37.

Le masque tomba avant même que la porte du bureau soit refermée.

- Tu lui ressembles tellement.

Le tutoiement était venu naturellement, mais la voix de Viviane tremblait.

- Je te retourne le compliment.

La voix du barbu était encore moins assurée. Il avait toujours eu plus de mal à masquer ses émotions. Viviane s'avança, les yeux rivés sur la prothèse de Neremsa. Elle ne dit rien pendant plusieurs secondes avant que le belge, gêné, ne rompe le silence.

- Oui heu… J'ai eu un petit accident avec une anomalie et…

- Je sais, l'interrompit-elle.

Elle leva son bras droit et montra sa main à son interlocuteur. Trois de ses doigts et une partie du dos de sa main avaient une teinte artificielle, comme s'ils étaient couverts de fond de teint. Viviane remonta la manche de sa chemise. La peau de son avant-bras située au niveau de l'Ulna1 avait une teinte métallique. Viviane expliqua :

- Mon majeur, mon annulaire, mon auriculaire, les métacarpes correspondants, mon Ulna et une partie de mon Humérus sont atteints. Au moins, ça a le mérite d'être plus simple à cacher que ton oeil.

- Tu dois donner de sacrés punchs avec un bras comme ça.

Elle sourit. Le Neremsa qu'elle avait connu faisait le même genre de remarques. C'était difficile d'assimiler le fait qu'il ne soit pas la même personne.
Viviane se détourna et traversa la pièce.

- On a un boulot à faire, rappela-t-elle.

Neremsa prit le temps d'observer la disposition du bureau de son homologue. Viviane avait opté pour un bureau en bois, là où lui avait choisi un meuble en métal. Un écran d'ordinateur et un clavier prenaient l'espace situé à droite, tandis qu'une tasse de café affichant un drapeau écossais trônait sur la gauche, accompagnée de plusieurs feuilles. La pièce disposait également d'une baie vitrée, donnant sur une vue panoramique du site, et d'un porte-manteau. En lieu et place d'un P-90, un FAMAS y pendait, à sa lanière. La partie droite de la pièce, là où le belge avait fait démolir un mur pour installer un ensemble d'écrans, contenait deux grandes armoires. L'un des deux meubles était ouvert et laissait entrevoir plusieurs classeurs. La partie gauche contenait un grand tableau en verre sur lequel Viviane avait inscrit différentes to-do-lists ou rappels. Un petit meuble situé juste à gauche du tableau supportait une machine à café.

Neremsa traversa la pièce à son tour et s'installa face à Viviane. Il déposa sa valise sur ses genoux et bascula les deux verrous sur la position "ouvert". Il se saisit d'une enveloppe scellée et estampillée d'un "CONFIDENTIEL" qu'il tendit ensuite à Viviane.

- De la part du conseil des O5 de la dimension Angstrom. À destination de votre conseil Z9 uniquement.

La jeune femme ouvrit un des tiroirs de son bureau pour se saisir d'une enveloppe similaire, qu'elle tendit à son interlocuteur.

- De la part du conseil Z9 de la dimension Driscoll. À destination de votre conseil des O5 uniquement.

Le belge prit l'enveloppe et la glissa dans un double-fond de sa valise.
L'échange protocolaire des documents fut ainsi effectué.

Viviane ouvrit un autre tiroir et dégaina deux verres ainsi qu'une bouteille d'Auchantoshen2, un whisky écossais. Le belge haussa un sourcil.

- Pendant le service ? Demanda-t-il.

- On en a bien besoin après l'émotion de ce matin, répondit la rousse en haussant les épaules.

Pendant qu'elle servait le whisky, Neremsa la questionna.

- Comment ça s'est produit ?

Elle ne releva pas le regard des verres. Le barbu allait s'excuser quand elle répondit.

- On traquait une anomalie du côté de l'Empire Russe3, un nuage de corbeaux qui perturbait la météo à grande échelle. On avait un trio d'hélicos mais… Vu tes réactions quand on s'est vus, j'imagine que dans ta dimension, c'est moi qui suis morte ?

- Oui…

- Putain, on dirait presque un film.

Elle tendit un verre à son interlocuteur, puis leva le sien pour trinquer.

- À nos morts.

- À nos morts.

Le tintement des verres résonna dans la pièce. Viviane raconta comment s'était produit l'incident de son côté. Son équipe n'était, bien entendu, pas la même que celle qu'avait connue Neremsa dans sa dimension. Mais il soupçonnait que le couple Cabrycg-Daleah correspondait au couple Rostrova-Vicherna. A la seule différence que la mort n'avait pas séparé ce couple dans Driscoll : tout deux avaient péris à bord de leur hélicoptère.
Neremsa raconta à son tour comment l'incident s'était déroulé dans sa dimension. Viviane parut peinée pour Georgi. Ils conservèrent ensuite le silence, prenant de temps en temps une gorgée de whisky.

- Vous aussi vous aviez l'habitude de surnommer les membres de vos équipes ?

Le belge acquiesça.

- C'était quoi mon surnom ? Enfin, le surnom de la Viviane de ta dimension.

- Flambeuse.

- Ici, c'est Flamme. C'est relativement proche. Ils t’appelaient comment toi ?

- Rabat-joie.

Elle explosa de rire.

- C'est comme ça qu'on aurait dû le surnommer, on avait trouvé que "Ronchon".

Elle regarda un moment dans le vide.

- Quelle était ta relation avec ta Viviane ?

- On était amants.

Elle ne parut pas surprise.

- Et toi, quelle était ta relation avec ton Neremsa ?

Elle sourit et leva la main gauche. Elle portait un anneau doré torsadé en motif celtique. Un anneau de fiançailles écossais.

- J'en déduis que toi non plus tu n'as plus eu de relations après ça. Lança Neremsa.

- Que des coups d'un soir. Je suppose que… J'ai peur…

- … De vivre encore ça.

Elle hocha la tête. Le belge reprit :

- C'est pareil pour moi. Un blocage pour m'attacher émotionnellement au delà de l'amitié.

Viviane soupira et leva à nouveau son verre.

- C'est le lot des gens comme nous, plus encore ici qu'ailleurs. On morfle à la place des autres et par notre sacrifice on les protège pour qu'ils n'aient pas à vivre ce qu'on vit.

Ils trinquèrent à nouveau, échangeant un sourire complice, mais néanmoins teinté d'amertume.

Illu-Surprise-dimensionnelle-2.png

Viviane déposa son verre et se redressa.

- Je te fais visiter deux ou trois installations ?

Le belge vida son verre à son tour avant de répondre.

- J'dis pas non. Mais t'as pas du boulot ?

Elle haussa les épaules.

- Je peux bien cumuler une tournée d'inspection tout en te faisant visiter. Il me semble que tu travailles souvent avec du personnel anormal, non ?

- On peut dire ça comme ça oui.

- Alors on va faire un petit tour dans nos installations, lâcha-t-elle avec un petit sourire.

Zone d'habitat spécialisé Ansuz-5, Section des anormaux humanoïdes, "Le Cirque". Dimension Driscoll - 08/08/2017, 13h00.

- Il est plus mignon en vrai qu'en photo.

- Ferme la, Sui.

La petite chinoise en kimono bleu laissa échapper un rire cristallin et cessa d'observer Neremsa en pleine conversation avec Sébastien.

- Vous rougissez, directrice Brewilh. La fameuse Flamme ne serait donc pas la fameuse machine de guerre que tout le monde connaît ? Elle serait donc dotée… De sentiments ?

- Sui, si tu ne la fermes pas dans la seconde, je m'assurerais personnellement de te foutre en isolement pour les cinq prochaines années.

- Des promesses, toujours des promesses. Honnêtement, ça fait bien deux cent fois que tu me sors cette menace, tu radotes à la longue.

Sui enfonça un doigt dans le flanc de Viviane et la regarda droit dans les yeux avec un petit sourire narquois.

- Viviane, je ne sais pas si tu as vu ta tête dans un miroir depuis que ton fiancé est revenu d'entre les morts, mais je ne t'ai jamais vu plus souriante depuis que je te connais.

- Ce n'est pas mon fiancé, Sui. Ce n'est pas la même personne. Il ne vient même pas de cette dimension.

- Qu'est-ce que ça change, honnêtement ?

Viviane cligna des yeux et inspira pour répondre. Sui leva la main pour la stopper.

- Non, Viviane. Arrête de chercher des excuses. Je t'ai déjà entendue cauchemarder et pleurer son nom dans ton sommeil.

- C'était il y a des années, ne viens pas me faire chier pour…

- Mais qu'est-ce qu'il faut pas entendre. Tu vas vraiment pinailler pour ça ? Tu ne m'as pas dit qu'il avait vécu la même chose que toi ?

- Oui, mais je ne vois pas ce que ça change.

- A part le fait que vous pouvez mutuellement soigner vos plaies ?

Sui leva un bras et s'entailla le poignet d'un geste vif avec un de ses ongles. Le temps qu'elle mette son poignet sous le nez de Viviane, la blessure s'était refermée. La rousse fronça les sourcils.

- Et c'est sensé signifier quoi, exactement ?

- J'illustre mon propos.

- Et tu veux que je fasse quoi, concrètement ?

- Il est là pour quelques jours, non ? Personnellement si je retrouvais mon mari je sais très bien ce que je ferais.

Viviane renifla.

- C'est pas aussi simple que ça, Sui.

- C'est très simple, c'est juste toi qui veux absolument que ce soit compliqué en t'imaginant des obstacles. Tu veux qu'on demande à Sébastien ou Pauline d'improviser un petit quelque chose pour vous convaincre ?

- J'ose espérer que Sébastien se montrera plus raisonnable que toi ou Pauline à ce sujet.

- Oh attends, on peut vérifier ça tout de suite.

Sui dirigea son regard vers Sébastien, toujours en conversation avec Neremsa, et fronça légèrement les sourcils. Une ou deux secondes plus tard, l'intéressé releva la tête pour regarder la chinoise avant de secouer la tête l'air désabusé. Viviane haussa un sourcil.

- Depuis quand tu fais de la télépathie ?

- Depuis jamais, j'ai juste compris comment emmerder Sébastien avec ça. Il entend les pensées comme un bruit de fond, du coup si tu commences à songer très fort à quelque chose tout en le regardant, ça va changer le bruit de fond auquel il est habitué. Et comme ce n'est pas la première fois que je le titille avec ça, il me repère plus vite. Du coup je peux lui envoyer des infos, d'une certaine façon.

- T'es pas possible bordel.

Sui ne répondit pas et regarda le vide quelques secondes avant de sourire.

- En attendant, Sébastien vient de me dire qu'il est plutôt d'accord avec moi.

- Pardon ?

- Pas sur toute la ligne, disons que j'avais émis des propositions très imagées. Mais il pense que, je cite "vous pouvez mutuellement apaiser vos âmes".

- C'est la dernière fois que je me confie à vous concernant ma vie privée.

Cette fois, Sui éclata de rire. Malgré son apparente désapprobation, Viviane ne put s'empêcher de sourire. Par bien des aspects, les membres anormaux du personnel pouvaient se montrer plus humains que les membres normaux.
La chinoise redevint sérieuse.

- Plus sérieusement, réfléchis-y. On est plusieurs à songer que ça te fera du bien.

Zone d'habitat Ansuz-7. Dimension Driscoll - 08/08/2017, 18h24.

Benji était penché sur un ordinateur portable, tandis que Neremsa et Gémini lisaient. Dire que la journée avait été riche était un doux euphémisme. Tous trois étaient étourdis par les possibilités offertes par la coopération entre les deux Fondations.

- Nerem', tu vas pas me croire.

- Leur DIST est meilleur que le nôtre ?

- Non, enfin si, enfin ça se discute, mais on s'en fout.

- Tiens tu ne zozotes plus ?

- On s'en fout je te dis. Ils ont une saison deux, trois, quatre et cinq pour Firefly ! Et la saison six est en cours !

- Je suis presque certain qu'il est interdit de faire transiter quoi que ce soit d'une dimension à l'autre.

- On peut s'arranger, non ?

Le belge fit mine de réfléchir en se tournant vers Gémini.

- T'en penses quoi Octavio ?

Le concerné ne daigna pas relever la tête de son livre.

- Si vous m'autorisez à prendre quelques uns de leurs livres et leurs méthodes de censure, je suis certain qu'on peut faire une entorse à la règle, surtout si ça reste sur l'intranet du site Aleph.

- Bon ben face à tant d'adversité, je suppose que je vais devoir vous autoriser à enfreindre les règles.

- Je te passerais une copie de la série, promis.

Le belge leva les yeux au ciel et, après avoir consulté l'heure, se leva.

- Je vous abandonne, je dois assister au débriefing d'une FIM qui rentre ce soir.

- Tu travailles trop.

- Il paraît, oui.

Zone d'habitat Ansuz-1. Dimension Driscoll - 08/08/2017, 19h15.

Viviane ouvrit la porte, souriante. Le belge lui rendit son sourire. Elle avait enfilé une robe bleue, décorée de motifs celtiques, là où son homologue avait un simple T-shirt gris.

- Joli appartement.

La rousse haussa un sourcil.

- Tu n'as pas un logement équivalent ?

- Si, mais je n'y suis pratiquement jamais.

- Pourquoi je ne suis pas étonnée ?

Elle l'invita à entrer et ferma la porte derrière lui.
L'appartement était frais, ce qui était un soulagement par rapport à la température extérieure. Le logement, bien que relativement grand, n'était composé que de cinq pièces : un couloir d'accès, un grand salon qui faisait office de pièce générale et qui menait vers une petite terrasse, une salle de bain, une cuisine et une chambre.

Viviane lui désigna un divan avant d'aller chercher des rafraichissements dans sa cuisine.

- Tu es consciente que j'ai dû mentir à mes collègues pour venir ?

- Parce que ça ne fait pas partie de ton poste, peut-être ?

- Touché.

Elle déposa une carafe d'eau et deux verres sur une table basse et s'installa à côté de lui. Après avoir passé une journée ensemble, il n'y avait presque plus de gêne entre eux.

- En tout cas les infrastructures de logement des anormaux sont impressionnantes.

- Ça n'a pas toujours été comme ça. Au début on a eu beaucoup de mal à justifier de les employer au lieu de les confiner. J'espère que ça permettra d'accélérer le mouvement chez toi.

- D'après Sébastien il n'y a quasiment aucun souci de cohabitation.

- C'est le cas, mais en partie parce que les éléments les plus récalcitrants sont logés dans une zone carcérale et placés sous inhibiteurs quand c'est possible.

Neremsa hocha la tête. La technologie des inhibiteurs était une avancée particulièrement impressionnante. Ces composés pharmaceutiques étaient soit généraux soit développés directement par rapport au métabolisme d'une personne en particulier. Ils permettaient à une petite partie des personnes dotées de capacités anormales d'en être débarrassées, à condition de prendre une dose d'inhibiteur quotidiennement. Il y avait deux usages : soit l'inhibiteur était inoculé de force pour capturer ou maintenir un anormal en détention, soit il était volontairement ingéré par un anormal afin qu'il n'ait pas à vivre avec son anomalie. En l'état actuel des choses, cela n'avait d'effet que pour les anomalies de type parapsy (manipulation d'éléments, télépathie, télékinésie, "magie", etc…). Il était beaucoup plus difficile, voire dangereux d'inhiber les anomalies physiques (l'exemple le plus frappant étant les hybrides humain-animaux).

Les deux directeurs continuèrent de converser sur les approches du traitement et de l'emploi de membre anormaux dans le personnel. Graduellement, la conversation dériva vers des sujets plus privés. Quelles avaient été leurs vies après l'accident, ce qu'ils faisaient en dehors des heures de travail. Au détour de cette conversation, Neremsa lâcha :

- Ça fait du bien de te revoir.

Viviane sourit et s'approcha un peu.

- Je ne suis pas la Viviane que tu as connue et tu n'es pas le Neremsa que j'ai connu.

- Je sais bien.

- Mais j'imagine que ça ne nous empêche pas de mutuellement apaiser nos douleurs, tu ne penses pas ?

Avant qu'il ne réponde, elle pencha la tête et l'embrassa en douceur.


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