SMITH.exe Partie 2

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26/06/2017 8h28

Après une petite dizaine de minute de potasse et d’échange de banalité entre camarades, Alexandre fut le premier à pénétrer dans l’amphithéâtre, par la porte battante donnant sur la partie supérieure de la salle. Du moins, se croyait-il le premier…

"Oh c’est pas vrai, venez voir ça les mecs ! Le prof est là.
-Nan, pas possible, lui répondit le suivant. Il est jamais à l’heure alors il va pas se mettre à être en avance, si ?
-Mais oui c’est bien vrai il est là !"

Et effectivement, celui qui était moqué comme étant l’enseignant le moins ponctuel de tout le campus se tenait derrière son bureau, visiblement plongé dans la lecture d’un livre épais. Petit à petit, les étudiants s’installèrent tout autour de lui dans un calme relatif, tous aussi étonnés les uns que les autres. Mais aucun n’osa sortir le professeur de sa lecture.

Il s’agissait d’un homme plutôt autoritaire malgré sa jeunesse toute relative ; il devait être dans la trentaine tout au plus. Les cheveux noirs, coiffés à la va vite. Une pilosité faciale entretenue irrégulièrement. Des yeux bruns presque grisonnants, vifs et perçants. Une taille moyenne pour un corps fin mais néanmoins une posture assurée et solide. C’était un homme complexe mais un éducateur avisé et personne ne saurait se plaindre de ses conseils. Cependant ceux-ci se faisaient rares puisque, bien qu’il réponde volontiers aux questions qui lui étaient posées, il disparaissait du campus dès qu’il en avait l’occasion.

Lorsque le dernier élève fut assis, il sembla comme sortir d’une trance et se leva pour se placer au centre de la pièce. Et au grand dam de ses spectateurs, il se mit à réciter son cours comme si de rien était. Il n’y eu aucun commentaire, ni même le moindre rictus de satisfaction.

Cependant, après seulement une vingtaine de minutes, un élève se décida à arrêter l’enseignant pour soulager le reste de ses camarades.

"Monsieur, commença-t-il, vous allez trop vite, on n’arrive pas à suivre"

Ce à quoi plusieurs autres acquiescèrent vivement. Le professeur sembla perplexe un instant, puis fit une moue désapprobatrice vers l’élève qui l’avait interrompue et repris néanmoins son cours, toutefois plus lentement et en marquant des pauses.

Mais au fur et à mesure que l’heure avançait, la remarque était vite oubliée dans l’esprit du fonctionnaire et il se remit à laisser couler les mots à son allure habituelle. Une des jeunes femmes du groupe en eut alors assez.

"Monsieur ! S’exclama-t-elle en levant les bras pour mieux capter son attention. Pourquoi est-ce que vous ne notez pas tout ça au tableau comme d’habitude ?"

Les autres élèves montrèrent leur approbation unanimement une fois de plus. L’intéressé fixa le tableau noir derrière lui, encore vierge malgré l’heure avancée. Il grommela quelques instants mais aucun ne put percevoir ce qu’il murmurait. Un brouhaha commença à se développer dans l’amphithéâtre.

Ensuite, l’éducateur leva prestement le bras dans un geste de calme autoritaire. Le silence se fit, les sanctions pouvaient tomber.

Mais alors qu’il ouvrait la bouche pour répondre à ses élèves, il y eu un éclair de lumière. Puis toutes les lumières s’éteignirent d’un seul coup et l’enseignant disparut sous les yeux de 48 personnes.


26/06/2017 9h18

Dans le noir d’un sous-sol clos, un homme fulminait.

"Saloperie de technologie d’arriérés de merde, s’écriai Antoine Smith !!"

Il y eu un bruit sourd, celui d’un bureau que l’on renversait, suivit du bruit de feuilles volantes, encore suivit du bruit de feuilles qu’on attrapait au vol et qu’on déchirait et froissait. Des pas vers un des bords de la large pièce. Un coup de pied malencontreux dans un mur, un juron supplémentaire. Des tâtonnements puis un grincement strident et les lumières se rallumèrent.

Le « professeur » Smith se releva et s’éloigna du groupe électrogène qu’il venait d’allumer pour rejoindre son espace de travail. Il fit bien attention à éviter la réplique de bureau qui avait été renversée et à enjamber la réplique d’estrade afin de ne pas « encore » se prendre les pieds dedans. Il s’installa sur une chaise devant ce qui semblait être un ordinateur monté de toute pièce et se frotta longuement les tempes avant d’entreprendre l’allumage de l’appareil.

Tout ce temps perdu.

Mais que s’est-il passé ?

Très simple : le réseau informatique de cette ville n’a pas pu supporter le flux de donnée lorsque j’ai compilé mon drone. C’est bon ? Tu captes tout ?

Pas vraiment, mais j’ai l’habitude maintenant. On ne risque rien au moins ?

Moi non, mais quand cet abruti de directeur va découvrir que je ne suis pas à mon poste, je vais me faire virer pour de bon. Et il va falloir que tu arrêtes avec les « on ». Il n’y a pas de « on ». Tu n’existes plus, fais-toi une raison. Il n’y a que moi.

Pourtant, je suis bien là… Alors, qu’avons-nous réussit à tirer ?

Probablement pas grand-chose, mon programme n’a surement pas eu le temps de transférer les données.

Pourquoi ne pas avoir fait un virus plus simple pour éviter que ça n’arrive ?

Pour perdre un an de plus à attendre que le transfert ne se termine ? Et risquer de me faire repérer par l’autre beaucoup trop tôt ? Non merci.

Et pourquoi alors ne pas chercher les données dont on a besoin à la source ?

Parce que pour se faire, j’aurais besoin d’équipement. Et pour produire cet équipement, il m’aurait fallu des matériaux bruts et des outils de précisions qui n’existent pas dans les parages. Est-ce que tu vas te rentrer ça dans le crâne ?

Difficile, étant donné que tu le monopolise, mon crâne.

Ça ne me fait pas plaisir de devoir jouer la nounou pour une bande d’attardés du bulbe, je le fais uniquement pour récupérer les maigres ressources dont j’ai besoin. Mais je vais leur montrer comment on inculque aux réfractaires par chez moi.

Enfin l’écran prit vie et Smith se mit à marteler le clavier de commandes avant de se rendre compte que l’engin n’arrivait pas à suivre.

"Foutue machine !"

Il ouvrit plusieurs consoles de commande et entreprit le diagnostic de l’appareil.

Il grogna, la plupart des programmes de recherche qu’il avait préparés à l’avance lui renvoyaient des données vides. Il lui faudrait donc repartir de zéro. Mais un autre projet l’attendait. Le Pandémonium attendra.

Incident Bourrasque

Rapport d'incident

Date du début de l'incident : 26/06/2017.

Résumé de l'incident :
Le 26/06/2017, 0804 heure locale, Site ██. La FIM Kappa-10 ("Skynet") détecte les activité d'un virus aux caractéristiques non-répertoriées sur le réseau internet mondial. Celui-ci semble copier des serveurs entiers et les transférer vers une base inconnue.

0815. Devant l'incapacité de la FIM Kappa-10 à enrayer la progression du virus, celui-ci est classifié Rhinocaffard.

0836. L'origine du virus commence à être triangulée. Cependant, aucun pare-feu ne semble l'arrêter assez longtemps et des serveurs contenant des données critiques sont menacés.

0857. L'ordre est donné de couper le réseau électrique à partir du point d'origine du virus afin de l'isoler, puis de reformater le réseau informatique.

0918. Origine déterminée dans un rayon de 100 km autour de Toulouse. Au vu des risques et malgré une localisation peu précise de l'origine, O5-0█ fait exécuter l'ordre.

0939. Reformatage du réseau effectué, plus aucune trace du virus détectée. Mise sous surveillance des personnes d'intérêt susceptible de créer un tel virus dans les zone d'origine.

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