SCP-343-FR
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Le Nicolas Flamel, illustration de Siméon Lavallée

Objet no : SCP-343-FR

Niveau de Menace : Orange

Classe : Euclide

Procédures de Confinement Spéciales : L'épave de SCP-343-FR et sa proximité immédiate doivent être interdites d'accès à l'aide d'une zone d'exclusion de dix kilomètres carrés (10 km²) marquée sur les cartes maritimes et les logiciels de navigation comme un passage présentant de nombreux récifs et de puissants courants marins. La « bulle » de SCP-343-FR doit faire l'objet d'une analyse mensuelle à l'aide d'une sonde sous-marine guidée depuis B2M (pour le protocole détaillé de cette opération et les mesures à y effectuer, veuillez vous référer au Document 343-FR-X-1). Toute variation particulièrement anormale au sein de la bulle, de même que toute dégradation de l'épave, doit être notifiée à l'équipe de recherche en charge de l'objet.

Un Protocole de Censure et Désinformation pour dissimuler ou, le cas échéant, justifier l'exposition de SCP-343-FR au monde civil (voir Addendum-343-FR-03) doit être mis en place.

Description : SCP-343-FR est une ancienne frégate « de dix-huit livres » dont la date de lancement reste sujette à débats, bien que probablement comprise entre 1797 et 1805, et reposant actuellement à deux-cent trente-six mètres (236 m) de fond au large des côtes basques. Celle-ci donne son nom à la classe Nicolas Flamel, une série de frégates conçues par l'ingénieur Jacques-Noël Sané et mises à flot entre 1797 et 1807. Ces navires, à la conception proche des frégates de classe Hortense contemporaines, alignaient 28 canons de 18 livres sur leur pont-batterie principal et 8 canons de 8 livres sur les gaillards avants et arrières ; ils mesuraient quarante-huit mètres (48 m) de longueur pour un maître-bau de douze mètres (12 m) et un tirant d'eau de six mètres (6 m).

La classe Nicolas Flamel fut élaborée dès le début du Directoire, dans un contexte de reprise en main de l'anormal par le gouvernement français après le pillage du Fonds de Versailles1 en 1791 et le désordre de la Révolution. Ces navires, tous baptisés selon le nom d'un occultiste célèbre, devaient servir aux différentes expéditions lancées par les Directeurs pour récolter des objets anormaux exotiques susceptibles de reconstituer des collections semblables à celles du Fonds de Versailles en son temps. La Campagne d'Égypte (1798-1801), point culminant de cette politique, fut à ce point de vue un succès, mais voit également la fin du Directoire avec le coup d'État du général Bonaparte.

Les frégates de la classe Nicolas Flamel ont intégré dans leur construction des éléments anormaux. Il est notamment fait mention dans les archives les concernant du « Fil d'Éole », un artéfact d'origine grecque consistant en un fil d'argent capable d'amplifier les effets du vent, qui aurait été dérobé par les Français à Gênes lors de la Campagne d'Italie et intégré aux voiles des frégates. Une partie de leur artillerie aurait également été composée de « canons-vortex », des armes utilisant un procédé de téléportation de leurs munitions pour augmenter sensiblement leur portée. Il semblerait également que certains navires aient bénéficié d'améliorations anormales individuelles.

Au-delà de leurs éléments anormaux, ces frégates ont dès le début été exclusivement conçues pour répondre à l'ascendant qu'avait pris l'Angleterre lors de la Quatrième Guerre Occulte2, en créant des troupes spécialement dédiées à l'anormal. Ainsi, au prix d'une artillerie légèrement plus faible que leurs concurrentes, ces frégates possédaient plusieurs soutes et un laboratoire. À la création de la Singulière Académie Impériale en 1805, les navires de la classe Nicolas Flamel se voient dotés des meilleurs capitaines et hommes d'équipage de l'Empire, dans le but de créer des unités d'élite de récupération d'anomalies et d'intervention occulte — le corps de « l'Hermé-Nautique ». Cette volonté est très clairement explicitée par le directeur de l'Académie, Monsieur de Camecruzac :

Si, comme nous venons de l'exposer, la volonté de Sa Majesté l'Empereur a permis à la Singulière Académie Impériale d'imposer le Code Singulier sur tous les territoires de l'Empire et d'ordonner tous les partis prenant part à la Singularité sous l'autorité unique de l'État, il existe encore en dehors des frontière de la France nombre d'ennemis susceptibles d'utiliser leurs moyens singuliers contre la Nation. C'est pour les mettre hors d'état de nuire aux intérêts de la France et de ses alliés que la Singulière Académie Impériale a travaillé à lever des régiments particuliers et à mener des campagnes aux confins du monde connu. […]

[…] C'est également pour servir à cet objet qu'ont été créées les compagnies de l'Hermé-Nautique, corps d'élite au sein de notre déjà prestigieuse institution, chargé de saisir les objets singuliers situés au-delà des mers et susceptibles de servir aux intérêts de l'Empire ainsi que de combattre toute puissance ennemie cherchant à s’emparer d'objets similaires. Le règlement définit ainsi une de ces compagnies : neuf officiers, parmi lesquels 1 capitaine de frégate et son second, 3 lieutenants et 4 enseignes, deux-cents soixante-dix marins, parmi lesquels 40 officiers-mariniers, 8 valets, 12 surnuméraires, 170 matelots et 20 mousses, soixante-dix fusiliers, parmi lesquels 1 capitaine de l'infanterie de l'Académie, 3 bas-officiers et 66 fusiliers – dont 20 ont été formés au rôle de canonnier –, et dix membres du Corps Savant de l'Académie, parmi lesquels 2 capitaines-professeurs, 3 caporaux-chercheurs, et 5 assistants.
Chaque compagnie se voit affectée à l'une de nos frégates de classe Nicolas Flamel, et est composée de manière à tirer le plus grand profit de son navire tout en rendant possible l'action sur terre et l'étude des Singularités : c'est à ces fins que l'on embarque une troupe de fusiliers plus importante que ce que comprendrait un équipage ordinaire, ainsi que des savants de l'Académie. Nous veillons par ailleurs à ce que tous les fusiliers soient aptes au service de l'artillerie et connaissent les rudiments des manœuvres de la marine, et dans le même temps à ce que les matelots sachent tous se servir d'un fusil et possèdent l'esprit de discipline, le sang-froid et les autres qualités qui déterminent un bon soldat : jamais notre Nation n'aura assemblé d'équipages plus aptes et plus courageux que ceux de l'Hermé-Nautique. Les membres de ce corps prestigieux, du matelot au capitaine-professeur, sont parmi de ceux qui ont une connaissance intime de la Singularité.

- Cahiers de M. de Camecruzac à l'attention des officiers de la Singulière Académie Impériale, chapitre III : La Guerre Occulte

Pour la liste des différentes frégates de classe Nicolas Flamel actuellement connues de la Fondation, veuillez vous référer au Document SAI/F/143.

L'épave du Nicolas Flamel ainsi que sa proximité immédiate montrent des niveaux de réalité très bas, ce qui génère localement un grand nombre d'anomalies. La plus remarquable prend la forme d'une sphère d'une trentaine de mètres de rayon au sein de laquelle l'eau de mer ne pénètre pas, créant une « bulle » autour de l'épave. Les conditions atmosphériques au sein de cette bulle sont très variables, la pression évoluant entre 1 et 10 atmosphères et le mélange gazeux changeant fréquemment de composition. L'épave ne semble par ailleurs pas se dégrader.

SCP-343-FR semble de plus être victime d'une anomalie temporelle modifiant perpétuellement la continuité de la vie du navire. Les archives actuelles relatives à SCP-343-FR sont ainsi en constante évolution à mesure que les évènements vécus par la frégate et son équipage changent de nature et d'ordre dans leur déroulement, les documents relatant ces éléments étant constamment effacés de la réalité puis remplacés par de nouveaux, qui apparaissent là ou la nouvelle continuité les a faits se trouver. L'anomalie ne concerne jamais que la frégate en elle-même et n'affecte pas d'autres événements ni la continuité temporelle en général.

Cette anomalie a rendu les recherches historiques sur SCP-343-FR particulièrement complexes, la récolte d'archives étant constamment compromise par leur disparition, et l'établissement d'une chronologie définitive étant rendue impossible par le réarrangement constant des événements. Toutefois, ces recherches ont permis de montrer qu'au sein d'un très large échantillon de continuités, certains événements étaient mentionnés beaucoup plus fréquemment que d'autres, une poignée n'ayant semble-t-il été mentionnés par une archive qu'en une seule occurrence. L'anomalie donne par ailleurs souvent lieu à des situations paradoxales, la date de lancement de la frégate se déplaçant parfois, par exemple, à une date postérieure à sa participation à la Campagne de Nouvelle-Hollande.

Ainsi, suite à la compilation des événements les plus fréquemment cités par les archives et au croisement de sources ne mentionnant pas directement SCP-343-FR, donc non-affectées par l'anomalie, il a été possible d'élaborer une chronologie vraisemblablement conforme à l'originale, bien que devant rester sujette à caution. Celle-ci est présentée ci-dessous.

  • 2 avril 1797 : Mise en service
  • 1797 : Actions mineures en Méditerranée
  • Mai à juillet 1798 : Campagne d'Égypte ; retour en France après la défaite d'Aboukir
  • 1799-1800 : Deuxième Campagne d'Italie ; soutien à la ville de Gênes assiégée, expédition à Venise
  • 1801-1803 : Participation à l'expédition de Saint-Domingue pour mater la révolution noire
  • [DONNÉES SUPPRIMÉES]
  • 1805-1806 : Campagne de Nouvelle-Hollande
  • 1806-1807 : Campagne des Antilles
  • 1807 : Tentatives de forcer le blocus britannique des ports français
  • 13 septembre 1807 : Sabordage

Addendum 343-FR-01 : Note du Dr Grenet

Le cas du Nicolas Flamel est un « classique » de l’anormal français. Son anomalie s'est en effet manifestée très rapidement après son naufrage, poussant la Singulière Académie Impériale à s'y intéresser. Tout au long du XIXe siècle, de nombreuses organisations anormales se sont frottées à la frégate qui réécrit constamment son histoire. Son épave a été un lieu de pèlerinage pour les nostalgiques de la Singulière Académie, une curiosité et un cas d'école pour la Fondation, car plutôt inoffensive — bien qu'agaçante pour les historiens.

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Le Nicolas Flamel dans le port du Havre en 1969

Cependant, en 19██, des historiens de la Fondation ont rapporté un phénomène pour le moins inattendu : des archives datant de 1837 — soit trente ans après son naufrage — sont apparues, mentionnant très distinctement le Nicolas Flamel, intact, à flot et son équipage entier. Une erreur, puis une anomalie ponctuelle furent d'abord invoquées pour expliquer cet événement. Mais contrairement aux archives relatant la vie du navire jusqu'à son naufrage, constamment réécrites, celle-ci ne disparut pas. La présence de la frégate en 1837 paraissait véritable. Puis, quelques années plus tard, à des intervalles variables, des archives similaires apparurent : 1843, 1847, 1860… Mais également, de manière toute aussi incompréhensible : 1781, 1724… Ces archives paradoxales ne mentionnaient d'ailleurs plus l'équipage, mais seulement la frégate comme un « tout ». Il est devenu apparent que l'anomalie, d'une certaine manière, s'étendait. L'équipe de recherche a d'abord pensé que seules les archives étaient affectées, que cette nouvelle anomalie créait des documents ex nihilo, dont les dates « s’écartaient » de plus en plus des années où le navire avait effectivement existé. Jusqu'à la photographie ci-contre3. Ce n'est pas simplement l'anomalie qui s'étendait, mais bien le Nicolas Flamel qui se mettait à exister avant sa construction et après son naufrage. Pourquoi, et selon quelles modalités, cela reste un mystère.

Addendum 343-FR-02 :

Addendum 343-FR-03 :

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