SCP-3241
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Le SS Sommerfeld (circa 1995).

Objet no : SCP-3241

Classe : Keter

Procédures de Confinement Spéciales : Le GECS1 doit mettre au point le développement d'une méthode de confinement efficace et sans risque pour SCP-3241. Tant qu'une telle stratégie n'existera pas, les procédures de confinement de SCP-3241 se concentreront sur la prévention de contact externe, l'atténuation de ses effets anormaux et son observation.

Le personnel doit coopérer avec la FMAD2 et d'autres forces navales et aéronautiques afin d'imposer une zone d'exclusion de 75 km autour de SCP-3241. Seuls les navires gérés par la Fondation sont autorisés à entrer dans la zone. Des drones de surveillance doivent être déployés hebdomadairement dans SCP-3241 afin d'observer son taux d'expansion. Dans le cas d'un changement, le Directeur de Confinement doit en être informé immédiatement.

L'utilisation d'ARS3 dans la zone d'exclusion de SCP-3241 est strictement interdite. En attendant l'achèvement de l'enquête sur les événements du 5 novembre 2015, aucun membre du personnel (Fondation ou autre) n'est autorisé à entrer dans SCP-3241 sans l’autorisation d’un O5.

Description : SCP-3241 est un volume avec une forme irrégulière (d'environ douze kilomètres de diamètre) centré autour du SS Sommerfeld (précédemment SS Chávez). Il présente de nombreuses anomalies spatiales, temporelles, moléculaires et biologiques. Bien que la nature et la sévérité de ses anomalies changent sans motif discernable, celles-ci ne s'étendent pas en dehors de SCP-3241. SCP-3241 est actuellement en train de s'agrandir à un rythme d'approximativement quatre mètres par jour.

Le SS Sommerfeld est un cargo construit en 1963 par la Sun Shipbuilding & Drydock Company. Il fut acheté, rénové et rebaptisé en 1995 par DSL4 dans le cadre d'un contrat sponsorisé par la Fondation afin de fournir un transport aux anomalies à faible risque et aux ontokinésistes anesthésiés5 du Site-97, désaffecté, vers le Site-82.

En 1998, le navire fut perdu avec son équipage, ses anomalies et les cinq ontokinésistes à bord. Une enquête menée par la Fondation en 1999 a imputé l'incident à une brèche de confinement durant le transit, suivie de l'échec du déploiement du système de sécurité d'urgence (constitué de six ARS reliées). En 2015, le SS Sommerfeld a été découvert dérivant à deux cents kilomètres à l'ouest de l'île d'Odo. Cela a conduit à la formation du GECS, afin d'appréhender l'apparition soudaine de SCP-3241 et de développer une procédure de confinement sûre et efficace pour celui-ci.

En 2018, une nouvelle preuve mit en lumière une possible malversation de la part de Daniel DeVorn et DSL. Une seconde enquête fut menée sur les événements de 1998 et 2015. À la suite de cette enquête, tous les contrats présents et futurs avec DSL furent suspendus. Daniel DeVorn est toujours en fuite et est désigné PdI-3241-347.

Addendum 3241.1 : La perte du SS Sommerfeld

Le 17 septembre 1998, le SS Sommerfeld partit de Jacksonville en Floride (États-Unis) à destination d’Itaguaí, Rio de Janeiro (Brésil). À 17:21 UTC, la garde côtière reçut un signal provenant de la RLS (Radiobalise de Localisation des Sinistres) du navire, le situant à proximité du centre de l'océan Atlantique (33.49°, -54.26°). À 18:06 UTC, la RLS diffusa un autre signal le situant dans les environs de la cordillère Sikhote-Aline (46.12°, 136.96°). À 18:55 UTC, les satellites du COSPAS-SARSAT reçurent une dernière transmission de la balise ; sa position ne pouvait plus être déterminée. Toutes les tentatives de communication qui suivirent échouèrent.

Les premiers efforts de sauvetage furent entravés par l'ouragan Georges, par l'impossibilité de déterminer la localisation du SS Sommerfeld et par les représentants de DSL soutenant à tort aux employés de la Fondation que le navire n'était pas perdu, mais plutôt retardé par les mauvaises conditions météorologiques. Daniel DeVorn défendit cette décision durant l'enquête de 1999 :

Sa balise d'urgence envoyait un signal, mais les coordonnées se situaient partout dans le monde. Elles ne faisaient aucun sens. Nous avions déjà eu des balises défectueuses auparavant — donc nous avons supposé qu'elle dysfonctionnait. Nous ne pouvions pas établir de contact radio afin de le confirmer, en raison de l'ouragan Georges. Mais après trois heures de silence, nous avons réalisé que quelque chose n'allait pas.
C'est à ce moment que j'ai passé le coup de fil. J'ai appelé Jack6 moi-même. Je lui ai dit qu'il y avait un problème, que le Sommerfeld avait disparu.

Une fois le SS Sommerfeld déclaré perdu, la Fondation mit immédiatement en place une opération conjointe de recherche et sauvetage avec l'aide du GECSNU (Groupe d'Évaluation et de Coordination en cas de Sinistre des Nations Unies), la CMO (Coalition Mondiale Occulte), la Garde côtière des États-Unis, l'armée de l'air, la garde nationale aérienne ainsi que la Navy. Les efforts de recherche furent concentrés sur la route prévue du navire et les deux coordonnées indiquées par sa balise d'urgence. Après six mois d'enquête intensive, aucune trace du SS Sommerfeld ne fut trouvée.

Addendum 3241.2 : Enquête initiale

Pendant l'enquête initiale en 1999, Daniel DeVorn répondit aux questions sur le possible lien entre la disparition du SS Sommerfeld et un possible défaut dans le système d'ARS d'urgence.

Écoutez, c'est — Écoutez, je ne veux pas être désobligeant, mais ça ne fait pas de sens. Ça ne fait aucun sens. Nos ARS ont un historique presque sans faille. Elles sont considérablement utilisées au sein de la Fondation. Elles sont, tous les jours, directement responsables de l'empêchement de catastrophes. Elles sauvent des vies chaque jour. Et nous développons en ce moment même des ARS plus efficaces et plus économiques.

Ce qui est arrivé au SS Sommerfeld est tragique, mais cela n'a rien à voir avec notre système de sécurité d'urgence. Ce qui est arrivé c'est que — Je ne veux pas blâmer votre personnel. Je suis sûr que leur réaction a été exemplaire. J'ai travaillé avec vous assez longtemps pour savoir que vous n'engagez que les meilleurs des meilleurs. Mais je voulais souligner que vous refusiez constamment d'affecter des techniciens de DSL pour fournir une assistance technique immédiate sur place. Vous ne nous avez pas permis de faire embarquer un de nos employés sur ce bateau. Vous êtes également connu pour — Vos procédures sont connues pour dévier du manuel des ARS. Le manuel existe pour une raison. Nous l'avons écrit pour une raison. Si vous le suivez, elles fonctionnent.

La vraie tragédie est que tout ceci aurait pu être évité. Si la Fondation avait bien voulu laisser venir un de nos techniciens de DSL sur le SS Sommerfeld, je suis certain qu'il aurait pu déployer les ARS correctement. Si la Fondation avait payé — avait pris le temps et laissé nos techniciens former vos employés, ou même avait juste lu notre manuel, je suis certain que nous ne serions pas en train d'avoir cette conversation.

Le Professeur Zora Tschetter (un para-physicien qui a quitté la Fondation pour travailler chez DSL en tant que consultant) corrobora les affirmations de Daniel DeVorn :

Je ne comprendrai jamais cette résistance envers les ARS. Jamais. Nous avons — nous avons ce merveilleux petit dispositif, ce merveilleux miracle qui peut réduire le plus féroce des plieurs de réalité en un chaton ronronnant. Auparavant, le seul goulot d'étranglement était leur coût de production prohibitif et les exigences en maintenance. Mais maintenant ? Elles ne sont pas chères, elles s'auto-corrigent et elles sont cent fois plus puissantes.

J'ai travaillé avec elles pendant des décennies. J'ai perdu le compte du nombre de fois où elles m'ont sauvé. Si je demandais un compte à main levée, ici dans cette salle — qui a été sauvé par une ARS —, je serais choqué si je voyais une main baissée. Je le serais vraiment.

Ce qui est arrivé au SS Sommerfeld est terrible. Toutes mes pensées vont aux victimes. Vraiment. Mais nos ARS sont testées encore et encore. Nous prenons tout en compte — tout sauf l’erreur humaine.

Une différence d'opinion de la part du Professeur Sherman Sivori, un para-physicien de la Fondation ayant pour réputation d'exprimer son scepticisme envers les ARS :

Bon, pour commencer, ils n'ont pas un historique presque "sans faille". Balivernes. Ils en ont une assez épineuse en fait — au mieux. La moitié du temps, on ne peut même pas dire si elles ont échoué. Car quand cela arrive, la réalité est réécrite.

Les ARS traitent le pliage de réalité comme un champ morphogénétique. Elles supposent que ces champs peuvent être "corrigés" — que vous pouvez "déplier" la réalité et revenir à un état "non-anormal". En bref, les ARS présument que les anomalies s'intègrent dans un système plus vaste. Un système que nous comprenons et contrôlons.

Mais qu'est-ce qui rend quelque chose anormal ? Par définition, c'est quelque chose qui ne s'intègre pas. Quelque chose que vous ne pouvez pas contrôler. Nous pensons que nous avons trouvé une manière de réprimer les distorsions de réalité, mais tout ce que nous avons vraiment trouvé, c'est un type de pliage de réalité suffisamment fort pour surpasser les autres.

Les ARS sont un tigre qu'on utilise pour dompter d'autres tigres. Nous pensons que nous l'avons domestiqué. Nous pensons que c'est notre animal de compagnie. Mais un tigre de compagnie reste un tigre. Vous pouvez le mettre en cage, l’entraîner, lui apprendre des tours mignons — mais c'est toujours un tigre. Il a toujours ses griffes. Il a toujours ses crocs. Et nous sommes entourés par eux.

Que Dieu nous aide s'ils redeviennent un jour sauvages.

Addendum 3241.3 : Perte et récupération de l'IRV Silent Spring

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IRV Silent Spring (circa 2004).

Le 12 août 2015, le contact avec l’IRV Silent Spring fut perdu. Le navire effectuait un relevé océanique au nom de l'industrie de la pêche de l'île d'Odo afin de déterminer les récents et dramatiques changements du comportement du Seriola quinqueradiata (sériole du Japon, ou buri). Les tentatives de localisation initiales échouèrent ; son transpondeur ne répondait pas ou bien était hors de sa portée de transmission effective.

Trois jours plus tard, l'aéroport international Kansai intercepta un signal de détresse provenant de la RLS de l'IRV Silent Spring. Après de nombreux échecs de tentatives visant à établir une communication, les autorités japonaises déployèrent l'ERRV Koyo Maru pour enquêter. Cette démarche fut abandonnée lorsqu'un capteur radiométrique embarqué (installé à la suite de la catastrophe de Fukushima Daiichi en 2012) détecta un niveau de radiation ionisante faible mais significatif en provenance du navire. Les autorités japonaises ont ensuite contacté la Fondation, qui mobilisa la FIM Thêta-5 ("Le Plus Gros Bateau") aux côtés de la FIM Bêta-7 ("Chapeliers Maz") afin de prendre en charge l'IRV Silent Spring.

Miguel Quiñones (l'Officier de Commandement de la FIM Bêta-7 en service à l'époque) décrivit son expérience avec le navire durant l'enquête de 2018 :

Donc, quand la FMAD nous a appelés, nous avons juste supposé que c'était un vieux Jenkins7 qui manigançait un mauvais coup. Cela arrive souvent. Des bureaucrates fraîchement promus paniquent ou essayent de nous faire porter le chapeau de leur catastrophe. Nous avons même eu quelque cas où quelqu’un essayait de faire passer quelque chose de parfaitement normal comme étant anormal. Une fois, j’aime même entendu un gars faire passer

— bien, désolé. Peu importe, nous étions assez sûrs que nous trouverions une baleine morte emmêlée avec une bouée flottante ou quelque chose du genre. Nous avons tout de même suivi la procédure. La complaisance est ce qui mène des gens à la mort. Vous l'apprenez dès le premier jour. Nous sommes arrivés avec le vent de dos pour minimiser notre exposition. C'était une bonne chose. L'odeur seule nous aurait tous mis à terre.

Ce n'était clairement pas une baleine. Mais ça ne ressemblait pas non plus à un bateau. Ça ressemblait à un amas de chair putréfiée. Un bloc de viande spongieux qui flotte.

Snoopy8 capta quelques interférences, mais pas beaucoup. Nous avions tout de même pris toutes les précautions et même quelques supplémentaires, juste au cas où. Nous n'avions aucune idée de la nature de ce qu'on regardait. Nous ne savions même pas qu’ils étaient, hum — des gens ? — Nous ne savions pas qu’il y avait, heu, quelqu'un à l'intérieur. Nous l’avons juste accroché et embarqué. En supposant que les blouses blanches régleraient tout ça.

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Pont de l'IRV Silent Spring peu après sa récupération.

L'IRV Silent Spring fut transporté à un site temporaire provincial pour évaluation et confinement. Les chercheurs ont rapidement découvert qu'il avait été précédemment occupé par une colonie de plus de trois cents espèces non-identifiées de micro-organismes. Malgré ce microbiome d'une incroyable complexité et son fonctionnement indépendant, un événement d'extinction de masse se produisit avant récupération.

L'extérieur du navire était recouvert d'une défunte colonie de microscopiques arthropodes. Des nodules de calcium carbonés creux furent extraits de la surface du navire en plusieurs endroits ; des examens échographiques et à l'endoscope ont déterminé qu'ils s'étendaient au travers de la coque en tant que partie d'un système respiratoire rudimentaire. De larges cavités de tissus élastiques pouvaient se gonfler et se contracter afin de réguler le flux d'air.

Après dissection, les chercheurs ont découvert que la topographie interne du navire était connectée par un réseau vasculaire complexe de tuyauterie fine et flexible responsable de la circulation des nutriments et l'éjection des effluents. Ses tubes s'étendent dans l'équipage de l'IRV Silent Spring. Chacun des systèmes nerveux de l'équipage était partiellement extrait et fusionné en une masse neurale incorporée dans le système vasculaire, qui fournissait le glucose et l'oxygène aux tissus cérébraux. Le but ou la fonction de ce conglomérat de tissus nerveux ne put être déterminé.

Le module contenant la RLS et la boîte noire de l'IRV Silent Spring fut retrouvé intact ; le microbiome n'a pas pu pénétrer sa coque extérieure. Cependant, l'exposition aux radiations ionisantes corrompit la mémoire interne des appareils, la rendant irrécupérable.

En retraçant la route de l'IRV Silent Spring, le SCPF Stravinsky (sous-marin de la Fondation) rencontra un cargo dérivant à deux cents kilomètres à l'ouest de l'île d'Odo. Le navire n'avait pas de SIA (Système d'Identification Automatique), ne répondait pas aux appels et émettait des niveaux de radiation ionisante significatif. Le SCPF Stravinsky lança un drone de surveillance Panopticon en direction du navire. Peu avant une défaillance mécanique inexpliquée, l’imagerie digitale du drone confirma que les marquages du navire étaient ceux du SS Sommerfeld.

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SCP-3241 (circa 2015). Photo prise depuis le drone de surveillance avant sa défaillance mécanique.

Addendum 3241.4 : Réponse initiale

Le 26 octobre, le GECS fut assemblé afin d'estimer l'étendue de la menace que posait le SS Sommerfeld ainsi que de développer une méthode de confinement efficace pour celui-ci. Bryan Browning, un agent de terrain vétéran de la Fondation et ancien directeur du Site-97, fut nommé directeur du confinement.

Une observation rapprochée du SS Sommerfeld était totalement impossible en raison de ses propriétés imprévisibles ; les drones de surveillance envoyés dans sa zone d'effet expérimentaient de nombreux dysfonctionnement mécaniques. Afin d'obtenir davantage de données, le directeur Browning réquisitionna plusieurs ARS de DSL et donna l'ordre de les installer sur le SCPF Stravinsky. Le sous-marin devait approcher SCP-3241 sous la couverture d'un champ morphogénétique afin d'essayer d'obtenir sa boîte noire.

De nombreux membres de l'équipage du SCPF Stravinsky refusèrent de suivre les ordres du directeur Browning. Ce groupe comprenait l'officier exécutif du sous-marin, Leslie Horton. Elle expliqua sa décision en 2018 :

Browning nous décrivait comme une bande de traîtres tentant un putsch, mais quiconque avec une once d'expérience militaire vous dira qu'il y a une différence entre "ouvrez le feu" et "avancez jusqu'à l'ennemi et chatouillez son nez pendant que cette boîte magique vous protège". De plus, ce n'était pas une opération militaire. Il n'y avait pas de danger immédiat. Nous avions tous nos droits d’arrêter de travailler pour des raisons de sécurité. Et c'est exactement ce que nous avons fait.

Le professeur Bakshi était la raison du pourquoi. Bakshi avait de l'expérience avec les ARS — de la vraie expérience — et il ne leur faisait pas confiance. Il expliqua à Browning que son plan nous mettrait en danger. Quand Browning lui a dit d'aller se faire voir, Bakshi vint à nous directement. Il nous expliqua que ces trucs — les ARS — étaient peu fiables. Que c'était comme vouloir éteindre du feu avec un lance-flammes. Des fois, ça marche, et des fois, vous brûlez tout le foutu quartier. Ça m'a convaincu, moi en tout cas.

Browning était furieux. Il continua de fulminer sur le fait que Bakshi ne connaissait rien du travail sur le terrain ou de la para-tech. Il disait que si Bakshi n'avait pas les tripes pour ce genre de choses, il devrait hum — je crois que ses mots étaient "aller postuler pour un travail de management dans un 7-11". Ensuite, il a continué avec d'autres choses, hum, des choses que, hum, que je ne répéterai pas ici.

Mais en fin de compte, Bakshi ne voulait pas céder. Et nous non plus.

Un compromis fut trouvé le 5 novembre. Une ARS serait installée sur un VSP (Véhicules de Surface sans Pilote) capable de soutenir son poids et de le fournir en énergie. Un représentant de DSL arriva en tant que consultant ainsi que pour apporter un support technique.

Brièvement après son entrée dans la zone d'effet de SCP-3241, le VSP arrêta de répondre aux commandes à distance. Le navire agit de manière autonome pendant deux kilomètres avant de subir un dysfonctionnement mécanique catastrophique et coula avec l'ARS. Comme il était allé bien plus loin que les drones précédents, le représentant de DSL clama que l'ARS fonctionnait ; de plus, il affirma que le contrôle du drone avait probablement été perdu en raison du champ morphogénétique de l'ARS qui n'était pas assez grand pour éviter les disruptions anormales des transmissions radio reçues. Il conclut qu'un réseau d'ARS superposées — combiné avec des ajustements manuels réalisés par un opérateur ARS agréé — serait plus que suffisant pour surpasser tout effet anormal de SCP-3241.

Le directeur Browning était en accord avec ce bilan. Il ordonna de nouveau à l'équipage du SCPF Stravinsky d'installer des ARS dans son sous-marin et d'entrer dans la zone d'effet — avec le Professeur Bakshi (le seul opérateur ARS agréé présent à ce moment) sur place afin de réaliser les ajustements requis. Encore une fois, plusieurs membres de l'équipage du SCPF Stravinsky refusèrent.

Browning ordonna alors que trois des cinq ARS restantes soient installées sur le SCPF Beagle 3 (un petit patrouilleur de quatre places) et composa une équipe pour l'accompagner dans la zone d'effet de SCP-3241. Lorsque le Professeur Bakshi refusa d'accompagner le directeur Browning, il demanda au représentant de DSL de remplir le rôle du Professeur.

En 2018, le Professeur Gambheer Bakshi apporta le témoignage suivant concernant la demande au représentant de DSL :

Raymond Asakawa. Le technicien de DSL — c'était son nom. Il était jeune. Très jeune. Très brillant aussi. J'ai découvert plus tard qu'il étudiait pour devenir informaticien. Il travaillait juste pour payer ses études.

Je ne pense pas qu'il… non. Je sais qu'il ne voulait induire en erreur personne. Il faisait confiance en son apprentissage. Il faisait confiance au Manuel des ARS. Toutes ses réponses aux questions du directeur Browning venaient directement de ce manuel. Il devait les avoir apprises par cœur. Le directeur a tout gobé. Il tapota le dos du jeune homme, lui demanda tout à propos des niveaux d'Hume, des compteurs Kant — des questions auxquelles il savait que M. Asakawa pouvait répondre. Ce qui fit grandir sa confiance en lui. L'a fait se sentir comme un expert, comme — comme faisant partie de l'équipe.

Ensuite, quand le directeur Browning me demanda de l'accompagner — il savait que je dirai non. Il le savait. Il se tourna vers M. Asakawa, et c'est à ce moment que j'ai compris ce qu'il se passait. De pourquoi il traitait ce jeune homme si gentiment. Il se jouait de lui. Il se tourna vers Asakawa et il lui dit — il lui demanda s'il pouvait — il —

— il lui demanda — lui demanda de —

— de —

Merde.

Merde. Désolé. Je suis désolé. généralement je — un instant. Juste, hum, donnez-moi quelques minutes. Cela fait longtemps que je n'en ai pas parlé — merde. Je suis désolé.

D'accord.

C'est bon. Ok. Je me sens mieux. Désolé. Désolé pour les jurons.

Il avait l'air si effrayé juste à cet instant. Je veux dire, M. Asakawa. Je pense qu'il commençait à réaliser qu'il y avait un danger bien réel, juste là. Mais juste après Browning a dit quelque chose — je me rappelle même plus quoi. Quelque chose à propos de l'ancien temps, qu'il n'avait pas d'ARS. Comment ils auraient pu sauver de nombreuses vies à l'époque. À quel point le travail d'Asakawa était important. Quelque chose du genre. Alors Asakawa sourit et —

— il me regardait juste avant. Quand il était effrayé. Il regardait droit vers moi. Moi. Comme s'il s'attendait à ce que je le sauve. Et — J'aurais pu. J'aurais pu le sauver. J'aurais pu dire non. J'aurais pu refuser catégoriquement. J'aurais pu tirer ce petit hors du bateau et dire à ce gros raciste d'aller se faire foutre.

Mais je ne l’ai pas fait.

J'étais tellement en colère contre lui. Browning mettait sa fierté avant toutes nos vies. Je voulais qu'il soit puni. Il méritait d'être puni. Et c'est pourquoi Raymond Asakawa est mort. Il m'a demandé de le sauver et je ne l'ai pas fait. Car j'étais en colère.

Je n'ai aucun remords pour la mort de Browning. Je l'emmerde. Il méritait pire. Mais je suis désolé pour Raymond Asakawa. Pas un seul jour ne passe sans que je ne sois désolé pour Raymond Asakawa. J'ai laissé ça arriver. J'ai laissé ce jeune homme mourir. Cela aurait dû être moi sur ce navire. Je suis désolé.

Putain. Je suis désolé. Dieu que je suis désolé.

Le directeur Browning embarqua sur le SCPF Beagle 3 avec son équipe et approcha SCP-3241. Des quatre membres, seul Jackson Voccola, un spécialiste du confinement vétéran, survécut :

Nous devions être à un demi-kilomètre à l'intérieur de la zone quand j'ai commencé à remarquer que quelque chose n'allait pas. C'était ce grondement sourd derrière moi — comme si quelque chose n'allait pas avec les moteurs. J'ai commencé à penser à ce que je ferai s'ils tombaient en rade. Nager n'était pas une option. Puis je me suis rappelé du câble de remorquage — Ils pouvaient nous ramener. Ça m'a détendu un peu.

Mais ce son devenait de plus en plus fort. Quelque chose sonnait faux dans celui-ci. Trop strident. Pas suffisamment mécanique. Je me suis enfin retourné et, hum, oui. Ce n'était pas les moteurs. C'était le gamin. Celui que DSL nous avait envoyé.

Il criait depuis un moment. Ce n'était pas compliqué de voir pourquoi. Ce qui me surprit c'est qu'il pouvait crier. D'importantes parties de lui étaient devenues du verre. On pouvait voir au travers de lui — comme si quelqu'un avait installé des fenêtres sur tout son corps. Il y avait cette toile de veines qui se faufilait dans ses tripes — comme des rubans de soie rose.

Quand il bougeait, ça provoquait un bruit horrible. Des craquements et des éclatements. Comme si quelqu'un piétinait un sac d'ampoules. Le verre commença à se fracturer — des lignes irrégulières l'ont traversé et ont transpercé ses entrailles. Du sang coulait de ses fractures puis dégoulina sur lui. Très lentement.

Sanchez s'était inversé. Ça n'avait pas l'air de le déranger. Je crois même qu'il m'a fait un clin d'œil. Et Browning, euh — je ne suis pas certain, mais on aurait dit que ses os s'évaporaient. Son corps s'effondrait comme un tas de tissus, de la peau pliée. Comme une pile de linge sale. De la fumée jaune fétide n'arrêtait pas de sortir de ses orifices.

Je pense que les moteurs ont croassé à un moment. La dernière chose dont je me souvienne, c'était qu'ils nous ramenaient aussi vite qu'ils pouvaient. C'est à ce moment que j'ai perdu connaissance à cause de la douleur. Quand je me suis réveillé quelques semaines plus tard, ils m'ont dit que Sanchez et Browning étaient morts au combat. Le gamin a pris à peu près vingt minutes avant de finalement éclater et se vider de son sang. Quant à moi… j'ai été plutôt chanceux. J'ai juste perdu trois membres et la moitié de mon système intestinal.

Bon. Browning était un fils de pute, je vous l'accorde. Lui et moi avions rejoint la Fondation au bon vieux temps. Nous faisions les choses différemment — et quand les choses ont commencé à changer, il n’a pas su changer avec. Il était mon ami, oui. C'était aussi une sacrée merde. Je le sais. Je l'ai toujours su.

Mais malgré tous ses défauts, il n'est pas la raison de pourquoi je bois mes plats avec un tube et les chie dans un sac. Je ne blâme pas le gamin non plus — il ne serait pas venu avec nous s'il n'avait pas avalé ces conneries sur les ARS comme nous tous. Je suis putain de sûr que je ne blâme pas Gambheer Bakshi. Autant que je le connais, cet homme est un saint.

Mais Daniel DeVorn ? Je le jure devant Dieu. Si mes yeux venait à se poser sur cet homme, je ramperais hors de ma chaise roulante et lui arracherais la gorge avec mes dents.

Ça n'a rien fait du tout. Vous m'entendez. Rien du tout. Et même, je dirai que cela a empiré : aucun de nos drones ne s'inversait. Aucun ne s'évaporait en fumée. Aucun ne se transformait en putain de verre. Non, ils arrêtaient juste de fonctionner. C'est parce qu'on a commencé à utiliser leur foutu produit pour confiner ce bateau de merde que j'ai fini dans cette foutue chaise.

Peu importe où tu es, M. DeVorn, tu devrais t'agenouiller et remercier Dieu Tout-puissant que la Fondation ait changé. Parce qu'à mon époque ? Cette histoire ne se serait pas terminé avec une sorte — une sorte de putain d'"enquête".

Ça se serait terminé avec toi dans un uniforme orange, jeté dans le plus profond, le plus sombre des trous que nous aurions pu trouver. Ça se serait terminé avec nous en train de rigoler en se sifflant des bières fraiches et en faisant des paris sur le temps qu'il faudrait pour que tous nos monstres soient fatigués de tes cris.

Addendum 3241.5 : Courriels récupérés

Le 3 janvier 2018, une source anonyme fournit à la Fondation plusieurs téraoctets de données provenant de l'intranet de DSL. Elles comprenaient de nombreux échanges de courriels entre Daniel DeVorn et son personnel vis-à-vis de l'installation du système ARS d'urgence sur le SS Sommerfeld :

DATE : 16/04/1995
OBJET : Re : Système ARS d'urgence
DE : <simon.tchlekoz@███████>
À : <daniel.devorn@███████>


Vous pouvez argumenter que corrélation n'implique pas causalité jusqu'à en perdre la voix, Dan. Mais la corrélation est 1:1 tout du long — sur plus de dix ans. Et même si ça ne corrèle pas, cela ne change pas le fait que chaque ancre — y compris celles en service depuis des décennies — éprouvent des défaillances de plus en plus régulières.

Chaque nouvelle ARS que nous mettons en service augmente le risque qu'une autre ARS défaille. Actuellement, nous compensons l'augmentation des taux d'échec avec un système de correction automatisé. Quand un des appareils cesse de fonctionner correctement, deux autres ajustent leurs champs morphogénétiques et répriment l'appareil défectueux avant que celui-ci n'entre dans un état critique. Nous organisons des "maintenances préventives" mensuelles afin de contrôler les appareils et les échanger discrètement avec ceux qui ne transformeront pas votre peau en acide ou quoi que soit d'autre.

Mais voilà : il faut au moins deux appareils "sains" afin d'empêcher un appareil d'entrer dans un état critique. C'est pourquoi un système d'urgence avec seulement quatre ARS ne sera pas suffisant. Cette configuration aurait marché il y a vingt ans, bien sûr — quand la défaillance d'un appareil était rare. Mais maintenant ? Il est commun que plusieurs appareils d'un même ensemble dysfonctionnent. Et si deux des quatre ont une panne ? Les deux autres ne seront pas capables de les retenir. Elles entreront dans un état critique.

Avez-vous déjà vu une Ancre de Réalité de Scranton entrer dans un état critique ? Moi oui. Des mots comme "biblique" viennent à l'esprit.

Si vous voulez que ce navire soit sécurisé, vous aurez besoin de dix-huit — au moins quinze — appareils. Cela les gardera hors de la zone de danger. Cela rendra les chances d'un événement critique quasiment nulles. Installez juste un appareil de moins, et vous mettrez tout le monde à bord en danger.

À la suite de l'examen de ces courriels, les enquêteurs de la Fondation en ont conclu que la perte du SS Sommerfeld s'est probablement produite en raison de la défaillance critique de ses six ARS embarquées. De plus, les enquêteurs ont poursuivi en liant plus de vingt autres brèches de confinement à des dysfonctionnements critiques d'ARS similaires. Cela a mené à l'enquête de 2018 sur la perte du SS Sommerfeld et la dépendance continue de la Fondation à l'égard des ARS pour le confinement des ontokinésistes.

Deux semaines avant le début de l'enquête, Daniel DeVorn a échappé à la détention de la Fondation. Des efforts pour le localiser sont en cours.


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