Ramener la magie

Vendredi 15 août

Aujourd'hui, j'ai lu le rapport de SCP-699-FR, qui n'est autre que le Père Noël (il faut croire que toute légende a sa part de réalité, que l'on peut finir par croiser quand on fait partie de la Fondation SCP).

Ce Père Noël s'incarne de temps à autres dans un individu et ses pouvoirs sont reliés à un arbre, un sapin géant, situé quelque part dans l'Arctique. Seulement voilà, lorsque j'avais consulté le rapport, l'arbre avait été brûlé lors d'un accident il y a des années, et le Père Noël avait perdu ses pouvoirs.

Si je me rendais sur les lieux, peut-être pourrais-je trouver un moyen de faire repousser les restes de cet arbre ? La Laponie était loin, et on ne m'avait jamais donné la permission de ne serait-ce que remonter à la surface au cours des années que j'avais passées ici.

Peut-être que provoquer une brèche de confinement pourrait me permettre de m'échapper dans la confusion ambiante. Ou bien un objet SCP qui m'aiderait à sortir de là ?

Je réfléchissais à ces plans depuis quelques semaines sans trouver de réponse satisfaisante quand mon collègue à la peau chatoyante est venu me trouver dans ma chambre un soir. Je savais déjà que la grogne montait dans le personnel anormal suite à un accident, et il m'a appris qu'une rébellion allait bientôt avoir lieu. Il me faisait confiance pour que je n'en parle à personne et espérait compter sur mon soutien pour la mettre en oeuvre. Devant sa sincérité, je lui ai parlé d'une partie de mes plans, mais en omettant la découverte des rapports, prétextant plutôt que je n'en pouvais plus d'être enfermé ici et que je me tenais simplement à carreau pour faire autre chose que tourner en rond comme un lion en cage. Nous avons réussi à nous mettre d'accord le lendemain : j'allais les aider à exécuter leurs plans et ils me faciliteraient la vie pour sortir du site. La Fondation n'allait certainement pas s'embêter à chercher un pauvre archiviste quand un de leurs sites majeurs venait de les lâcher.

Mardi 26 août

L'insurrection a eu lieu aujourd'hui.

J'ai aidé mon collègue au Département Administratif à mettre hors d'état les machines qui assuraient la communication automatique de données avec l'extérieur, empêchant ainsi les autres sites de la Fondation de connaître l'état détaillé des infrastructures du site. Quelques heures plus tard, muni de faux papiers, j'entrais dans l'aéroport de Lyon avec un billet pour la Finlande et mon ciré jaune chéri. J'avais fait mes adieux à un site en proie aux flammes et au chaos.

Ce n'est qu'après cela que j'ai appris qu'ils prévoyaient d'éliminer tout le personnel non anormal qui n'avait pas accepté de collaborer avec eux. J'aurais certainement eu plus de scrupules à les aider sans cela, malgré l'importance capitale de mon plan.

Jeudi 28 août

Moi qui n'avais pas voyagé pendant si longtemps, voilà que je me retrouve à me les peler en Laponie. Les climats froids n'ont jamais été mon fort.

Après deux jours de voyage par les petites routes finlandaises, j'ai fini par atteindre les abords de SCP-699-FR. J'ai passé les restes de la clotûre qui entourait l'arboretum et ai cherché le lieu où se trouvait les restes de l'arbre en me basant sur mes souvenirs de la photo du rapport. Ce n'était pas bien difficile. Au lieu de la souche calcinée à laquelle je m'attendais se trouvait le plus grand sapin de l'enclos. Je ne comprenais pas comment il avait repoussé autant en aussi peu de temps et je me suis avancé pour toucher le tronc quand j'ai entendu un crissement dans la neige derrière moi.

Quelle n'a pas été ma surprise de trouver quelqu'un ici. Un vieil homme à la barbe blanche, lourdement charpenté, portant lui aussi un sac de voyage. Il m'a souri faiblement et a levé les mains en signe de paix. J'ai levé les mains également et tenté de lui parler dans les langues que je connaissais, mais il a simplement secoué la tête et m'a fait signe de m'éloigner de l'arbre en m'implorant du regard. Je me suis exécuté en me demandant ce qu'il pouvait bien faire là.

Il s'est approché du sapin et a touché le tronc en fermant les yeux. L'air s'est mis à vibrer et un grand vent s'est levé, faisant tomber la neige des arbres aux alentours. J'ai levé les bras pour me protéger le visage. Une lumière rouge a commencé à émaner de l'arbre et à envelopper le vieil homme tandis qu'un son grave rythmique qui faisait penser à un rire a résonné autour de nous.

Après une vingtaine de secondes, le phénomène a diminué en intensité. Baissant les bras, j'ai aperçu une silhouette vêtue de rouge en lieu et place du vieil homme.

J'ai alors compris qu'il s'agissait du Père Noël qui venait de retrouver ses capacités. Ce dernier m'a interpellé dans un français parfait. Je ne m'en suis pas formalisé : comment le Père Noël pourrait-il lire les lettres des enfants du monde entier s'il ne savait pas parler toutes les langues ?

Nous avons discuté ensemble. Lui était polonais d'origine et s'appelait Nikola Zima. Bien qu'il ait été surpris par mon arrivée et le fait que j'en sache autant sur lui, il a très vite été d'accord avec mes plans. Les souvenirs des Pères Noël lui montraient qu'il y avait bien longtemps que le précédent Père Noël n'était plus, et il fallait faire quelque chose pour remédier à cette situation. Il m'a guidé jusqu'à une petite maisonnette qui semblait un peu incongrue dans la forêt arctique. De toute évidence, la porte menait à l'usine des jouets du Père Noël.

Nous sommes descendus dans la structure sous la maisonnette. La lumière s'est allumée en clignotant avant de se stabiliser quand nous sommes entrés dans une des grandes salles. A perte de vue, des tables basses munies d'outils et de tabourets. Sur chacun des tabourets, une petite forme humanoïde se tenait, affalée contre la table. Je me suis approché de l'une d'elles : les pantins en bois du père Noël. Celui-ci avait un bonnet rouge rayé de vert et une barbe taillée en bois. J'ai posé ma main sur son épaule, sans réaction de sa part. En relevant la main, j'ai senti la poussière qui le recouvrait voler, me faisant tousser.

Je me suis approché du bureau au fond de la pièce. Sur un porte-manteau à côté se trouvait un bonnet à pompon rouge et blanc, que Nikola m'a fait signe d'enfiler. Je me suis exécuté et me suis retourné en entendant un bruissement.

Les pantins se réanimaient tous petit à petit. Le bruit de leurs articulations raidies et de leurs petites voix aigües emplissait la pièce. L'un d'eux qui semblait un peu plus grand et avec un bonnet plus coloré s'est approché de moi en trottinant et m'a fait un signe joyeux de la main, m'accueillant dans l'atelier comme directeur. Porter ce bonnet me permettait de contrôler toute la production, et les pantins étaient heureux de retourner à l'ouvrage après tant d'années passées à prendre la poussière. J'ai rendu son salut au pantin-contremaître et lui ai demandé de me faire visiter l'atelier afin que je sache à quoi m'attendre.

Pendant que nous faisions la visite, les pantins se sont massés autour du Père Noël, comme des enfants retrouvant leur parent depuis longtemps perdu. Souriant, il les appelait chacun par leur nom.

Mes plans que je ne pensais pas voir se concrétiser si vite étaient un peu chamboulés, mais voici ce que nous allons faire (pas forcément dans cet ordre) :

  • remettre en route la production de jouets pour Noël pour redonner à cette fête sa magie
  • chercher des matériaux anormaux ou des façons de créer des jouets anormaux
  • répandre ces jouets partout dans le monde
  • provoquer d'autres phénomènes anormaux pour briser le Voile
  • trouver des alliés parmi la communauté des personnes anormales

Pour le deuxième point, j'ai quelques idées, comme faire une bouture de bois anormal dans un rameau de SCP-612-FR (un arbre qui produit des jouets au lieu de fruits). Quant à savoir comment récupérer tout cela, je ne sais pas encore.

La tâche sera ardue, mais tant que la Fondation ne nous retrouve pas, nous pouvons nous en sortir. Avec la faculté de téléportation de Nikola, tant qu'une porte est à proximité nous ne craignons rien.

Samedi 30 août

J'ai pu envoyer un courrier à B* pour l'informer de ce qui s'est passé durant ces longues années. J'espère qu'elle est toujours en vie, et qu'elle n'a pas perdu espoir que nous nous revoyions un jour. Mais pour le moment, ma tâche prend le pas sur cela.

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