Pour mendier la lumière

Rapport (v.1) :

TM-345
Fiabilité moyenne

[SCP-675-FR; Shakespeare]

Les amants des prostituées
Sont heureux, dispos et repus ;
Quant à moi, mes bras sont rompus
Pour avoir étreint des nuées.

J'aurais dû faire Caurès.

On aurait tous dû faire Caurès. Mais on doit mendier notre lumière aussi, nous autres. C'est la vie.

Le document suivant est la retranscription d'un graffiti découvert le long de la ligne de métro 0. Chaque strophe se trouvait placée au niveau d'une de ses stations. Le poème en lui-même ne présente aucune caractéristique anormal, mais les références et le placement du poème laissent sous-entendre un lien avec SCP-675-FR.

Strophe 1 :

Les marins quittent le port
sans penser à la mort ;
ceux d'entre nous qui vivent
trouvent la mort invasive.
Mais nos lèvres scellées
ont déjà trop saigné.
Même si elles peuvent souffler,
elles ne seront écoutées.
Les moribonds ont tort
à la Porte Molitor.

Strophe 2 :

Nos yeux sont éveillés
mais nos âmes démantelées.
Chaque pas qui nous détruit
illumine vos nuits :
car ma semelle usée
par mes efforts passés
foule dans la poussière
mes espoirs découverts.
Nos larmes sont encore éparses
à station Champs de Mars.

Strophe 3 :

Je commence à pleurer
passé les rails creusés.
Ma peur ne fait qu'enfler,
je frappe le pavé
je griffe mes veines
je manque d'oxygène
la douleur qui me forge
me déchire la gorge.
Si j'étais armé de vouge
en arrivant Croix-Rouge…

Strophe 4 :

Mais la vague se tarit,
j'emmerde la barbarie.
Si je ne peux crever,
à quoi bon penser ?
Je reste demeuré,
les yeux soudain vidés.
Juste une bête identique
dans la rame fatidique.
Qu'est-ce que je me sens sale
à partir d'Arsenal.

Strophe 5 :

Je serai la tour Eiffel,
l'ampoule universelle,
la flamme peu farouche,
la chose que l'on touche,
la poupée shakespearienne,
la tapin parisienne,
la pute du quartier,
la salope engrossée,
le soleil avorté, enfin,
de la cour Saint-Martin.

Strophe 6 :

On arrive à Haxo
que la foule prend d'assaut.
Je marche parmi les miens,
qui seront tous éteints.
Je rêve d'obscurité
et d'insalubrité :
dormir sur un carton
battu par un maton,
tout, tout serait mieux
que de quitter ma banlieue.

Si je pouvais seulement, encore hier
mendier un tout petit peu de lumière.

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