La journée était calme dans l'Hôtel des Gentilhommes Humanistes de Chambéry, peu d'anormalités s'étaient déclarées durant ce mois, ce qui avait tendance à rendre les journées longues.
Dans la section des "Surfemmes aux aventures haletantes", Mesdames Camille Nambour et Juliette-Théosophine de Nourry rédigeaient leur allocution pour la prochaine Assemblée Humaniste. Studieuses, pas un bruit ne s'échappait de la pièce aux enluminures, dont la fenêtre donnait sur le merveilleux jardin privatif de la demeure. Soudain, un bruit sec sur le bois de la porte brisa le silence monastique. Quelqu'un avait frappé à la porte. Camille, irritée, posa son stylo-plume sur sa feuille :
"Entrez"
La porte s'ouvrit aussi délicatement que maladroitement avec un grincement à se briser les dents, avant qu'une frêle silhouette ne se glisse timidement à travers l'ouverture. C'était le coursier de la Maison, celui qui distribuait les lettres reçues à l'adresse de l'Hôtel.
"Une lettre pour la section Surfemmes aux aventures haletantes… m-madame…
— Posez-la ici."
Le jeune coursier s’exécuta et disparu aussitôt sous un monceau de plates excuses, que Camille et Juliette-Théosophine ignorèrent royalement, comme le ferait tout bon Gentilhomme aux jeunes recrues.
Définitivement déconcentrée dans sa tâche, Juliette-Théosophine se leva dans un soupir pour examiner la teneur de la fameuse lettre. À la lecture de la destinataire, elle trembla par réflexe et se tourna vers Camille, alors inquiète :
" Mais qu'y-a-t-il Juliette ?
— Cette lettre n'est pas pour nous… elle est pour Henriette.
— Ho non. "
Pauvre Henriette de Parmentier.
Les yeux de Camille se mouillèrent lorsqu'elle entendit le prénom de son ancienne amie. Henriette nous avait quitté par chagrin d'amour, cette dernière n'ayant jamais reçu de réponse à une lettre qu'elle avait envoyé un jour de Saint Valentin à un mystérieux amant. La lettre s'était donc perdue. Camille enreagea :
"Maudite soit la poste."
Juliette-Théosophine, après avoir essuyée ses yeux embrumées par les larmes, se décida à ouvrir la lettre perdue. Camille se leva aussitôt pour lire le contenu derrière son épaule.
Camille esquissa une moue déçue, elle avait connue des procès verbaux plus romantiques que cette lettre d'amour.
"Et dire que Henriette a quitté les gentilshommes pour rejoindre Caldeira, tout cela parce qu'un gendastre assez protocolaire ne lui a pas répondu 1 semaine après la Saint-Valentin, quelle tristesse.
— Je suggère de nous débarrasser de cette lettre qui ne fait que ré-ouvrir une plaie encore récente."
Juliette-Théosophine tendit le bout de papier à Camille qui compris ce qu'elle attendait. Elle prit la lettre et la mis dans la déchiqueteuse qui fit son office. Néanmoins, du fait de l'avoir inséré par le bord long, de longues bandes de feuilles sortirent de la machine, révélant ainsi le message caché du gendastre zélé reposant maintenant dans la corbeille à papier :