Prologue : Le document que vous lisez actuellement traite des différentes itérations du Legs 701, du moins de celles dont les Archives Noires ont pu garder la trace et confirmer l'existence.
Il est fort probable que pour vous le Legs 701 ait toujours désigné Sous le Monde, un ouvrage aujourd'hui enfermé dans un casier de haute sécurité au sein des Archives Noires. Préjugé légitime, étant donné qu'il s'agit de la seule itération conservée — de la seule itération que nous voulons conserver — du Legs 701. La vérité, néanmoins, est plus malheureuse.
Le fait est que la désignation du "Legs 701" n'est pas arrêtée — c'est une étiquette que nous ne savons pas à quoi fixer.
Le Legs 701 désigne une série de productions culturelles apparues spontanément durant l'époque moderne et cherchant à toucher un public le plus large possible. Sa forme change, tout comme son support. Littéraire. Sonore. Cinématographique. Mais son exécrable contenu, lui, l'offre odieuse qu'il propose à l'esprit humain, n'est qu'une variation autour des mêmes images, des mêmes voix, des mêmes perditions qu'il décline à chacune de ses apparitions.
Ce document tait volontairement la nature de ce contenu. Seules sont compilées ici les désastreuses conséquences que l'éternel retour du Legs 701 laisse dans son sillage. Peut-être s'agit-il d'un phénomène naturel spontané, auquel cas le Legs 701 désignerait l'ensemble de ces manifestations. Peut-être que toutes ces créations ont un instigateur commun, qui souffle à l'oreille des poètes et guide le pinceau des peintres, les poussant au pire, auquel cas le Legs 701 devrait sans doute désigner cette sinistre muse. Peut-être enfin, hypothèse la moins souhaitable, s'agit-il d'une fenêtre récurrente ouvrant sur des horizons que l'Homme ne peut affronter, auquel ce label leur reviendrait.
Cette notice est éditée dans l'espoir qu'un jour, peut-être, nous en ayons le cœur net.
– Pr F. Rollin, Archives Noires
Sous le Monde (1868)
Support : Livre court (~80 pages). Genre inconnu. Certaines sources témoignent d'une pièce de théâtre, d'autres d'un manifeste. 52 exemplaires retrouvés, confisqués et détruits. Un exemplaire conservé.
Auteur : Inconnu.
Première forme attestée du Legs 701, diffusée sous la forme de livres à compte d'auteur (sans auteur ni imprimeur attribué). Sous le Monde a circulé de mains en mains durant les années 1866-1868 dans les cercles érudits et artistiques français, mais aussi dans les grandes capitales européennes. Initialement recherché pour la rareté de ses exemplaires et la réputation sulfureuse de son contenu "apocalyptique", Sous le Monde scinda son lectorat en deux parties.
La première, majoritaire, a ressenti un sentiment de malaise grandissant au cours du premier tiers du livre et a finalement renoncé à sa lecture suite à un sentiment violent de révulsion vers la fin de la première moitié du texte. Ces personnes ne semblent pas avoir eu de séquelles particulières, outre un refus généralisé de parler de leur lecture et une aversion envers toute mention, directe ou indirecte, de Sous le Monde.
La seconde, essentiellement composée de personnalités à forte sensibilité artistique, semble avoir été prise d'un emballement extatique en attaquant la seconde moitié du livre. La fin de la lecture semble se solder par une forme de "Syndrome de Stendhal", souvent accompagné d'une frénésie artistique.
Les "œuvres" produites par les lecteurs de Sous le Monde se sont toujours avérées très éloignées de leurs créations initiales, et ont généralement été décrites comme illisibles, inaudibles et perturbantes, parfois produites à l'aide de techniques morbides. Toutes les personnes ayant lu Sous le Monde dans son intégralité ont témoigné d'une dégradation de leur état mental sur un durée pouvant aller de quelques jours à plusieurs années, dont les symptômes les plus communs sont la schizophrénie, la paranoïa et certaines pulsions autodestructrices.
The War of the World (1938)
Support : Dramatique radiophonique. Enregistrement de l'UBS détruit lors de l'incendie de la station. Nombre de copies privées inconnu.
Auteur : George Orson Spelvin, présentateur de la station radiophonique américaine UBS. Mort de cause naturelle en 1985.
Le cas le plus connu, et l'exposition de plus grande échelle à ce jour. The War of the World (ou, en fonction des témoins, The War of the Worlds, The War under the World ou The War against the World) est une dramatique sonore ayant été diffusée sans autorisation le soir du 30 octobre 1938 sur l'Union Broadcasting System (UBS), une filiale de Kane Medias diffusant à travers tout les États-Unis.
Le contenu de The War of the World fut à l'origine d'une hystérie collective généralisée, provoquant une dizaine d'émeutes à travers les grandes villes américaines et pas moins de 64 suicides parmi ses auditeurs, sans compter une centaine de victimes indirectes d'auditeurs pris de folie. Des rixes éclatèrent au sein même de la station UBS entre l'équipe de Spelvin et le personnel tentant d'interrompre la diffusion. Le studio pris feu peu avant la fin de l'émission, que Spelvin acheva tout de même au milieu des flammes, avant de perdre conscience et d'être évacué.
Le jour suivant les faits, les auditeurs du feuilleton prétendirent avoir tout oublié des événements de la nuit, ou nièrent avoir écouté la radio durant la veille. Quelques rares cas, cependant, furent internés en maison de santé pour des crises de stress post-traumatique apparemment liées à une guerre n'ayant jamais eu lieu. Interrogé par l'Unité des Affaires Non-Classées du FBI, George Spelvin a quant à lui reconnu les faits mais s'est montré incapable d'apporter tout élément concret relatif au contenu ou à l'origine de The War of the World.
La Fin Absolue du Monde (1971)
Support : Long-métrage, 2 bobines de 35mm (a priori le seul exemplaire existant). Disparu.
Auteur : Hans Backovič, un réalisateur bordurien indépendant. Supposé mort.
Diffusé au Festival international du film de Catalogne de 1971 à Sitges, en Espagne. Le public comptait près de 212 personnes (sans compter le réalisateur, le projectionniste, et potentiellement d'autres personnes n'ayant pas été inscrites dans le registre). Au bout d'approximativement 9 minutes, les spectateurs commencèrent à afficher des comportements "erratiques" et "grotesques". Des violences éclatèrent aux alentours de la quinzième minute et se transformèrent en une émeute générale, avortée par l'évacuation de la salle. 16 morts à déplorer, dont 11 piétinés lors de l'évacuation et 5 par homicide volontaire. Des comportements mutilatoires et cannibales auraient également eu lieu, bien que non-vérifiables.
Si l'essentiel du public semble s'être remis du visionnage au fil du temps et des thérapies (en dehors des symptômes de déni traumatique habituels), une vingtaine de cas plus affectés mirent fin à leurs jours ou furent internés dans l'année qui suivit, et d'autres spectateurs supposés être guéris semblent avoir développé des troubles psychiatriques plus graves sur le long-terme.
La Fin Absolue du Monde réapparut "par erreur" en 1983 dans la programmation du Festival du Film de Rotterdam, mais il n'y fut jamais diffusé, et il est peu probable que les organisateurs du festival aient eu le film en leur possession.
Pistes explorées
████ █████████ (1972-Aujourd'hui)
Formé en 1972, le ████ ████████ ███ ██ ████ ███████ ██ secte New Age ████████ ████ ███ ███████ ██ █████ ██ █████ █████ ██ █████████. ███ █████████ ████ ██████████ ███ ███ █████ ████████ █████, ████████ ███ pacifique en apparence, ███ ███████████ ███ ██ ██████, █ ████ ████ █ ███████, dont le chanteur populaire ███ ███, ████ ███ ███████ ███ ██ ██████████ █████, ████████ ███ ████████ ██████. Ce dernier aurait, selon certaines sources, assisté à une projection clandestine de La Fin Absolue du Monde.
██ █████████ ██████ █ ████████████-██████████, ████ ████████ █████, ████████ ██ ██████████, ██ ██████████ ██ █████ ██ ██████.
███ ███ ██ ████ ██████ ███ soupçons de ██████ ██████████. ██████ █████████. █████████ ██ █████ ésotérique, ████████ ███ █████ ████ ██████ ███████ █████████ ██████. ████ ████ ███ ███████ ██ █████ ██ █████ █████. Refondée en 1993, la secte occupe aujourd'hui une commune auto-gérée établie autour d'une menuiserie désaffectée proche de Saran, dans le Loiret, placée sous surveillance constante.
La nature exacte de la "bastastelia" (sic) est inconnue. Objet inaccessible provoquant la fascination de ses nouveaux adhérents, apparemment traité comme le texte (ou bande-son, ou film, ou autre medium) sacré et prophétique de la secte, il est possible qu'il s'agisse d'une nouvelle instance de Legs 701.