J'vais tous vous butblblblbl

Quelqu'un maintenait la tête de Bob sous l'eau. La prise était ferme et vigoureuse, l'on sentait l'expérience de celui qui faisait ça. Il n'en était probablement pas à son coup d'essai. Quant à Bob, c'était la première fois qu'il se faisait kidnapper. C'était probablement lié à son nouveau job. Cela faisait maintenant une semaine que l'ex-vigile de supermarché était devenu un agent de la Fondation SCP.

Il n'en revenait pas d'avoir été accepté, ils avaient surement dû voir en lui quelque chose de spécial, quelque chose qui le rendait unique. Depuis sa plus tendre enfance, Bob était convaincu qu'il n'était pas comme les autres, peut-être une sorte d'élu, ou un truc du genre en tout cas.

La main derrière son crâne le lâcha et il put relever la tête hors de l'eau pour reprendre sa respiration. Il se trouvait dans une pièce aux murs bétonnés et sans aucune fenêtre, probablement une cave. Devant lui se tenait un grand chauve en costard blanc accompagné par deux brutes munies de kalachnikov. Derrière lui se tenait son bourreau, un moustachu vêtu d'une salopette bleue, ça lui rappelait Mario. L'homme devant lui le questionna pour la vingtième fois, peut-être vingt et unième fois, Bob ne savait plus vraiment. Les multiples passages sous l'eau avaient suffi à mettre hors d'état ses talents de mathématicien niveau CM2.

- Nous avons moyens vous fairrre parrrler, agent Bob, mais vous pouvez tout arrrêter maintenant, plus glou glou si vous rrrépondez : où se trrrouve SCP-032-FR ? RRRéfléchissez bien, tout peut s'arrrêter maintenant agent Bob.

L'homme avait un fort accent russe et puait la vodka. C'était cliché, terriblement cliché, mais les clichés ont toujours un fond de vérité, non ?

- Je vous dirai rien, murmura Bob, vous m'entendez ? Je vous dirai rien ! Plutôt crever que de vous réponblblblbl…

L'on venait de lui replonger la tête sous l'eau. Le moment idéal pour un autre flash-back. Bob s'est fait kidnapper ce matin. Il venait de finir sa première semaine à la Fondation S…P…C, ah bordel, un truc du genre, c'est galère aussi toutes ces lettres, pourquoi ne pas juste mettre "la Fondation" ? Bref, c'était son jour de repos, et comme tous les dimanches, il s'était levé tôt pour commencer son petit footing matinal, mais à peine sorti de sa résidence, un groupe d'homme l'avait attrapé et jeté dans une fourgonnette noire, en prenant grand soin évidemment de le bâillonner. C'était du travail de pro, aucun doute là-dessus. Le trajet avait duré une dizaine de minutes, puis on lui avait bandé les yeux, et on l'avait conduit jusque dans ce lieu de torture improvisé. Il n'eut même pas le temps d'articuler une phrase qu'on lui mettait la tête sous l'eau froide qui avait préalablement été versée dans une vieille baignoire blanche, ou plutôt, qui avait été blanche. Elle était désormais couverte de crasse verdâtre. Bob se demanda s'il ne risquait pas de chopper une saloperie de maladie à force de goûter à cette eau.

Une fois de plus, juste avant la noyade, on le laissa reprendre sa respiration. Bob était endurant, plus qu'ils ne le pensaient, et jusqu'à présent, il avait feinté la fatigue, mais c'était pour mieux conserver ses forces afin de saisir l'occasion idéale pour sa fuite. Les deux gardes s'étaient assis et le chauve en blanc était parti, probablement pour le laisser réfléchir un moment. Bob profita de l'occasion pour asséner un puissant coup de coude dans les côtes de son bourreau et se releva, mais il avait sous-estimé la robustesse du moustachu qui lui rendit son coup de coude avec un coup de poing qui l'espace d'un instant satellisa la conscience de Bob qui retomba finalement à genoux devant la baignoire, le cerveau quelque peu en désordre. Les deux gardes n'avaient même pas réagi, se contentant d'observer la scène avec un petit sourire aux lèvres. L'un d'eux avait même ri. Bob se sentit blessé dans son amour propre.

Le chauve ayant entendu l'échange de coups et le gémissement de Bob revint dans la pièce, puis, après une rapide observation de l'état de Bob et de son bourreau, conclut que ça n'avait pas dû être très difficile de le calmer. Bob, lui, avait conservé sa détermination, jamais il ne céderait les informations qu'il possédait, du moins, jamais volontairement, cela en allait de son honneur.

- Tu vois, ça être inutile. Donne nous position SCP-032-FRRR et Fondation n'en saurrra rrrien, dit une fois de plus le ravisseur, la voie toujours plus hargneuse.

- De toute façon… répondit Bob avec un ton cynique, Aleph est tellement défendu que vous ne pourriez pas vous emparer de SCP-032-FR…

- Donc il se trrrouve à Aleph.

- Quoi ?! Mais j'ai jamais dit… Merde ! s'exclama Bob.

Par inadvertance, il venait de donner la réponse qu'il devait garder secrète. L'homme chauve sourit puis quitta la pièce. Il prit son téléphone et composa un numéro.

- Allô Bruce ? C'est Tod à l'appareil. Je viens de finir le test, il sera parfait pour le département de désinformation, il reste plus qu'à lui filer deux-trois fausses infos et le tour est joué.

- …

- Ah ouais, le couillon parfait. Il a tout balancé sans même le vouloir, et aucun risque qu'il ne s'échappe. Bon, je te laisse voir avec le DCD pour son affectation, à la prochaine.

Puis l'agent raccrocha. Il était content, il venait de trouver la perle rare, l'élu de la désinformation.

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