Dieu est parti

La porte resta close.

Je tendis l’oreille : pas un bruit à l’intérieur de la maison. A peine le souffle de l'air qui brisait le silence.

Elle m’avait devancé…

Mes yeux se portèrent vers le grand arbre de l'autre côté de la rue : le ciel était dégagé et le soleil apportait une chaleur réconfortante, même la brise fraiche ne parviendrait pas à gâcher cette journée.

Il était évident que si j’avais eu envie d’aller faire une promenade, elle aussi. J'allais la rejoindre.

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Je me détournais de la porte de sa maison et m’engageais sur le chemin menant à la place principale. Les rues s’emplissaient lentement de promeneurs qui voulaient eux-aussi profiter de cette belle journée.

Sans même y réfléchir, mes pas prirent la direction de la sortie nord du village reconnaissable par la maison de Mme Andrevaa. Elle avait le plus beau jardin. Elle cultivait ses tulipes dans sa serre intérieure. Chaque fois que le beau temps s’y prêtait, elle sortait ses jardinières remplies de fleurs sur le bord du jardin. C’était beaucoup d’efforts pour quelques fleurs mais la vieille semblait un peu toquée.

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Dans un geste, je fauchais une tulipe rouge avant de prendre la poudre d’escampette, sans grande raison : Mme Andrevaa n’y voyait rien. Ou bien cela ne la dérangeait pas. Qui sait ?

La terre était encore humide des pluies diluviennes de ces derniers jours. Mes pieds s'enfonçaient et glissaient ça et là sur les feuilles qui n'avaient pas été soufflées.

Je traversais le ruisseau prudemment, il ne manquerait plus que je finisse dedans. Cela la ferait probablement rire de me voir couvert de boue…

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Le silence était d’or, troublé que par le bruit de l’eau, de mes pas sur le sol et la vie des animaux. Eux non-plus n'allaient pas rater une seconde de cette accalmie.

Je passais devant l’installation abandonnée qui marquait la dernière ligne droite de mon chemin. Bientôt, je l’aurais rejointe.

Je marquais une pause. C’était quoi déjà ces grilles à l’origine ? Elle m’avait raconté une histoire loufoque là-dessus mais je ne m’en rappelais plus. Encore une histoire folle que je ne sais plus qui encore lui avait raconté.

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Oh et puis, on s’en fiche : bientôt, je l’aurais rejointe.

La colline était glissante aussi, je manquais de lâcher sa tulipe à quelques reprises en faisant des moulinets avec les bras pour trouver mon équilibre. Heureusement, le vent ne vint pas s’ajouter à mon ascension.

Une fois arrivé devant la bâtisse, je pris le temps de remettre mon pull en place et plaquais ma tignasse en arrière.

Alors que je passais sous l’arche encore intacte de ce qui fut une entrée, mes yeux se posèrent sur elle. Mon cœur se mit à battre plus fort. Enfin, je l'avais rejointe.

Imbécile.

“S-salut !”

Je m’asseyais à côté d’elle, sur un rocher moussu et humide. Bien que je le regrettais immédiatement, je choisis de rester en place.

Je jetais un œil dans sa direction en tendant l’unique tulipe volée. Ses épais cheveux cachaient son visage.

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Elle porta délicatement la tulipe devant sa bouche et murmura quelque chose que je n’entendis pas.

“Qu’est-ce que t-”

Une bourrasque vint m’interrompre soudainement. Celle-ci faucha la fleur et balaya sa crinière en arrière dévoila ainsi son sourire réservé alors qu’elle tournait la tête vers moi, l’air amusé.

“Rien du tout.”

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