Quatre pattes. Courtes pattes. Cacher. Cacher. Casser la croûte ? Croquettes. Klong ! Caramel, pelage caramel. Queue courte… Quelle odeur ! Pas caresser, pas caresser, pas craquer, pas craquer…. CROQUER !
Délicieux… Doux pelage, dodue viande. Une moustache entre les dents. Hop ! Sauter sur la table, trouver une nouvelle cachette. Un rot étouffé, surtout rester discret. Sans surprise, grande faiblesse. Oh, les enfants. Encore meilleur. Sucettes ! Rouge ? Rouge rubis. Retournée, pour paraître plus attractive au regard. Reste à trouver la place pour un oeil… Risqué, mais au bout du bâton. Trop petit ? Oui, vraiment trop petit pour bien penser. Mmhhhh….
Pourquoi pas la boîte entière ? Oui, plus de place pour cerveau, plus pratique pour chasser enfant. Avant toute chose, faire disparaître la vraie. Pas mauvais le sucre, hommes malins quand même. Et puis, période de reproduction qui approche, possibilité de mettre larves dans sucettes ! Oui, très malin, très bon plan ! Qu'est-ce que ? Voix ? Silence, dois rester bien caché.
« Cela fait longtemps que vous avez ce problème ?
— Difficile à estimer. Vous savez, dans un établissement comme le nôtre, ce genre de blessures est fréquente : les patients mordent souvent à cause de leurs troubles ou de leur traitement, les produits que nous utilisons peuvent irriter la peau…
— Quand même docteur ! Des patients disparaissent de votre Sanatorium et vous ne réagissez pas plus que ça ? »
Dr Morgan. M'a caché pendant longtemps parce que mangeais patients gênants. Sans doute trop vieux pour avoir chair tendre. Mais l'autre ? Inconnu. Accent du Nord. Bruit de métal. Une voix à avoir un bon goût, cependant.
« Écoutez, l'établissement compte beaucoup de patients et nous n'avons pas les moyens de tous les recenser quotidiennement. Et puis, vous savez, pour beaucoup de gens, il s'agit avant tout de ne plus les voir. Arkham est certes un peu reculée, mais nous n'avons pour ainsi dire jamais de visites. Mais dites-moi, comment pensez-vous le retrouver ?
— Avec ceci. »
Porte ouverte. Un grand homme, Protections sous costume. Yeux qui sentent l'étrangeté. Dans une main, grosse machine avec aiguilles. Serait un excellent camouflage, mais fait du bruit. Des craquements, comme chat dodu sous la langue. Beaucoup de craquements. Balaye la machine dans la pièce. Craque de plus en plus vers moi ? Grand homme me regarde. Comment savoir s'il sait ? Commence à saliver, dents prêtes à sortir, approche l'autre main lentement… Comme ça, voilà… Prends une sucet-
AAAAAAAAHHHH !!! MES DENTS ! FONDUES MES DENTS ! BRULÉE MA LAAAANGUE !
Comment ? Pourquoi ? Courir. Tentacules partout, entre les jambes, slalomer, vite ! Trouver cachette, trouver, mal, tellement MAAAAAL. Renversé caisse de gélules dans l'escalier.
Rouler. Rouler avec autres. Si petit. Larve, presque. Mal, encore. Pas rester comme ça. Juste se cacher un peu. Là, dans sang séché entre pavés. Bruit des bottes. Le grand homme. Tremble. Non ! Pas trembler. Gélule, gélule normale. Comme les autres. Pas panique. Pas panique. Pas panique.
« Restez calme, docteur. Il n'a pas pu aller bien loin, je l'ai de toute façon à la trace. Je pense qu'il est trop petit pour qu'on le détecte, mais cela signifie qu'il est faible. Ces créatures ne sont pas très malignes, il suffit de les blesser un peu et elles se mettent à paniquer.
— L'important, c'est qu'elle n'atteigne pas la salle de radiologie, si j'ai bien compris ce que vous lui avez fait, Northwood.
— Très juste. Allons verrouiller le sous-sol, cela lui laissera le temps de reprendre forme de toute façon. »
Pieds vers loin. Calme. Tremble un peu. Douleur, encore. Pas dormir, non.
Trop fatiguant si petite forme. Trouver endroit bien caché. Mmmmhhhh. Bibliothèque au fond du couloir ? Comme à l'époque, oui. Se coller au plafond, plus discret. Comment m'avoir trouvé ? Et comment m'avoir fait si mal ?
« Décidément Dr Morgan, cet endroit est bien austère. Mais que de sécurité ! Vous avez peur que quelque chose ne s'échappe ? On se croirait dans la réserve de ma famille !
— Les patients, principalement. Vous savez… Ils sont souvent violents, tant pour eux-mêmes que pour nous. Nous ne voulons que leur bien, vous savez. J'y pense, Northwood, vous avez une idée de comment ce monstre est arrivé là ?
— Ce sont des créatures centenaires, millénaires parfois. Elles se reproduisent en prenant l'apparence de contenant, leur contenu étant des larves sous couverture. À l'époque de nos ancêtres, il était commun que ces bestioles se déguisent en coffre, infectant les bourses des voyageurs de fausses pièces qui dévoraient leur porteur une fois grandes, mais je parierai sur une boîte de médicaments ou de seringue, dans votre cas. Il faudrait croiser les arrivages, calculer le début de période d'activité et vérifier qu'il n'est pas en chaleur, surtout. »
Aaaaahh. Comme cela fait du bien de revenir aux classiques. Trois siècles dans une bibliothèque, ça forge. Et quel vocabulaire, une fois en livre ! Bon, qui est cet homme ? Qu'est-ce qu'il m'a fait manger ? Comment m'a-t-il identifié si vite ? Son étrange machine ? Mais pourtant je suis résistant aux anciens rituels de divination, alors comment un simple appareil humain pourrait m'avoir ? Et ce chat, au début si bon, qui commence à me peser sur l'estomac… J'ai fait attention à bien mélanger l'ordre des bouquins sur l'étagère, aucune chance de me faire repérer. Allez, une digestion, une petite sieste et on avise. Au vu de la poussière sur les étagères, pas certain qu'une proie passe par là de sitôt, mais bon, on sait jamais. Au pire, je rechangerai d'endroit.
Oh non, encore ce craquement. Ils sont de retour ? Je n'ose pas ouvrir un œil. Oui, c'est certain c'est eux. Je durcis ma couverture, son horrible gant ne m'aura pas deux fois. La machine est juste devant moi, horribles craquements ! Tant pis, il faut tenter. Il m'attrape, j'ouvre la gueule et-
La cartouche de fusil à canon scié arracha les pages gluantes, déchirant le monstre à travers la pièce. Le cadavre du chat, sa pâte radioactive encore dans le ventre, continuait de faire craquer le compteur Geiger. Frank Northwood, la mine fermée, jeta son gant plein de soude caustique au sol, des morceaux du mimique acide faisant encore des bulles à son contact. Quelque chose n'allait pas dans cet asile, mais il ne savait pas quoi, et il ne chassait pas les hommes.
Devant les vrais monstres, même les Chasseurs sont parfois impuissants.