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Gazette d'Aleph
Février 2022

L’Édithaumiel
par François San Trez, ex-candidat à la présidentielle.
François San Trez est un guerrier de la vie : né d'un père français, magnat de la cacahouète, et d'une mère guatémaltèque rencontrée dans les plantations, il développe sous le climat équatorial une forme rare et exotique d'allergie aux arachides qui lui fait gonfler la boîte crânienne de façon irréversible. Ce handicap, il a su l'apprivoiser pour en faire sa force. Après un bref échec en tant que modèle pour bonnets de bain, il se lance en politique et fonde le Parti Anomaliste. Malheureusement victime d'une campagne sabotée, la Gazette d'Aleph lui offre aujourd'hui carte blanche dans ses colonnes.
« Réclamations quant à mon droit à l'image »
Demain arrive la fin des parrainages pour l’élection présidentielle 2022, et inutile de vous dire que je n’ai pas eu les 500 signatures. Mes adversaires vous diront que c’est parce que ma tête effraie les électeurs, mais rien n’est moins vrai : au contraire, j’ai été victime d’une lâche et vicieuse campagne d’arrachage d’affiches partout à travers la France ! Ma photo est prise pour cible par des forces obscures et calomnieuses, je vous le dis ! Aussi ai-je requis un droit de réponse au sein de votre prestigieux journal, la Gazette d’Aleph.
Il ne me semble pas que l’on m’ait demandé mon autorisation à quelque moment que ce soit pour effacer de la sorte mon image de l’espace public, et je tiens à ce que ça se sache que les acteurs de cette machination ne resteront pas impunis, et que nous nous retrouverons devant les tribunaux.
Mon programme était pourtant parfaitement ficelé, ma communication impeccable. Certes, il y a eu quelques cafouillages. Face à la menace nucléaire agitée par monsieur Poutine, mon slogan « NO NUKES » a été changé en « NO NUQUES », ce qui en a effrayé plus d’un. Que l’on ne me reproche pas de ne pas embaucher de stagiaire ! Non, je rigole, bien évidemment – c’est Vincent Cisse, mon chargé de communication, qui a mal supervisé l’équipe. Mais je m’égare.
L’on m’a accusé de tourner le dos aux médias, l’on m’a accusé de de faire des clins d’œils à l’extrême-droite. Ceux qui me connaissent savent que les clins d’œils ne marchent pas avec moi. J’ai toujours été droit dans mes bottes, et plus encore, j’ai toujours eu des résultats : rappelons que plus de quatre mille agents d’entretiens ont été embauchés depuis mon arrivée dans le quartier chaud de la cité d’Izneuf en 1993. D’ailleurs, mon vaste programme « Et Maintenant On Ecoute » avait porté ses fruits en rapprochant le peuple d’une classe politique que l’on dit trop souvent éloignée des vrais préoccupations. Même quand je donne l’impression de ne pas bouger, j’écoute.
Face à cet acharnement, certains membres de mon équipe en ont été réduits, et j’en suis le premier attristé, à utiliser le tristement fameux mélange d’éclat de verre à la colle lors du collage des affiches, solution que je regrette moins quand je constate que cela n’a en rien arrêté mes entêtés ennemis, qui y auront au moins perdu un peu de sang en plus de leur honneur.
Désormais hors course, j’appelle tous mes adhérent à donner leurs voies à Oscar Hanteneuf, le maire de Montauban dont le Parti Lance a réussi à collecter ses 500 signatures.
Enfin, j’aimerais rappeler une chose à tous vos lecteurs : nous vivons des temps difficiles, où la méfiance est généralisée contre toutes et tous – les journaux, les politiques, même les maires. Chacun voit la manipulation à sa porte, et l’on recherche désespérément les sous-entendus, les influences cachées et les double-sens, au point d’en oublier de voir ce qu’ils sont sous les yeux et de ne plus prêter crédit à rien. À ceux-là j’aimerais rappeler : la vraie menace n’attend pas toujours que vous ayez le dos tourné pour frapper.
Un mot sur la situation ukrainienne
L'état de la situation géopolitique mondiale n'aura échappé à personne et tous les médias s'en sont faits les échos en cette période difficile. La Gazette aimerait cependant elle aussi aborder la question… sous l'angle qui nous concerne ici. Effectivement, la Fondation possède une Branche ukrainienne tout comme une Branche russe, et les conséquences de la situation de leurs pays respectifs sont du plus grand intérêt pour la communauté SCP internationale.
La Branche russe n'a pas à ce jour pris de position officielle et nos collègues de son hebdomadaire, le Rufond Herald, ont annoncé leur neutralité sur la question et "appellent à résoudre tous les problèmes de manière pacifique". Il convient de noter que toute prise de position pro-Ukraine claire est difficile pour les citoyens et habitants de Russie, celle-ci pouvant depuis peu être considérée comme une trahison à la patrie, infraction reconnue par le code pénal russe et pouvant être punie de plus de 20 ans de prison.
Le site scpper.com, base de données très utilisée des différentes branches de la Fondation créée par le membre russe FiftyNine, pourrait également être compromis à moyen terme faute de levée des sanctions économiques et mesures de protection russes qui empêchent actuellement son administrateur de payer au service (américain) Amazon Web Services l'hébergement nécessaire au maintien en ligne de son site.
La Branche ukrainienne, quant à elle, a récemment communiqué sur sa situation dans un entretien traduit et disponible sur un fil du site Commandement O5. Les activités de leur site sont actuellement gelées, les contributeurs étant personnellement impliqués au premier ordre dans la situation au quotidien. Les représentants de la branche ont partagé plusieurs moyens de les soutenir pour les observateurs extérieurs solidaires.
Au niveau international, SCP-INT a manifesté son soutien au peuple ukrainien dans les difficultés qu'il traverse, sans prendre de position politique en se rangeant derrière un état ou un autre mais en déplorant la tournure prise par la situation. L'équipe de la Gazette d'Aleph souhaite également une amélioration aussi rapide que possible des conditions de vie de tous, nos confrères contributeurs en tête.
Futur concours international ?
Le staff de SCP-INT a lancé un sondage consultatif sur les envies d'engagement des membres des différentes communautés SCP dans un potentiel concours international, par exemple entre des articles choisis par chaque branche ou entre des équipes d'auteurs issues de celles-ci qui écriraient pour l'occasion… Le questionnaire profite également de l'occasion pour les interroger sur leur opinion sur la promotion des articles à l'internationale et quelques questions analogues devant permettre d'améliorer le fonctionnement de la plateforme et les événements prévus. N'hésitez pas à prendre quelques minutes pour y répondre !
SCP-173 ne bouge pas en France !
Vous l'aurez compris, vous lisez actuellement une édition spéciale de la Gazette d'Aleph consacrée à la suppression de l'image de SCP-173, article mère de notre communauté.
Pour autant, la branche française a fait le choix de conserver pour l'instant l'image de notre bien-aimée statue, à l'instar des branches japonaise, chinoise, chinoise traditionnelle (ZH-TR), tchèque, thaïlandaise et ukrainienne. Une étrange scission au sein de la communauté internationale SCP qui a diverses raisons, mais que l'on peut résumer comme ceci : les diverses branches étrangères au site anglais, en tant que sites "de traduction" ont une responsabilité moindre au cas où un problème de licence adviendrait — d'où le fait qu'elles soient libres ou non de s'aligner sur cette suppression.
Pour en apprendre plus et connaître en détail les raisons de la branche francophone, vous trouverez le raisonnement détaillé du staff sur le fil O5 dédié.
Dans la grande famille des SCP, il y a deux types de lecture.
Les incontournables, adulés ou détestés, ces classiques auxquels on n'aura de cesse de faire référence.
Les nouveautés, celles qui défilent dans le fil des publications, que l'on suit pour rester à la page.
Et entre les deux, il n'y a
Et Maintenant On Analyse Des Trucs
Non, attendez, quoi ? Serait-ce un genre de-
Ce mois-ci :
- CROSSOVER -
Aucun Rapport x Et Maintenant On Analyse Des Trucs :
SCP-173 : Une image de perdue… mais combien de retrouvées ?
Ce n’est pas une défaillance de votre ordinateur. N’essayez donc pas d'éditer cette page. Nous maîtrisons, à présent, l'entièreté de votre Gazette. Peut-être étiez-vous venus pour lire la chronique Aucun Rapport de DrGemini, peut-être vouliez-vous lire Et Maintenant On Analyse Des Trucs de
Seyph. Cela n'a plus aucune importance.
Parce que putain ils ont supprimé l'image de SCP-173 et j'ai l'impression de crever.
Bonjour à tous, lectrices et lecteurs, et bienvenus dans la chronique du siècle — qui, si elle n'est pas le meilleur article du siècle, vous prendra bien au moins un siècle à lire. À l'aube de la Troisième Guerre Mondiale et alors que les rapports du GIEC s'accumulent, la Gazette d'Aleph a fait le choix courageux de braver la doxa et de parler des sujets vraiment importants : la suppression de l'image de SCP-173. Pour cela, nous vous proposons ce mois-ci un crossover exclusif entre la critique littéraire acerbe de Dr Gémini et l'analyse de la sphère fanartistique de Seyph. Parce que c'est avant tout ça, SCP-173 : une symbiose entre le texte et l'image, chacun nourrissant l'autre pour faire naître, dans l'esprit du lecteur, un monstre emblématique d'un genre nouveau.
Enfin, c'était.
Reportage.
Statue particulière cherche statut particulier
SCP-173, qu'est-ce que c'est ? Avant tout, c'est la photo d'une statue de l'artiste japonais Izumi Kato, intitulée "Untitled 2004", prise par le photographe Keisuke Yamamoto puis utilisée par un mec random d'internet pour faire une courte histoire d'horreur, à l'époque pas vraiment destinée à grand-chose si ce n'est tromper l'ennui de quelques personnes sur 4chan.
Le cliché en lui-même présente une salle d'exposition dénudée et brute, à l'aspect usé, banal, utilitaire. Un environnement assez ordinaire pour de l'art contemporain.
La sculpture en elle-même est décentrée, face contre le mur, dans une position évoquant un enfant au coin. En bas à droite, on peut apercevoir un bout de table en bois1.
Au moment d'écrire SCP-173, Moto42 s'est lourdement appuyé sur cette photo, essayant de lier un maximum d'éléments dans un tout cohérent. Ainsi le sol rouillé devient un mélange de sang et d'excréments, et il justifie la présence d'une fenêtre par le fait que l'objet n'ait pas la force suffisante pour la briser2.

| Reconstitution de la première occurrence de 173
On note également la mention de béton armé, une extrapolation qui trouvera une grande postérité (mais nous en parlerons plus bas).
En clair, le texte invente sa propre vision de la sculpture, divergeant de ce qu'elle représentait à l'origine, mais fidèle à sa photo. Et c’est là que SCP-173 prend tout son sens : son image n’est pas l’illustration du texte, c’est le texte qui est une exégèse de l’image, à savoir une interprétation particulière de ce que l’auteur a vu dans cette statue. Et, à vrai dire, le texte repose de façon bien plus subtile qu’on ne le croit sur son image.
Si Untitled 2004 avait déjà en soi un côté dérangeant, de par ses proportions, sa position et son petit côté insalubre, le texte va mettre en avant ces éléments… mais sans les appuyer, au contraire. Il va parsemer le tout premier rapport SCP d’éléments écrits qui ne collent pas avec ce que le lecteur voit, le plongeant dans une certaine dissonance qui va le déstabiliser, lui faire comprendre de lui-même que quelque chose cloche : on se retrouve alors en pleine "vallée dérangeante".
Que nous apprend Moto42 ? Que SCP-173 est une menace mortelle ? Il a pourtant une apparence de bambin avec son énorme tête, et l’innocence d’un enfant au coin. Ce côté naïf, c’est littéralement ce sur quoi travaille Izumi Kato. Il brise la nuque de ses victimes ? Il a pourtant de tout petits bras, à peine des moignons, il est tout ramassé sur lui-même. Idem pour ses toutes petites jambes, alors qu’on veut nous faire croire qu’il se déplace à la vitesse du son ? L’image ne colle pas avec ce qu’on nous raconte… et pourtant…
Pourtant il a les bras tendus vers l’avant. Pourtant cet environnement crade et urbain ne colle pas avec le côté enfantin de la statue. En fait, si les grandes lignes du rapport ne collent pas avec ce que l’on voit sur la photo, énormément d’éléments plus discrets nous font comprendre, plus ou moins consciemment, qu’elle n’en est pas si éloignée. Les fameuses fesses rigolotes et innocentes de la statue sont tout de suite mises en connexon avec cette histoire d’excréments sur le sol. Le fait qu’elle soit au coin implique qu’elle a été punie. Et sa position, la tête légèrement tournée en direction du photographe, le visage inexpressif, nous fait comprendre qu’on a attiré son attention…

Untitled, 2020. Ils s'appellent tous Untitled — Kato préfère que l'on voie dans ses œuvres ce qu'on veut y voir.
Tout cet implicite, pourtant, on ne le retrouve pas beaucoup dans les œuvres dérivées de 173 (certes, l'entièreté de l'univers SCP est techniquement une œuvre dérivée de 173… On va prendre ce terme dans un sens plus restrictif). Quelques contes en ont gardé l'essence. Dans le conte Son Chef-d'œuvre, par exemple, une des nombreuses origin story de la statue, on apprend qu'elle fut créée par vengeance, de la main d'une femme dont le mari a tué l'enfant — d'où son aspect de bébé monstrueux, ramené d'entre les morts.
C'est d'ailleurs le but même de son vrai sculpteur, Izumi Kato, qui se passionne pour l'art naïf, les sculptures primitives et les dessins d'enfants. Les corps difformes qui peuplent ses œuvres ne sont absolument pas pensées pour déranger, et il est fort probable que, fasciné par la vie quotidienne, il ait positionné Untitled 2004 de façon à évoquer une partie de 1, 2, 3, Soleil… Or, si le récent succès de Squid Game nous a bien prouvé quelque chose, c'est que ce genre d'imaginaire naïf est très facile à pervertir.
Les fanarts, pourtant, n'ont jamais retenu ce côté enfantin, même si la tendance pré-2022 était de se reposer sur cette apparence relativement inoffensive de la statue.
Comme toujours dans les fanarts d'articles possédant des images, la plupart des interprétations sont un compromis entre ce qu'évoque le texte et un visuel déjà très défini auquel il faut être assez fidèle pour que ça soit reconnaissable. Ainsi, l'immense majorité des fanarts pré-2022 reprennent la forme et la position d'Untitled 2004. Un quasi-consensus s'est créé autour du fait que ne pas forcément prendre en compte le relief de la statue originale pour le rendre moins angulaire aux jonctions, notamment entre la tête et le corps, ça serait davantage une amélioration qu'une trahison.

| Une représentation classique, par @ichi_ka.
On retrouve aussi systématiquement une reprise des taches de la "face". Ces traits de peinture verte, rouge et noire ont beaucoup plu aux fanartistes, qui en ont parfois adapté la forme à leur propre imaginaire.
Certains ont profité des lignes rouges pour figurer des éléments organiques bardés de dents, suggérant par là un 173 apparenté à un mimic, qui colle de façon intéressante à l'idée d'un truc normalement inerte qui bouge quand même et veut te tuer.

| 173 par KiwiHermit
La peinture noire sur le derrière et l'abdomen de la statue est quant à elle représentée de façon bien moins systématique. Plus discrète sur l'image de base, le texte lui attribue une connotation supplémentaire lui associant les matières fécales. Une connotation que certaines interprétations préfèrent écarter, à commencer par celle de Containment Breach. Ce jeu étant sans conteste l'œuvre la plus influente et mainstream de l'univers SCP, sa représentation de 173 a créé un troisième point de référence pour les fanartistes (en particulier ceux ayant découvert la Fondation avec le jeu).

| 173 dans Containment Breach, par Regalis3
L'héritage du 173 de Containment Breach cependant, c'est surtout le surnom de "cacahuète". En effet, sa texture un peu grossière et sa forme arrondie font vaguement penser à celle de l'arachide, ce qui n'a pas manqué d'inspirer joueurs, memelords et fanartistes.

| Détournement d'un paquet de cacahuètes (artiste inconnu)
Cependant il semblerait que la popularité de ce surnom ne vienne pas directement de Containment Breach, mais de Secret Laboratory, qui a réutilisé le modèle.

| Évolution de la fréquence de recherche de la combinaison de mots "scp" et "peanut". On constate une augmentation de la popularité du mot-clé en avril 2018, qui peut s'expliquer par le remplacement du modèle par un autre en forme de cacahuète à l'occasion du premier avril. La blague existait donc déjà avant, mais c'est Secret Laboratory qui l'a répandue.
Mais c'est loin d'être la seule blague qui fait partie de l'iconographie de 173. Ainsi, on retrouve beaucoup de fanarts humoristiques et parodiques, que l'on peut classer un deux catégories distinctes : ceux basés sur l'écrit et ceux qui s'appuient sur la photo.
Dans la première catégorie, on retrouve surtout la mise en scène de situations provoquées par les capacités ou effets du SCP. Le motif le plus populaire est alors de l'associer d'autres SCP pour le rendre plus létal. Ainsi, la logique a mené à un certain nombre de memes et de fanarts mettant en scène un 173 sur lequel on aurait scotché une photo de 096.

| Une combinaison mortelle, par Aethris. Ici on a rajouté le collier du docteur Bright, ce qui explique en quelque sorte comment cette situation a pu se produire.
Dans la même logique de combinaison des effets de plusieurs SCP, on trouve aussi régulièrement l'inverse, qui combine la statue avec 131-A et 131-B.

| Un exemple, par IlangKape
La seconde catégorie quant à elle, repose moins sur la logique et va parfois jusqu'à se détacher complètement de l'article.
La tendance la plus fréquente est une exagération du fessier de la statue. Ce motif s'accompagne parfois d'une sexualisation plutôt explicite, qui est largement acceptée parce que la blague "fesses, haha" est d'autant plus drôle qu'elle est poussée à fond. Le fait que le sujet soit une statue à mi-chemin entre le figuratif et l'abstraction permet que ladite sexualisation n'ait pas de connotation réellement malaisante4.

| 173 par Ashley Sarroca (notez la position penchée vaguement suggestive, les deux pointes de blanc figurant un reflet, l'arrière-plan vert concentré sur le milieu du dessin et les trois traits qui mettent fortement en avant les fesses)
Évidemment, 173 n'a pas échappé au rule 34, qui ne s'est pas privé de faire usage de ces fesses rebondies. Et comme il est difficile de rendre très sexy une statue, les artistes concernés l'ont humanisée. [j'hésite à parler de gijinka ici. Ça pourrait être pertinent mais j'ai peur que ça soit à côté de la plaque] Sans surprise, les humanisations de 173 suivent à la lettre les clichés du genre : ce sont (à quelques très très rares exceptions) des représentations féminines dénudées aux formes généreuses. Le motif des fesses en saillie a semble-t-il encouragé une exagération supplémentaire des formes.

| On a peut-être des lecteurs mineurs donc on ne va pas montrer de véritable rule 34, mais vous voyez l'idée. (Dessin de Norodoggo)
Ce type de représentations très stéréotypées fait écho à un monde de l'art érotique sur Internet profondément ancré dans des clichés où le cul c'est pour les jeunes hommes hétéros qui aiment les gros seins5. Mais ça n'est pas le sujet de cet article.
On peut trouver un autre type d'humanisation, sans ce côté sexuel : la forme enfantine/adulescente. C'est une forme qui se rapproche davantage de l'implicite de l'article, bien qu'il soit difficile de dire si c'est intentionnel.

| Artiste inconnu6
On note cependant que ces personnifications sont souvent peu habillées (la combinaison T-shirt ou vieux poncho troué/culotte ou pantacourt étant très utilisée), ce qui entretient une vague ambiguïté7. Ce type d'humanisation semble être un motif assez restreint aux fanartistes asiatiques, pour lesquels cela doit sembler moins bizarre que pour les occidentaux.

On ne dirait pas comme ça, mais vous regardez une copie d'une copie d'une copie d'une copie d'une copie de Untitled 2004 par Izumi Kato.
Cela fait donc bientôt quinze ans que la photo d'Untitled 2004, sous l'identité de SCP-173, infuse dans toutes les sphères d'Internet. Que ce soit sous forme de mème, de waifu ou de porno, que l'on parle de jeu vidéo, de stream de jeu vidéo, de vidéo Youtube du stream de jeu vidéo, de vignette de la vidéo Youtube du stream de jeu vidéo, de mème tiré de la vignette de… bref, vous avez compris. SCP-173 baigne dans Internet depuis tellement longtemps qu'aujourd'hui on peut dire qu'Internet est baigné de SCP-173, et il y a de fortes chances pour que votre petit-neveu de dix ans ait déjà vu SCP-173 sans jamais avoir entendu parler de la Fondation SCP.
Plus que le wiki, SCP-173 est devenu un phénomène culturel en soi, et a laissé une image indélébile dans l'imaginaire collectif. Métastasé, son rapport original ne fait au final plus vraiment le poids… et en retirer l'image pour des questions de droit reviendrait surtout à un coup d'épée dans l'eau sans aucune conséquence : Untitled 2004 semble irréversiblement soudé à SCP-173.
Et pourtant, récemment, un double séisme est venu contrarier cette soudure ! D'une part, la suppression effective de la photographie de SCP-173, ne laissant qu'un rapport nu, sans image de remplacement par demande de Moto42. D'autre part, une avalanche de propositions de redesigns, par centaines, en guise d'hommage à ce grand départ.
Licence artistique, permis de tuer
Au fil du temps, de nouvelles questions ont commencé à prendre de l'importance au sein de la Fondation, et ont fini par trouver un écho dans les représentations. Et le plus visible de ces questionnements, c'est la licence. 173 en est l'exemple le plus flagrant.
En tant que courte histoire d'horreur destinée à se perdre dans l'absence de logs de 4chan, le fait que l'utilisation de l'image ne soit pas autorisée n'était même pas envisagée. Et en tant que premier écrit de la Fondation, il existait bien avant qu'on se soucie du fait qu'il faudrait une quelconque licence pour encadrer et protéger l'univers SCP. En quelque sorte, les débuts de la Fondation se sont faits dans un angle mort de la propriété intellectuelle, avant de se structurer lentement, à mesure que le site se développait. Il a fallu du temps pour que la licence s'impose complètement, en particulier pour l'usage des images. Cela a fait que, longtemps, images CC et non CC ont cohabité sans déranger grand monde. Une sorte de statu quo.
Mais 173 était un cas particulier : le premier, le plus populaire, le plus visible, son existence affichait au grand jour une contradiction qui passait inaperçue ailleurs. Alors, il est devenu une exception. Il a fallu contacter l’artiste, avoir sa permission, et préciser que l'image de 173 n'était en quelque sorte que "prêtée" et n'était pas sous la même licence que le reste du site. Le statu quo était rétabli, du moins en apparence, pour encore quelques années. En réalité, personne ne s'est gêné pour ne pas respecter l'exception, et en particulier la clause qui interdit l'exploitation commerciale de l'image. Il suffit de chercher "peluche scp 173" sur Google pour voir que cela n'a pas stoppé les velléités de merchandising, surtout à destination d'une communauté extérieure très peu au courant des spécificités légales propres à la Fondation. Pas vraiment un changement dans les pratiques donc, mais bien le résultat d'une lente évolution de mentalités.
Et cette évolution, elle continue. Ces dernières années, on a vu l'émergence (en particulier sur -EN) d'une politique globale de régularisation des images non conformes à la licence8. Encore une fois, cela a eu un impact sur les interprétations de 173. Car à force de voir des articles connus pour leur image en changer (avec un succès parfois aléatoire), l'idée que l'apparence de Untitled 2004 n'était pas obligatoirement celle de 173 a commencé à germer.
Dès lors, la question se pose : quel rapport entretient un rapport avec ses images ? Estimer que les images d'un rapport sont sacrifiables ou interchangeables, c'est accepter qu'elles ne sont qu'un accompagnement, de simples illustrations dont le texte pur, cœur du rapport, se passe très bien.
Or, comme dit au début de cette chronique, le cas de SCP-173 irait plutôt dans le sens inverse : un texte construit autour de sa photo, dépendant d'elle. Dès lors, peut-on vraiment la sacrifier sans casse ? Eh bien, voyons voir ce que ça a donné sur un rapport plus ancien !

Cringe.
C'est bien mal connaître Aucun Rapport — la chronique qui se penche habituellement sur les rapports ignorés du grand public — que de croire qu'elle allait se focaliser sur le plus connu d'entre eux ! Aussi je vous propose un petit interlude où nous allons ressortir un exemple passé totalement inaperçu : j’ai nommé SCP-1377 - "Parlement automate".
SCP-1377 est l’exemple type du rapport construit autour de son image, ou plutôt de ses images. Deux images qui, en l’occurrence, n’ont ni la même origine, ni aucun rapport entre elles. C’est que, plus que sur ces images, SCP-1377 se base sur le sentiment qu’elles inspirent plus que sur ce qu'elles représentent…
Je vous parlais plus haut de la vallée dérangeante dans laquelle plongeait le cerveau du lecteur qui essayait d’associer le texte de 173 et son image – mais la vallée dérangeante désigne (je suis sûr que vous la saviez déjà) plus souvent ce sentiment d’inconfort que ressent votre cerveau face à une imitation presque-réussie-mais-pas-vraiment d’un visage humain, comme dans le fameux cas du Pôle Express ou d’une statue de cire ratée. Sans trop aller dans les détails puisque cette chronique est déjà affreusement longue, nous pouvons dire que SCP-1377 est un skip à concept qui consiste essentiellement à être "la Vallée Dérangeante, le SCP", tout comme SCP-072 est "la Paralysie du Sommeil, le SCP" et SCP-292 "Déjà Vu, le SCP". Son image centrale n’est d’ailleurs autre que le visage de Saya, l’automate japonais qui est utilisé comme exemple typique de la vallée dérangeante. On pourrait débattre des heures à savoir si oui ou non bâtir un SCP sur le ressenti que donnent ses images est une bonne idée9, mais une chose est sûre : retirer lesdites images reviendraient à le condamner à mort… Or, devinez ce qu’a fait la branche anglaise ? Et oui. On se retrouve donc avec un rapport basé sur la vallée dérangeante sans vallée dérangeante. C’est un peu comme si on virait tous les jumpscares de la filmographie de James Wan : ça ne laisse qu’une coquille vide10.
Certes, me direz-vous, mais SCP-173 peut désormais compter, non seulement sur son capital sympathie, mais aussi sur des centaines, peut-être des milliers de designs alternatifs ! Il y en aura bien un dans le lot qui fera l'affaire pour remplacer l'ancien !
Vraiment ? Eh bien, laissez-moi appeler à la barre mon second témoin : SCP-682.
Nombreuses sont les personnes qui se congratulent que l’image originale de 682 ait été remplacée par cette photo de santiag échouée en Bretagne qu’ils jugent plus réaliste. “On voyait clairement que c’était des algues” disent-ils, “que c’était pas un crâne de reptile”, “qu’il y avait pas d’écailles”. Mais, heh, les gars : SCP-682 était lui aussi une exégèse construite autour de son image originale. Si l’auteur est parti sur une histoire de reptile plongé dans l’acide, c’est que c’est ce que l’image lui inspirait, et si c’est devenu un tel classique, c’est que ça convenait très bien aux lecteurs de l’époque. Certains me répondront sans doute que c’est que les lecteurs de l’époque étaient bien bêtes et que les lecteurs actuels réclament du réalisme, mais voilà peut-être bien le nœud du problème : a-t-on besoin du réalisme si on a déjà de la vraisemblance ?

"Les vaches ne ressemblent pas à des vaches au cinéma, on utilise des chevaux" — une blague basée sur le fait que certains films en noir et blanc utilisaient du lait en guise d'eau afin qu'on la voit mieux.
Je comprends tout à fait comment en voyant l’image de SCP-682 on a pu en arriver à écrire son histoire : son crâne allongé, à moitié à nu, peut effectivement faire penser à un crâne de lézard vu de loin, les dégoulinures verdâtres/brunâtres évoquent elles aussi l’acide, ou plutôt l’idée qu’on se fait de l’acide : l’acide n’est pas plus vert qu’il ne rend les matières organiques pâteuses, mais c’est l’image que nous nous en faisons dans l’imaginaire collectif. La vérité, c’est que sans contexte on a du mal à mettre le doigt sur ce que représente cette image : lorsque le rapport de SCP-682 comble ce vide, on l’accepte parfaitement, lorsqu’on nous dit très sérieusement que c’est une carcasse de béluga, on l’accepte aussi. Mais c’est bien la preuve que le réalisme n’a rien à faire là-dedans.
Je vais avoir l’air incroyablement présomptueux mais : et si SCP-682 était… une œuvre impressionniste ? Et si c’était le principe de l’art, non pas de montrer un lézard fondu, mais de prendre un crâne de béluga hors contexte et de dire "ça ressemble à un lézard fondu" ? C’est bien ce que fait le tableau "Ceci n’est pas une pipe" lorsqu’il nous rappelle qu’on regarde un tableau, non pas une pipe, mais que l’on voit une pipe malgré tout.
Remplacer une illustration impressionniste par une nouvelle photo réaliste, ne serait-ce pas plutôt une régression ? Sans doute.
Mais les versions alternatives de SCP-173 se suivent et ne se ressemblent pas toutes… Alors plongeons dans le vif du sujet, voir quelles interprétations nos fanartistes ont tiré du rapport original, et quelle forme ils ont donné au texte.
Designs, redesigns et reredesigns
Suite aux mouvements visant à régulariser les images du site, on a pu assister à une première vague de redesigns, discrète et étalée dans le temps. Les principaux efforts dans ce sens se sont fait ressentir dans le domaine du jeu vidéo, dont les productions les plus ambitieuses doivent trouver des financements pour permettre leur développement (et par conséquent ont vite eu conscience d’être borderline quant aux conditions d’utilisation de l'œuvre de Kato). Le redesign le plus marquant de cette période, c'est celui de feu CB: Unity, en 2019.



| On peut voir à travers l'évolution des concept arts la volonté de trouver un compromis, de ne pas s'éloigner trop de l'original tout en apportant une vision nouvelle, ressemblant davantage à ce qu'on attendrait d'un monstre de jeu vidéo.
Mais ce n'est qu'à partir de février 2022, à l'annonce du retrait de l'image sur -EN qu'une véritable frénésie de redesign s'est emparée de la sphère fanartistique.
On est passés, d'un coup, de l'idée que 173 n'était peut-être pas Untitled 2004 à celle qu'il ne devait pas être Untitled 2004. La nature a horreur du vide, et cela s'applique particulièrement aux fanartistes : il fallait remédier à cette vacance de l'image immédiatement, quasi compulsivement. Cela fait qu'en l'espace d'à peine une semaine, des centaines de redesigns différents ont été proposés, par des artistes débutants comme professionnels, proches de la communauté comme très éloignés11. L'abondance de ces nouvelles images permet de dégager de grandes tendances, qui en disent long sur pas mal de trucs.
La première, c'est l'émergence de nouveaux motifs en cohabitation avec d'autres, plus anciens. Ainsi, aux peintures faciales qui sont comme on l'a vu plus haut, devenues un élément très significatif de l'iconographie de 17312, s'ajoutent des motifs davantage liés au texte, comme des yeux, des inscriptions ou des traces de main. Les yeux en particulier sont extrêmement populaires, car ils transmettent de façon efficace l'idée qu'il ne faut pas rompre le contact visuel. Souvent ajoutés en rouge dans un style simple, parfois combinés avec l'inscription "don't blink", ils ressemblent à des avertissements laissés à notre intention.

| Dessin de @eggs_jae.
La seconde tendance, qui saute aux yeux dès qu'on parcourt les pages créées pour rassembler tous ces artworks, c'est que la plupart des artistes ont voulu se démarquer fortement de l'œuvre de Kato et se sont servis dans le texte pour piocher de quoi construire leur propre vision de la statue. On trouve alors plusieurs partis-pris, en fonction de ce que les créateurs ont estimé être le plus significatif.

| Montage par @HitenNoRurouni
Il y a d'abord l'idée que 173 est avant tout une œuvre d'art. Les créations explorant cette thématique se sont concentrées sur un aspect esthétique, académique, avec en particulier le motif du nu et du semi-nu féminin comme masculin. C'est un point de départ idéal pour manifester une contradiction, la codification de l'art "classique"13 formant un contraste particulièrement violent avec le côté brut, vulgaire et tape à l'œil du béton et de la peinture en aérosol. De ce contraste découle l'idée que 173 est une œuvre abandonnée, vandalisée, rejetée. Une forme de solitude qui reboucle assez bien avec le fait qu'il cherche le contact.

| Dessin de Eddybird
On peut trouver dans ces réflexions une certaine filiation avec les Anges Pleureurs, ce qui revient à boucler, en quelque sorte, un cycle.
Un autre courant a préféré explorer en priorité le fait que 173 soit en béton. Les artistes qui ont adopté cette approche semblent vouloir mettre de côté l'aspect humanoïde de la statue, pour développer l'idée qu'un bloc de béton, ça ne bouge pas.

| Dessin de @kattakombs
Cet abandon de l'aspect humanoïde au profit de la brutalité du matériau crée l'étrangeté. On se demande pourquoi un morceau de béton est mis en avant dans l'image, on essaie de se figurer comment il pourrait se déplacer et craquer des nuques, sans vraiment trouver de prise, ce qui renforce un certain inconfort. Totalement opposés dans leur parti-pris, beaucoup d'artistes ont surtout essayé de trouver une réponse à comment 173 est capable de craquer des nuques.

| Dessin par @englepsi
Dans cette optique, la mention de barres métalliques dans le rapport est particulièrement intéressante, et a été largement exploitée pour donner diverses formes de doigts, de pattes, de pseudopodes ou d'outils. En faisant ressortir le côté armé du béton, on a pu multiplier les extrémités, ce qui rend tout de suite 173 plus effrayant. Et en quelque sorte plus digne d'être l'icône de l'horreur moderne qu'il incarne. Et là on retombe sur un questionnement. Est-ce que 173 a besoin d'avoir l'air effrayant pour faire peur ?
Une question au final un peu paradoxale, étant donné que la statue initiale n'était absolument pas conçue pour faire peur, et que la peur était davantage un potentiel enfoui que Moto42 a su faire ressortir.
Dès lors, vouloir représenter SCP-173 comme quelque chose qui fait peur, ne serait-ce pas un peu contre-productif ? Si, totalement — et certains redesigns ne l'ont pas compris.

À gauche : l'expression vide et froide d'une fin incessante. À droite : "agrougrou, je suis bloqué èné"
SCP-173 n’a rien à gagner à avoir l’air méchant : c’est littéralement une menace qui est inoffensive lorsqu’on la voit et qui n’est dangereuse que lorsqu’on a le dos tourné. De grandes dents et une carrure d’athlète sont complètement contre-productives pour représenter une créature qui n’attaque que des proies impuissantes – déso pas déso, les Anges Pleureurs eux-mêmes font bien plus peur lorsqu’ils ont l’air passif et inarrêtables que lorsqu’ils deviennent vilains toutes griffes dehors14. Au contraire, l’imaginaire horrifique a depuis bien longtemps compris que détourner les codes de l’innocence, rendre dangereux quelque chose qui a l’air inoffensif, est bien plus efficace pour déstabiliser le spectateur – spectateur qui sait naturellement qu’un enfant au coin fera n’importe quoi dès qu’il aura le dos tourné.
Là encore, c'est "l'effet Squid Game", la perversion de ce tout ce que l'on trouve rassurant dans ce monde. Mais pas que.

Signe de son temps, l'inévitable version Backrooms.
Comme nous le disions dans le numéro de septembre dernier, même l'horreur sur Internet a son histoire de l'art… et il s'avère que beaucoup, beaucoup des redesigns reprennent les codes actuels d'une horreur à la mode. On relèvera les versions tentaculaires qui ne s'est jamais vraiment perdue entre Slenderman et Sirenhead, mais aussi le très (trop) populaire style "nébuleuses de formes qui flotte dans les airs" qui a explosé depuis la mode des Biblically Accurate Angels en 2019.
Des concepts évidemment très cools puisqu'ils sont de notre temps, mais qui, en le remettant à jour, trahissent le concept original de SCP-173, qui brillait par sa simplicité naïve en en faisant une créature imposante et lovecraftienne parmi tant d'autres. C'est le drame de tous les remakes : enchaînés à l'air du temps comme à leur modèle original, ils ne parviennent que rarement à créer quelque chose de vraiment inspiré.
Rester dans le même registre serait peut-être même pire : SCP-173 est, aux côtés de Slenderman, un des fondements de la culture horrifique numérique. Reprendre dix ans plus tard les codes de l'horreur urbaine qu'il a aidé à définir, ne serait-ce pas en faire une caricature de lui-même ?
Finalement ce qui ressort de cette vague de redesigns, c'est que l'équilibre entre le cool, le sens et le décalage horrifique est particulièrement complexe à trouver, et qu'à force de vouloir se démarquer, parfois beaucoup d'interprétations finissent par se ressembler.

| Panopticon, par Stephlynch
Car si tous ces redesigns sont aussi imprégnés des codes de l'horreur moderne, au point de parfois s'en retrouver prisonniers, c'est en partie dû à 173, dont l'existence a contribué à les inventer. En un mot comme en cent : on ne peut parfois pas revenir sur nos pas.
Alors, nous vous le confessons, les auteurs de cette chronique ne sont pas d'accord sur le sort à faire à SCP-173. L'un trouve que l'image originale était non seulement irremplaçable, mais était le rapport, tout autant si ce n'est plus que ses trois maigres paragraphes ; l'autre estime que SCP-173 a désormais atteint un stade mythologique, dont la forme et le récit changeront au fil des répétitions, et que la disparition d'une image officielle le rend libre d'être réinterprété et de survivre de tant de façons possibles.
Bien que très opposés, ces points de vue ne sont pas forcément contradictoires… aussi, j'aimerais vous laisser sur une théorie obscure et oubliée. Connaissez-vous l'évhémérisme ?
"L'évhémérisme est une théorie selon laquelle les dieux seraient des personnages réels, sacralisés après leur mort, leur légende étant embellie jusqu'à devenir une sorte de symbolisme absolu et universel." — Wikipédia
SCP-173 est mort, comme Jésus et Gilgamesh avant lui. Mais, comme Jésus et Gilgamesh, qui sait de quoi on parlera dans quelques années quand on évoquera SCP-173 ?
Espérons qu'on fasse toujours des statues à son effigie.
Dans la famille 173, je voudrais…
Avec la suppression de l'image de SCP-173, un véritable raz-de-marée de redesigns de la Statue a submergé les réseaux sociaux. Des versions parfois très différentes, parfois très ressemblantes, des araignées d'acier, des blocs rectangulaires, des angelots en béton… Mais SCP-173 n'a pas attendu sa disparition pour inspirer les foules !
Premier SCP de la Fondation, inspiration de tous les autres, le père fondateur a tout naturellement été repris, parodié et exploré par des auteurs de toutes les branches. Petit florilège de la famille qui s'est développée autour de lui.

Crunchette
La Femme — Crunchette
Il était un temps ancien où le wiki était encore sauvage, indompté, et pour le moins… fanfictionneux. C'était en l'an 2012 : le Joueur du Grenier était gros, les rage comics encore à la mode, Gangnam Style dominait la piste sonore de la planète et nul ne pouvait alors échapper à la Rule 63 d'Internet. "Pour chaque personnage masculin qui existe, il y a une version féminine." dit-elle. C'était inévitable. Et c'est ainsi que dans Docteur Tulamour, SCP-173 rencontra l'âme sœur — qui n'est autre que Untitled 2005, la statue suivant Untitled 2004.
Surnommée "Crunchette" par les fans de l'époque, on ne peut que regretter que le lore de cette version féminine qui brise les nuques et les cœurs n'ait pas été développé par la suite… Quoi ? Comment ça on ne peut pas ?

SCP-5371
Le Père - SCP-5371
Le Département des Anormalités est un endroit étrange : il ne propose pas vraiment d'origine aux grands classiques des SCP, plutôt une trace en creux, un écho de là d'où ils viennent.
SCP-5371 — "Cette Sculpture - L'Originateur" est tout l'inverse de SCP-173 : le regarder donne envie de détourner le regard et, sitôt qu'il sera hors de vue, il tentera de fuir loin du spectateur. Sans compter l'état de ses cervicales… Que peut-il craindre de la sorte ? Quelque chose qu'il aurait sculpté, comme il s'est sculpté lui-même ? Où est passé son ciseau de sculpteur, qu'une note dit être "en liberté" ? Le lecteur est libre d'interpréter le rapport comme bon lui semble.
SCP-5371 n'est d'ailleurs pas le seul SCP du Département des Anormalités lié à SCP-173 : SCP-3220 - "Panoptique II" nous présente un étrange site japonais, aux cellules remplies de statues en béton. Toutes sauf une. Qui est vide.

Le Legs 173
L'Arrière-grand-mère - Le Legs 173
Qui était là en premier : SCP-173 ou les Anges Pleureurs ?
À ce débat rejoué en boucle pendant des années et des années, le canon Sous le Monde assène une réponse radicale : aucun des deux, ils étaient tous précédés de plus d'un siècle par La Vénus d'Ille, une nouvelle écrite en… 1835 ! Dans cette histoire, une antique statue de Vénus prend vie lorsque personne ne la regarde, et finit par tuer ses amants en les écrasant sous son poids. Plutôt évocateur, non ?
Sous le Monde part de l'idée qu'en fiction rien ne se crée, tout se transforme, et a donc naturellement fait de la Vénus d'Ille l'équivalent de SCP-173, hérité d'un autre temps et conservé au Musée du Louvre sous le nom de "Legs 173".

SCP-1731-JP
Le Cousin - SCP-1731-JP
L'œuvre qui a donné naissance à la Fondation SCP nous vient du Japon — difficilement donc pour la branche japonaise de lui rester indifférente !
À vrai dire, pour son premier anniversaire, le site japonais avait organisé un concours sur le thème de l'art, avec à la clef la publication sur meilleur SCP à l'emplacement SCP-173-JP ! Mais, si le grand vainqueur n'a au final pas grand chose à voir avec la Statue, la photo de SCP-1731-JP - "Statue d'argile vide", vous rappellera sûrement quelque chose…
Toujours collé contre un mur ou un poteau, SCP-1731-JP attend que vous approchiez : si SCP-173 attend que vous cligniez des yeux pour allez vers vous, observer SCP-1731-JP vous donnera compulsivement envie d'aller vers lui… moment auquel la trompe qui fait office de tête à la statue se décollera du mur pour vous ingurgiter. Eh oui, chacun sa façon de tuer !
Les GdI-balls présentent…
Chaque mois à partir de ce début d'année, explorez un nouveau pan du lore de la Fondation grâce aux GdI-balls ! Envie de participer ? Vous pouvez soumettre vos propres dessins à la Gazette en contactant DrGemini ou
Dr Lekter pour les faire passer à la Gazette le mois prochain !

Votre 173, plutôt moderne ou plutôt classique ?
L'Académie Médicis des Arts Occultes
Dans cette édition spéciale SCP-173, nous ne pouvions pas ne pas parler d'Et Maintenant On Est Cools ?, le collectif d'artistes anormaux et anarchistes que l'on appelle "anartistes" et à qui de nombreuses histoires attribuent la paternité de SCP-173. Tout le monde connaît Et Maintenant On Est Cools ?, c'est un des plus vieux Groupes d'Intérêt existant. Mais connaissez-vous leur pire ennemi ?
Il s'agit d'un GdI italien, l'Académie Médicis des Arts Occultes, du nom de la très célèbre famille de mécènes qui tout au long de la Renaissance finança les plus grands artistes au monde : Donatello, Raphaël, Michel-Ange, Botticelli… Autant vous dire que son Académie a le goût des belles choses.
Mais autant vous dire que si l'Académie Médicis aime l'art anormal classique, élégant et fait suivant les règles de l'art, les artistes d'EMOEC? aiment l'art contemporain qui bafoue toutes les règles — celles de la physique, bien sûr, mais aussi celles du bon goût. Une rivalité qui va, je l'espère, déborder sur notre belle branche française — elle a en tout cas déjà donné quelques histoires intéressantes en italien, parmi lesquelles le tout récent conte Pax Anartistica qui lui attribue la création… de SCP-173, quelle surprise !15
Et vous, entre l'anart classique et l'anart contemporain, quel camp choisissez-vous ?
Créations du mois
- SCP-598-FR — Maman Colère, Maman Jalouse par
Seed Holt
- SCP-569-FR — Gloryhole dimensionnel par
Dr Lekter
- Dossier d'installation : Le Site-Bayard par
AgentSculder
- Discographie De Midnight Blossom par
DrJohannes
- Lendemain de soirée par
Maeltudal
Traductions du mois
- SCP-4231 — La Maison Montauk par
Dr U N Owen
- SCP-2014-UA-EX par
Alwaid,
macro_au_micro et
Herolles
- Les chiffres mentent par
Cauchynambour
- SCP-049-PT — <NULL3:.P4RT> par
Frigidaire
- Blues de la Horde d'Or par
Dr Ryleh
Autres pages d'intérêt : Groupes d'Intérêt Ukrainiens par DrGemini.
Sélection communautaire via une page de vote ouverte mise à jour toutes les fins de mois — rejoignez-nous pour être informé·e directement au moment des votes !
Rédaction :
Administration :
Partagez-nous vos avis sur ce numéro, vos remarques et vos questions en tout genre sur la Gazette ou l'univers et le fandom SCP en général auxquelles notre équipe se chargera de répondre ici même ou dans le numéro prochain !
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Crédits
Titre original : Gazette d'Aleph : Numéro 42
Auteurs : DrGemini, Dr Lekter et Seyph
Date de publication originale : 7 mars 2022
Images :- "173-aguicheur.jpg" de Norodoggo
- "173-beton-2.jpg" de Englepsi
- "173-beton.png" de Eggs_jae
- "173-postit-096.png" de Aethris
- "173-redesigns-abcd.jpg", "173-redesigns-efgh.jpg" et "173-redesigns-bis.jpeg" de Unity
- "173-sexy.jpg" de Ashley Sarroca
- "173-slm.png" : Legs 173 - Musée du Louvre
- "anges-pleureurs.png" : Doctor Who - BBC
- "buste-f.jpg" de Eddybird
- "eyepod-173.jpg" de IlangKape
- "peinture-izumi-kato.jpg" : Untitled, 2020 - Izumi Kato
- "ruines-beton.png" de Kattakombs
- "scp-173-cb.png" - jeu-vidéo Containment Breach - ** Regalis
- "scp-173-cellule.jpg" de **Ichi-ka
- "scp-173-creepy.png" de KiwiHermit
- "simpsons-cows.png" : série télévisée Les Simpsons - Fox
- "statue-arbre-bizarre.png" : __[[http://scp-jp.wikidot.com/scp-1731-jp|SCP-1731-JP]]]__ - k-cal
- "statuette.jpg" de HitenNoRurouni
- "gdiballs-awcy-amao.png", "francois-san-trez.png", "miniature-copie-173.jpg", "panopticon_test_2.png paquet-cachuetes-173.jpeg", "peanut_frequence.png" et "recreation_du_premier_scp-173.png" : Informations manquantes
- "173-tentacules.png" et "173-segments.png" : [DONNEES SUPPRIMEES]
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C'est toujours avec plaisir et patience que je lis la gazette.
Je n'exprime pas habituellement ce que je ressens ni ce que j'en retire. Je me contente de consommer. Mais cet édito a touché quelque chose en moi qui a fait raisonné l'envie de m'exprimer. Peut-être était-ce le côté INT, les sujets géopolitiques actuels, ou bien l’article sur les statues qui m'a beaucoup plu. Je ne sais pas vraiment.
Bref, c'est avec humour que vous arrivez à transmettre des informations et c'est toujours appréciable. Je me contente donc de vous dire merci pour ce numéro, pour les précédents et pour les prochains.