Gazette d'Aleph : Numéro 40
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Gazette d'Aleph

Décembre 2021

fabienne.jpg



L’Édithaumiel

par Fabienne Exégèse, uchroniqueuse à la Gazette d'Aleph.

Originaire de la ligne temporelle U51003, où l'information est un devoir et où chaque citoyen est de facto journaliste, Fabienne Exégèse a très tôt découvert qu'elle avait la capacité de traverser le tissu de la Réalité elle-même, mais pas d'obtenir la carte de presse que chaque enfant obtient normalement fin CM2. Paria dans son propre monde, elle voyage depuis de réalité en réalité, à la recherche d'une ligne temporelle où elle pourra gagner sa vie en tant que pigiste. Une quête sans fin, donc, mais qui a apporté à la Gazette d'Aleph une précieuse collaboratrice, qui use de ses capacités hors-du-commun en échange d'un repas chaud de temps à autres.


« Résolutions Permanentes »

Je suis scandalisée.

Comme l'année dernière à la même date, me voici fraichement revenue de la dimension U20098 (une dimension essentiellement peuplée d'huitres, mais leurs Sex on the Beach sont du tonnerre), et quelle ne fut pas ma surprise en rattrapant mon retard de constater qu'il n'y avait pas eu d'Édithaumiel aux numéros de septembre et d'octobre, nonobstant la promesse que j'avais faite au nouvel an dernier !

Ce n'est pourtant pas faute d'avoir eu Trump dans les pattes, ni le coronavirus qui prend de plus en plus les allures d'une blague trop racontée. La dimension U29901 en est pourtant au variant Ticonderoga1 et arrive très bien à sortir une Gazette par semaine. Alors quoi, hein ? Ne me dites pas que vous non plus n'arrivez pas à tenir vos résolutions du nouvel an ? Des mondes entiers ont été perdus de la sorte.

Pensons à l'univers U13448, dangereusement sous-peuplé, dont les habitants avaient fait vœu de prendre une douche en 2021. Zéro natalité. Pensons à l'univers U55802 qui, face à l'approche imminente d'un météore, a sorti une trentaine de films satiriques dénonçant l'inaction généralisée, avant de réaliser que même un score élevé sur Rotten Tomatoes ne protégeait pas du feu cosmique. Pensons aussi à l'univers U10036, qui avait fait vœu d'arrêter la multiplication exponentielle des Édithaumiels qui envahissaient le paysage médiatiq—bon, celui-là est un mauvais exemple, mais ce qu'il faut retenir c'est qu'ils sont aujourd'hui tous morts parce qu'ils n'ont pas su s'en tenir à leurs résolutions.

Réagir, décider, créer, c'est une chose, mais l'action, la vraie, se fait par la persévérance, même lorsque le frisson des débuts est passé et que surviennent les aspects les plus rébarbatifs et chronophages de l'entretien d'un projet. Prenez l'exemple d'un petit univers alternatif pas très loin d'ici, où je suis passée prendre un sandwich avant de me rendre à la Gazette. Je ressors de la boulangerie, mon poulet-crudités à la main, et qu'est-ce que je vois autour de moi ? Des séries de contes inachevées. Des canons enlisés. Des Groupes d'Intérêt esquissés. En bref, un monde ravagé, quasiment apocalyptique, fait de maisons sans toits et de procès sans verdicts. Voulons-nous vraiment finir comme eux ?

Et si 2022 voyait la fin du fil rouge d'Après-Aleph ? La reprise des contes sur la Gendastrerie ? Un début d'âge d'or pour la branche internationale, par trop d'aspects moribonde ? Et si 2022 voyait l'aboutissement de vos projets empoussiérés, de vos fonds de tiroir, de vos puzzles incomplets ? Des oubliés de 2021, 2020, 2019…

2022 n'a pas besoin d'être une énième page qui se tourne. Autant la consacrer à finir d'écrire les pages des années précédentes — car après tout, quel intérêt d'arriver à la fin du livre s'il en manque des chapitres ?

Alors, attention à vos fesses. Je repasserais l'année prochaine, voire avant… et s'il n'y a pas d'Édithaumiel le mois où je débarque, ça va chauffer ! J'ai d'innombrables cousins à travers le multivers, prêts à vous faire passer le goût d'entamer de nouveaux projets. Et autant vous dire qu'eux ne font pas les choses à moitié.

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