La perspective humaine est en effet une caractéristique prédominante de la perception de l’anormal. Je l’ai abordé plusieurs fois de façon peu développée, par l’Approche Perceptive de l’Anormal ou les exemples d’anomalies EX.
J’aurais pu parler de SAPHIR, il y avait d’ailleurs un petit apparté sur le Syndrome de Filbuson dans le premier jet. Comme pour chez les scientistes, on retrouve aussi une question de perception dans les choses du monde, même quand il s’agit de la méthode scientifique. On peut donc tout rapporter à la perception au final.
Il y a effectivement des questions anthropologiques à se poser, l’influence de la culture ou même de la parole (un langage plus varié permettant une plus grande compréhension du monde et inversement, 1984 ou l’Hypothèse de Sapir-Whorf à l’appui). Certaines civilisations peuvent ne pas être en mesure de voir certains phénomènes anormaux mineurs, parce qu’elles sont confrontés à un syndrome de Filbuson léger lié à leur culture, ou parce qu’ils comprennent ces phénomènes et les considèrent comme normaux. Tout tend à penser que les Nälkä considéraient leurs manipulations de la chair comme normales. On peut s’imaginer des civilisations entières considérant des phénomènes anormaux comme normaux, et vivant avec eux tout en les intégrant naturellement au fonctionnement de leurs sociétés. L’animisme pourrait être, in-universe, un ensemble de cultes de phénomènes anormaux.
Si avec la sécularisation on peut penser que l’anormal (par extension grossière des phénomènes liés aux croyances) tend à devenir de plus en plus difficile à accepter, à expliquer, on peut aussi y voir une aubaine pour le Voile, puisque cela instaure une forme d’hermétisme aux phénomènes anormaux (même si la réalité n’est pas aussi simple). Pour raccrocher avec l’idée précédente, on peut imaginer des phénomènes anormaux que toute l’humanité est incapable de percevoir, pas à cause d’un quelconque effet mémétique mais bel et bien à cause d’une affaire de conceptualisation du monde et de paradigme. En poussant plus loin, on peut aussi imaginer creuser les limites de la perception de l’humain pour se rendre compte qu’il existe certaines anomalies que nous sommes incapables de percevoir. Des mémétiques destinés à d’autres types d’organes sensoriels, à certains animaux par exemple ? Ou même à des plantes ?
Quoi qu’il en soit, il y a un énorme filon à aborder la question de l’anormal à travers l’histoire sociale. C’est un peu ce que fait le canon Troisième Loi, quelque part, en contant les perturbations du Voiles liées à la recherche technologique, bien que cela reste une époque très proche de la nôtre. J’abordais aussi à un moment la question de fossiles d’anomalies, ce qui pourrait aussi être très intéressant : y a-t-il des fouilles organisées par la Fondation, ou une FIM chargée d’identifier des fossiles anormaux plus vites que les chercheurs sur un site de fouilles courant ? Qui sait quel impact un fossile d’anomalie pourrait (ou a pu ?) avoir sur la communauté scientifique. En poussant encore plus loin avec ce que j’ai pu dire précédemment, peut-on imaginer des effets mémétiques qui ne fonctionnaient que sur certaines espèces disparues ? Des anomalies conçues à un moment donné qui n’ont plus d’intérêt aujourd’hui, même mieux, qui sont aujourd’hui d’autres phénomènes toujours anormaux mais normaux pour nous qui n’avons pas les capacités pour les percevoir ?
Je digresse un peu et de façon peut-être un peu décousue mais c’est un sujet tellement vaste que l’on peut difficilement parler d’un de ses aspects sans soulever d’autres questions.