Fanatiques Facétieux

Jakeob Aldon fronça les yeux tandis que la Voie du Nettoyeur s'effondrait derrière elle, la non-lumière de l'espace personnel de l'être baignant son atelier de sa non-lueur éthérée. Elle frissonna, sa chemise détrempée par Everett. Elle prit l'ourlet dans ses mains et le pressa, essorant le furet de ses vêtements. Il se rassembla en une flaque à ses pieds avant de reprendre sa forme animale.

Le filtre du Nettoyeur résonna d'un cliquetis métallique pendant quelques instants comme s'il prenait une inspiration pour parler, et lors de son expiration la pression qu'il exerçait sur la pièce commença à se dissiper. Elle entendit la porte du salon s'ouvrir puis se fermer, et la présence disparut complètement. Maintenant que la pièce était correctement éclairée, son attention se porta sur la statue sur laquelle elle avait travaillé plus d'une semaine plus tôt. Elle était restée intacte tout ce temps, tandis que l'argile avait séché et la magie qu'elle contenait s'était dissipée.

Elle était pas si mal, finalement. Les mains étaient peut-être un peu trop petites, et la mâchoire un poil trop dessinée. Mais tout compte fait, c'était une sculpture décente. Aldon hocha la tête, se débarrassant mentalement du bagage qu'elle avait presque totalement oublié.

Elle prit une inspiration pour dire quelque chose, réalisa qu'il n'y avait personne à qui parler, et expira simplement. C'était une statue correcte. Elle fit un câlin à la statue correcte, posant sa joue sur le dôme écaillé. Elle poussa un soupir à demi satisfait et inspira de la poussière d'argile. Peut-être que ce n'était pas une statue si bien que ça. Peut-être que c'était une statue débile. Elle renforça sa prise sur la statue débile et la souleva.

Le suplex qu'elle avait envisagé s'avéra rapidement être une mauvaise idée puisqu'elle se rappela que non seulement les statues étaient lourdes, mais que celle-ci était alourdie par du béton. Alors, plutôt que de réduire son dos en miettes, elle tourna ses hanches et projeta le mastodonte débile sur le côté. L'argile vola de la base de béton, et le bras droit se fendit juste au-dessus du coude.

Aldon fixa le désastre qu'elle avait provoqué, la culpabilité rongeant son estomac. Non, attendez, c'était plutôt la faim. Sans doute. Elle s'arrêta sur le pas de la porte, se demandant depuis combien de temps elle était partie. Sans doute un bon bout de temps. Everett mordilla sa cheville et elle le ramassa, puis ouvrit la porte.

Le salon/chambre/salle à manger était propre, pour une fois. Aldon n'était pas tout à fait sûre de pourquoi cela la fit paniquer, mais pendant trois bonnes secondes, elle fut trop troublée pour capter les deux autres personnes dans la pièce. L'une d'elles était Finnegan, évidemment. Il vivait ici, c'était normal. Cependant, l'homme à qui il parlait avait beaucoup moins de raisons de se trouver dans l'appartement d'Aldon.

Daniel Navarro la dévisagea et lui présenta son sourire stupide d'employé de la Fondation.

"Qu'est-ce tu fous là ?" lâcha Aldon.

"J'habite ici," répondit Finnegan.

"Mais non, pas toi, espèce de dégénéré. Lui ! Il fait partie de la Fondation !"

"Oh. Ouais, je sais." Finnegan fit un signe de main dédaigneux à sa colocataire. Aldon fixa le gantelet métallique attaché à son poignet pendant quelques instants avant d'envoyer un regard noir à Navarro.

Navarro la salua d'un petit geste amical. Quel connard. "Ravi de te revoir également, Allie."

Une réplique tenta et échoua lamentablement à venir. Aldon trouvait qu'il lui était de plus en plus difficile d'être en colère contre lui, ce qui lui donnait juste envie de le détester encore plus. Le sentiment finit par s'effondrer sur lui-même, ne laissant qu'une sensation d'apathie vide avec laquelle Aldon n'était que trop familière.

"Ouais, salut," soupira-t-elle. "C'est quoi ce gant du futur ?"

"C'est quoi ce putois ?"

"Ce quoi ?"

Finnegan désigna Everett. "Ton nouveau pote."

La voix d'Aldon monta d'une octave. "Le furet ?"

"Je ne crois pas que ce soit un furet."

"On s'en fout. Il se transforme en eau. Bon alors c'est quoi ce gant ?"

Finnegan fixa la créature pendant plusieurs secondes avant de hausser les épaules. Il leva sa main gantée, lui montrant sa paume. Il tira sur un cordon qui dépassait de l'arrière du gant et parla avec un mauvais accent anglais.

"Tape ma main."

La main d'Aldon se leva lentement. Ses yeux allèrent du gant de métal au visage de Finnegan. Un coup d'œil à Navarro ne lui valut qu'un sourire stupide. Elle soupira et en topa cinq à Finnegan.

Ou essaya, du moins. Sa main s'arrêta à plusieurs centimètres du gant, frappant directement du bruit physique. Les nerfs de sa main flambèrent, confus, alors qu'ils étaient bombardés de notes de différents instruments. Les neurones s'agitèrent en rythme avec la mélodie en transmettant les messages à son cerveau. Les paroles rebondirent sur sa langue pendant un moment tandis que son cerveau essayait de s'adapter à la synesthésie. Elle retira sa main et fixa sa paume, son corps la picotant encore d'échos solides.

"Je crois que tu viens de me rendre mélomane. Refais ça."

"Je ne suis pas sûr que l'exposition répétée soit une bonne idée," dit Finnegan. Il leva sa main haut en l'air lorsqu'Aldon essaya de la frapper tout de même. "Allie, non. Méchante Allie. Couchée, petite."

"Alors dis-moi au moins qu'on a à bouffer," exigea Aldon, ses bras enroulés autour du sien.

"Il y a des restes de chez Uncle Larry dans le frigo, si tu en veux."

Aldon se libéra et tapa vivement dans ses mains. Elle courut à la cuisine et Everett sauta sur le plan de travail.

"Vous connaissez un Uncle Larry près d'ici ?" demanda Navarro.

Finnegan baissa sa main avec hésitation. "Ouais, à l'intersection de la Sixième Avenue et de… la rue McClintock, je crois. Tu connais cette chaîne ?"

"J'y ai jamais été moi-même, mais j'en ai entendu du bien." Navarro sortit un stylo et un bloc-notes d'une de ses poches et écrivit rapidement une note pour lui-même. Il le referma tandis qu'Aldon ouvrait le micro-ondes. "Donc. Allie. Comment ça s'est passé ?"

Elle décida d'atomiser la nourriture. "Pas trop mal. J'ai fait une grosse statue pour leur culte d'art à la con."

Navarro s'arrêta en plein grattement de son menton barbu. "Culte d'art ?"

"Mouais, ils sont sur un gros truc avec une église," dit-elle. Elle posa son coude sur le plan de travail. "Rien de trop extravagant, un peu de verre soufflé et un paquet de bancs d'église."

"Et tu as sculpté une statue de… quoi, exactement ?"

"Oh, détends-toi, mec. J'ai pas fait un Cthulhu ou un autre truc à la noix. Même s'ils ont menti et que leur argile était magique, le pire qu'ils auront sera un grand mec sans visage avec des proportions nazes."

Navarro hocha la tête. Il se frotta la nuque et acquiesça à nouveau. "Ouais, d'accord. Bon, nous avons leur localisation et ils ne semblent pas sur le point de faire un truc trop dangereux."

"Euh, comment-" Le micro-ondes commença à sonner avant qu'elle ne puisse prononcer la question. Elle appuya sur le bouton d'arrêt et ouvrit la porte. "Comment vous savez où ils sont ?"

Navarro sourit d'une façon significativement moins amicale et bien plus malicieuse que ses sourires précédents. La paupière inférieure gauche d'Aldon tressaillit, et elle était assez certaine que ce n'était pas à cause de la chaleur du plat. Le sourire de Navarro s'élargit.

"Foutus magiciens," marmonna Aldon avant de refermer brutalement le micro-ondes. "Alors c'est tout ? On est bons ? Ou faut que j'infiltre la CIA, maintenant ?"

"À vrai dire, j'ai parlé de toi au FBI," répondit-il nonchalamment. Il se mit à rire à cause du regard qu'elle lui lança. "T'en fais pas, c'est pour ton bien."

Il lui fallut beaucoup de concentration pour qu'elle réussisse à ne pas lâcher son plat. "Tu- tu as réussi à avoir une autorisation ou un truc comme ça ? Je vais pouvoir avoir un machin magique ?"

Il grimaça. "Malheureusement, non. Bien que tu ne puisses pas utiliser d'anomalies actuellement confinées par la Fondation, ils sont OK pour regarder ailleurs si tu le fais toi-même. Donc si tu te retrouves soudainement en possession de deux chromosomes X, l'U2I te couvrira. Apparemment, trifouiller des archives gouvernementales américaines est beaucoup plus facile quand on travaille pour ledit gouvernement."

"Oh." Elle posa le plat sur le plan de travail. Sa bouche dansa de gauche à droite avant qu'elle ne le regarde à nouveau. "C'est déjà ça, non ? Plus que je ne pouvais réussir à avoir par moi-même. J'imagine que ça allait toujours être un problème, juste l'un de ceux qui viennent seulement après que j'aie vraiment changé."

"Ouais. Tu devrais recevoir des informations de contact par courrier bientôt. Mis à part ça, je ne peux que te conseiller de faire profil bas. Pas trop envie de revenir te pourchasser. Du coup, à la revoyure. Héhé."

"Hein ? Tu te barres comme ça ?"

Il se glissa jusqu'à la porte. "Ouais, je me suis dit qu'il valait mieux que je vous foute la paix. Je suis sûr que l'hospitalité de Finnegan se tarit après toutes ces heures. Je reste dans le coin, cela dit. À plus."

Finnegan hocha la tête et Aldon lui fit juste un signe de la main sans dire un mot tandis que l'agent sortait. Aldon fixa la porte, le sol, Finnegan, puis sa nourriture. Peut-être que c'était tout, finalement. Mission Accomplie. Elle prit une fourchette dans le tiroir et piqua un bout de poulet. Il avait le goût de la victoire.

Et l'arrière-goût bien particulier de la sonnerie de son portable.

Elle fouilla dans sa poche et le sortit, plissant les yeux en regardant le petit écran. C'était Felix. Résistant à l'envie de grogner sur l'appareil, elle l'ouvrit et mit une des extrémités près de son oreille.

"Yo."

"Allie ! Faut que tu viennes à la Bibliothèque tout de suite, on a un problème- OK, une urgence et- bordel de merde ! Allie, grouille."

"Putain de bordel de couilles."

Aldon referma le téléphone et inspira profondément. Elle laissa l'air ressortir, doucement, lentement. Ç'aurait été facile de juste l'ignorer. Physiquement, du moins. Ignorer l'appel ne demandait aucun effort à son corps. Ignorer le regard que lui lançait actuellement Finnegan était, cependant, bien plus difficile.

Finnegan s'avança tranquillement et prit un peu de nourriture dans le plat. "Laisse-moi deviner. Ils ont menti à propos de l'argile pas magique ?"

"Je sais pas quel genre de merde ils ont fait, mais ils ont merdé, et bien. Une bonne grosse merde, comme d'habitude. Raahh. J'ai trop faim et je suis trop crevée pour faire ça." Aldon se massa les tempes. "Notre Voie est rapide, hein ?"

"Plutôt, oui."

"Et on devrait sans doute aller les aider, hein ?"

"Même si ça va très certainement être pénible, oui. Sans doute."

Aldon soupira. "OK. Merde de merde. Allons-y."

Finnegan inclina la tête sur le côté. "Souhaiterais-tu dire merde quelques fois de plus ? Ou est-ce que tu as réussi à tout faire sortir ?"

"Je t'emmerde," cracha-t-elle. Après un court silence, "OK, ouais, c'était tout."

"Finis ton assiette, je vais chercher les bouteilles de sang."

"Ouiii, papa."

Elle embrocha un autre bout de poulet et se dirigea en traînant les pieds vers l'endroit où Everett s'était perché. Le putois/furet renifla sa nourriture et feula. Aldon haussa les épaules et se fit un devoir de tailler en pièces son repas. Pendant ce temps, Finnegan récupéra deux petites bouteilles en verre dans la salle de bain, toutes deux pleines de sang. Aldon fixa son sang pendant plusieurs secondes avant de reprendre son repas. Finnegan rassembla ensuite plusieurs livres et pochettes de CD et les laissa tomber dans un vieux sac à dos noir d'Aldon.

"Tu crois que ces trucs seront utiles ?" demanda Aldon. Finnegan haussa les épaules. "Bon, autant être préparés, j'imagine. On emmène les golems ? Je pourrais sans doute matraquer Felix avec. Et on devrait sans doute prendre des trucs pour se battre plus généralement, je suppose."

Finnegan gloussa et rassembla les petits humanoïdes. Ils étaient neuf, maintenant. Il les posa dans le sac. Après avoir fouillé l'appartement du regard à la recherche d'autres choses utiles, Finnegan balança le sac par-dessus son épaule.

"Nous avons surprenamment peu d'armes," dit-il.

"Ouais, pas'que tu sais que les artistes sont connus pour ça. Posséder des tas d'armes prêtes au combat."

"Ce n'était qu'une simple observation."

Elle fit un sourire en coin. "Une observation bête, si tu veux mon avis."

Il se racla la gorge. "…Certes."

"Tu essayais de gagner du temps pour trouver une réplique cinglante ?" demanda-t-elle, se glissant jusqu'à lui, les bouteilles en main.

Il pencha sa tête en arrière et grimaça. "Peut-être."

Elle lui tendit la bouteille contenant son sang, qu'il attrapa sans la regarder. Pendant qu'elle riait bêtement, Aldon enleva le bouchon en verre avec un petit "pop" et se tamponna le sang de son ami sur les extrémités de ses doigts, excepté les pouces. Elle la reboucha et posa le contenant sur le plan de travail. Finnegan l'imita avec la bouteille contenant le sang d'Aldon. Puis ils se fixèrent pendant quelques secondes.

Aldon sourit, en partie à cause de ce qui allait suivre et en partie parce qu'Everett venait de grimper dans le sac à moitié ouvert.

Ils se placèrent côte à côte avec un ou deux mètres d'écart entre eux, fixant tous deux le mur contre lequel était situé l'ordinateur de Finnegan. Finnegan poussa un soupir et Aldon allait d'avant en arrière sur ses talons. Il passa son bras dans la deuxième sangle du sac et les ajusta.

À l'unisson, ils levèrent les bras et les tendirent à l'opposé l'un de l'autre, parallèles au sol. Toujours en synchro, ils firent un pas de côté l'un vers l'autre, rabattant leurs bras d'un grand geste jusqu'à ce que leurs doigts se touchent presque. Ils ramenèrent leurs bras à l'opposé l'un de l'autre, toujours parallèles au sol, mais cette fois, ils poussèrent sur leurs genoux opposés pour revenir l'un vers l'autre. Ils tapèrent du pied par terre et se penchèrent l'un vers l'autre, frappant leurs jointures ensemble avec leurs doigts étendus.

Le sang au bout de leurs doigts étincela et projeta des étincelles, puis se tordit en runes qu'aucun d'eux deux ne comprenait vraiment. Les seize symboles se plantèrent dans l'espace autour d'eux, s'y accrochant et le déchirant. Le duo tira sur la trame de la réalité, tournant sur eux-mêmes et l'attirant avec eux. Ils virent disparaître de plus en plus de bouts de leur salon en s'entourant chacun dans les replis jusqu'à ce qu'ils frappent leurs mains ensemble. Ils lâchèrent le tissu de l'espace-temps déchiré et se retrouvèrent dans leur Voie.

Bien que les lois qui gouvernent habituellement la conduite de l'existence disent que le volume autour d'eux devrait correspondre à celui qu'ils avaient arraché à leur appartement, ce n'était pas le cas pour leur Voie. Leur Voie était en grande partie indéfinie, avec des fragments d'idées et de personnalité jetés ça et là, mais elle était en grande partie vide. Ils n'avaient pas encore vraiment trouvé leur voie, et elle ne s'était donc pas encore ancrée pour de bon. Des statues et des notes de musique flottantes. Un camion de livraison de repas avec un panneau un peu effacé où était écrit "Le Food Truck de Bob l'Ours Rouge" était garé à l'extérieur du bureau d'un thérapeute.

Et derrière eux se trouvait la sortie, des portes doubles dépareillées. L'une était une porte-fenêtre en chêne avec un A stylisé peint sur le panneau de bois sous les fenêtres. L'autre était une porte plus classique en cèdre, avec un F tout simple inscrit à l'endroit où se trouvait le A sur l'autre porte. Le cadre dans lequel elles étaient montées faisait presque quinze centimètres d'épaisseur et était fait de bois de séquoia sculpté.

"Aïe, ça fait mal," dit Aldon en secouant sa main endolorie. "Pourquoi tu portes toujours le gant ?"

"Je l'ai oublié à cause de mon incrédulité concernant cette cérémonie ridicule d'ouverture de Voie," dit Finnegan en commençant à se diriger vers sa porte.

"Ta gueule, tu l'adores. Elle est géniale !" dit Aldon en lui emboîtant le pas, admirant leur Voie.

"Elle est embarrassante."

"Mais oui, je suis sûr que le furet se fiche de toi comme pas possible là-dedans."

Everett sortit la tête du sac à dos, comme s'il savait qu'il était le centre de leur conversation. "C'est un putois."

"C'est quoi un putois, bordel ?"

"Laisse tomber."

"C'est comme un punous en plus petit ?"

Finnegan ne put s'empêcher de rire. Il attrapa la poignée de sa porte et Aldon fit de même à sa gauche. Ils tournèrent leurs poignets d'un même geste, sortant chaque loquet de la porte opposée. Ils les poussèrent et sortirent dans l'un des nombreux halls de la Bibliothèque des Vagabonds avant de refermer les portes derrière eux. Peu de temps après, les portes tremblotèrent puis disparurent d'un coup.

Ils n'eurent guère le temps de souffler avant que Felix Cori n'arrive en trombe. Il était une tempête de panique et une autre métaphore climatique de désespoir. Il reprit son souffle puis dit à toute vitesse.

"Aldon faut qu'on retourne à l'entrepôt dès que possible, la statue qu'on a utilisée a été enchantée et c'est parti en couilles."

"Pourquoi."

La platitude de sa voix le prit au dépourvu. "Pourquoi quoi ?"

"Bon." Aldon fit de son mieux pour rester calme. "Pourquoi avez-vous essayé d'enchanter la statue alors que vous aviez explicitement dit que vous alliez utiliser le moins de magie possible ? Et aussi. Pourquoi ça serait un problème ? Tu avais dit que l'argile n'était pas magique, donc à moins que vous ayez fait un truc vraiment stupide — ce qui n'est évidemment pas impossible à envisager — vous ne devriez pas être trop dans la merde. Pourquoi y a que toi ici alors qu'il y avait des dizaines d'anartistes ?"

Felix resta silencieux.

Aldon sourit. "Alors. Felix. Non, pardon. Critique. Pourquoi."

Elle se pencha tout près de son visage et siffla à travers ses dents serrées, "Pourquoi t'es une pauvre merde à ce point ?"

Felix continua à ne rien dire.

À la limite de l'hyperventilation, Aldon attrapa Felix par sa chemise. "Emmène-nous jusqu'à la Voie pour qu'on règle ton foutu problème."

Il leur fallut courir dans le hall, dans plusieurs volées d'escaliers qui montaient, descendaient, montaient, descendaient et descendaient jusqu'à un autre hall, mais ça ne prit pas longtemps. Felix leva frénétiquement la porte de garage incrustée dans le mur du hall et s'accroupit dessous lorsqu'il y eut un peu de place pour passer. Aldon et Finnegan l'imitèrent et la porte retomba derrière eux.

"C'est vraiment une Voie à sens unique ?" demanda Aldon.

Felix ne disait toujours rien. Ils s'engouffrèrent tous les trois dans la salle principale de l'entrepôt et furent accueillis par un étrange spectacle. Sur la gauche se trouvait une série de sceaux, de runes et de symboles disposés en divers motifs autour d'un point. De ce point, des traînées d'argile menaient à travers les bancs d'église, qui avaient été rassemblés en rangées bien plus près de la plateforme principale qu'auparavant. Il n'y avait presque pas de place pour passer, et la plupart des anartistes avaient été attachés à leur siège pour qu'ils ne perdent pas une miette du spectacle. La plateforme elle-même avait été reconvertie en scène, où le reste des anartistes jouaient une pièce. Une pièce assez tristement célèbre dans certains cercles.

Et au centre de la scène se trouvait Cassandra Paulson, dans le rôle d'Alinda. Dans sa main se trouvait une dague ensanglantée, et à ses pieds, un cadavre dont la gorge avait été tranchée. Elle se tenait à côté d'un être d'argile animée, modelée de sorte à ce qu'il semble être enveloppé de tissu de la tête aux pieds, et ses pieds semblaient également avoir été enfoncés dans des talons hauts.

"Avec ceci, notre sang, c'est… celui du Sculpteur," dit-elle d'une voix étranglée.

Puis les acteurs se pendirent tous.

"Waow." dit Aldon. "Waow. Bordel de merde, vous avez vraiment chié dans la colle."

Sauf mention contraire, le contenu de cette page est protégé par la licence Creative Commons Attribution-ShareAlike 3.0 License