7 avril 2016 T-2 ans avant l’Incident
L'agent Sam Denton feuilletait un Le Sport Illustré à l'arrière de l'autocar exigu pour Portland tandis que son partenaire, l'Agent Jim McDowell, était assis sur le siège trop rembourré et potentiellement anormalement inconfortable à côté de lui. Ses yeux parcoururent la page, sautant le texte d'un article sur une équipe rivale. "Putains de Patriots," dit Sam en marmonnant sous sa moustache hérissée.
L'agent McDowell détourna la tête de la fenêtre, les yeux perdus dans le lointain alors qu’ils traversaient le centre des États-Unis. Il haussa un sourcil. "Sam, ce numéro a bien trois ans. Je jure que je t’ai vu le lire au moins dix fois," déclara McDowell. Il changea de position dans son siège pour faire face à son partenaire, tapant ses doigts sur son genou dans le même mouvement. La lourde bague gris étain sur le majeur de sa main droite restait inerte, pour une fois.
Sam ne leva pas les yeux alors qu'il continuait à parcourir la page, une bague identique sur sa propre main, heureusement silencieuse également. "Oui, et à chaque fois, ça me saoule encore. Je jure devant Dieu, ils auraient dû être exclus des séries éliminatoires. Le Deflategate, c’était des conneries. Nous aurions pu gagner ce match."
Jim leva les yeux au ciel et tourna la tête pour regarder par la fenêtre. "Ouais, bien sûr. Le fait qu'ils étaient à onze pour cinq et qu'ils n’avaient pas battu les Patriots depuis des années n’a rien à voir avec ça." Il tourna légèrement son poignet, vérifiant l'heure.
Sam posa le magazine et se tourna vers l'Agent McDowell, "Pfff, que des conneries. Ils auraient pu le gagner, ça arrive qu’il y ait un outsider, tu sais." Il rangea le magazine dans le sac à dos à ses pieds et en profita pour en sortir une barre de protéines. Il déballa les glucides et les protéines industrielles et les engloutit en trois bouchées.
"Hmm, bien sûr. Les Colts auraient pu gagner, tout comme cette barre énergétique avait une chance contre toi, hein ?" Le visage de Jim se fendit en un sourire facile alors qu'il taquinait son partenaire.
La main de Sam fusa, frappant Jim dans l'estomac avec désinvolture alors qu'il terminait la barre énergétique. "Oh je t'emmerde, je mange quand je suis stressé. J’l’ai toujours fait."
Jim haussa les épaules, "Oui, mais nous ne sommes plus de jeunes bleus qui courent partout et brûlent des calories. Nous sommes dans un bus, pour l’amour du Ciel, car quelqu'un ne voulait pas prendre l’avion. Essaye de faire un régime." Il tendit la main vers son propre sac à dos, sortit un petit sac de petites carottes et en croqua quelques-unes.
"Écoute, je vais commencer à suivre un régime quand ta sœur arrêtera de me faire de l’œil à chaque fois que je la vois au site," le visage de Jim s'était déformé en son expression habituelle de vague agacement. D'un, il n'avait pas de sœur. De deux, Sam était tout ce qu’il y avait de plus banal, "Elle ne peut pas résister à mes charmes. Je te dis mec, elle est à fond sur moi à chaque fois—"
Le bus se balança ; un bruit fort et métallique secoua la superstructure du lourd véhicule. L'autobus dérapa d'un côté, puis de l'autre, et les deux agents se raidirent et se calèrent contre les sièges devant eux.
Les autres passagers poussèrent divers cris et bruits d’alerte tandis que les pneus poussaient un bruit torturé.
Le bus sortit de la route à toute allure et vint s'arrêter quelques mètres plus loin dans l'herbe à côté du tronçon de route peu fréquentée. Sam regarda Jim, retenant momentanément son souffle. "Ça va ?"
Jim hocha la tête, les yeux scrutant la route à la recherche d’un danger potentiel. Quelques secondes tendues s’écoulèrent, avant qu’il ne laisse échapper un souffle, "Peut-être que c'était juste la courroie qui a claqué ou quelque cho—" D'un coup, les anneaux thaumiques des deux Agents commencèrent à bourdonner à l’unisson. Quelque chose à moins de deux kilomètres d'eux était anormal. Le bourdonnement s'intensifia jusqu'à devenir un vrombissement discret, secouant leurs doigts. Peu importe ce que c’était, il était fort et pratiquement juste au-dessus d’eux. "Eh bien. Nous voilà baisés."
L’Agent Denton enleva sa ceinture de sécurité et se leva, puis marcha vers l’avant du bus. Il s’arrêta et demanda à chaque passager s’il allait bien, en passant tacitement sa main portant l’anneau plus près de chacun d’eux en "vérifiant s’ils étaient blessés".
L’Agent McDowell passa à côté de Denton et s’approcha du conducteur du bus. Il lui montra des faux papiers qui les disaient être des agents du FBI. "Que s’est-il passé ?" demanda-t-il au conducteur.
Le vieux chauffeur de bus portait un pantalon trop grand pour lui et une chemise blanche. Ses yeux étaient ronds comme des soucoupes à cause du stress et ses mains tremblaient. "Je n'en ai aucune idée, officier—"
Jim leva la main, "Le FBI a des agents. La police a des officiers."
Le conducteur du bus eut l’air décontenancé pendant un instant, avant de se reprendre et d’acquiescer. "Désolé, euh… Agent. Je, euh, je ne sais pas, ça me dit juste qu’il y a un truc qui cloche au niveau du moteur, j’allais descendre pour jeter un coup d’œil." Il se pencha et appuya sur la commande d’ouverture de la porte avant du bus.
Jim lui fit signe de retourner à son siège et sourit, "Monsieur, laissez mon partenaire et moi y jeter un coup d’œil d’abord pour s’assurer qu’il n’y a rien de dangereux dehors, OK ? Ne laissez personne quitter le bus."
Le vieil homme hocha la tête, se rassit et prit la petite radio de l’interphone, "Messieurs dames, votre attention s’il vous plaît. Ces deux messieurs sont du FBI et ont la gentillesse de vérifier l’arrière du bus pour nous. Restez tous assis pendant quelques instants jusqu'à ce qu’ils disent que tout va bien, OK ?"
Les passagers échangèrent de discrets murmures d’approbation tandis que Denton et McDowell sortaient du bus et passaient sur l’herbe glissante qui bordait la longue portion de route. Les deux agents dégainèrent leurs pistolets de service en-dessous de leurs vestes, et Sam passa devant Jim, prenant la position de tête. Jim lui tapa sur l’épaule, et les deux hommes avancèrent vers l’arrière du bus.
Rien ne leur sauta dessus pendant qu’ils s’approchaient du compartiment moteur, ce qui était toujours bon à prendre. Les deux hommes firent un grand cercle autour du côté du bus et inspectèrent le dessous du bus à la recherche de menaces potentielles. Ils s’approchèrent du compartiment moteur avec précaution. Le panneau arrière du bus avait été emporté à peu près à l’endroit où les traces de dérapage commençaient sur la route. Un flot continu de pièces du moteur formait une traînée jusqu'aux décombres légèrement fumants de l’arrière du véhicule.
Jim fronça les sourcils, "Je crois que c’est cassé."
Sam se frappa le front de la paume, "T’es idiot, Jim. Évidemment que c’est cassé. Qu’est-ce qui s’est passé ?" Il remit son arme dans son holster, tira un outil multi-fonctions de sa ceinture et sortit le pied-de-biche miniature. Il ôta les derniers bouts de plastique qui entouraient le couvercle du moteur et recula d’un pas. Il plissa les yeux et grommela. "Tu reconnais ça ?"
Jim acquiesça et remit son arme dans son holster. "C’est une Ancre à Réalité de Scranton. Ou du moins quelque chose qui y ressemble assez approximativement, je n’en ai jamais vu une bricolée et installée dans un bus auparavant." Les yeux de Jim se posèrent sur le compartiment passager du bus. "Sam, je pense qu’on devrait sortir quelque chose d’un peu plus lourd qu’un survêtement."
L’Agent Denton se tourna et regarda rapidement son partenaire de haut en bas, "Alors, seul l’un de nous deux porte un survêtement. Ça, c’est une speedsuit." Il retourna vers la soute arrière et ouvrit le compartiment dans lequel ils avaient stocké leurs valises.
L’Agent McDowell souleva sa valise et la déposa au sol, puis glissa son doigt sous la poignée pour balayer le capteur biométrique. La partie supérieure de la valise s’ouvrit pour révéler une petite armurerie de divers équipements que les Agents pouvaient utiliser. Les valises pouvaient contenir exactement deux chemises et une brosse à dents, mais quand vous aviez besoin d’une arme d’assaut, vous aviez besoin d’une arme d’assaut.
Il sortit l’ensemble d’armure compacte et retira les deux films qui couvraient les sections pectorales et dorsales, "Peu importe, Rusty Venture. N’oublie pas d’activer les Hume-res." Les deux armures comportaient plusieurs symboles d’avertissement. Chaque bande offrait une faible résistance aux fluctuations d’Humes. Ce n’était pas grand-chose et ça ne durait pas longtemps, mais ça pouvait faire la différence entre la vie et la mort.
Il se leva, la lourde ceinture de toile se glissant confortablement sous le petit bide qui s’était formé ces quelques dernières années. Les gars du Site-127 avaient créé certains des outils sur la ceinture, et on ne pouvait jamais avoir assez d’explosifs puissants. Il échangea enfin son anneau pour un bracelet significativement plus lourd. Il contenait assez de matériel pour qu’ils comprennent ce qu’il se passait. En théorie.
"Oui, papa," dit Sam en retirant la protection de ses propres bandes Hume-res jaune fluo. "T’es prêt ?"
"Ouais. Allons comprendre ce qui se passe," dit Jim, échangeant le pistolet de petit calibre contre un pistolet plus gros qui avait été modifié afin d'accueillir des balles qu’il était un crime de détenir dans cette juridiction.
Sam monta à bord du bus en souriant de façon décontractée, comme il en avait l’habitude. La veste de son survêtement couvrait le gilet pare-balles, bien que les moldus n’auraient jamais reconnu la technologie derrière l’objet comme une armure. Il ressemblait à un T-shirt particulièrement volumineux sous sa veste. "Hé les gens. Alors, quelque chose semble avoir vraiment mal tourné avec le bus, et nous aimerions que tout le monde descende afin que nous puissions être sûrs que tout le monde soit en sécurité. Si vous pouviez tous descendre de façon ordonnée et vous mettre en ligne hors du bus ?"
Quelques murmures traversèrent la foule tandis que Sam descendait du bus, faisant signe aux passagers de passer. Ce faisant, il essaya de se faire une idée de chaque personne qui passait, en regardant les indications du bracelet sur sa main droite. Quelques-uns d'entre eux provoquèrent une réaction en passant, et Sam fit une note mentale pour leur poser des questions plus tard.
Les passagers étaient agités alors que Jim s'approchait pour rejoindre Sam, "Tu as eu une réaction sur le gamin maigre ?"
Sam hocha la tête, "Ouais. Sa mère aussi déclenche quelques pics. Une exposition résiduelle peut-être ?" Il haussa les épaules et se tourna pour faire face aux passagers. "Très bien, on va essayer de trouver si y a un moyen d’avoir de l'aide. Quelqu'un a-t-il du réseau ?" Denton appuya sur un bouton au dos de sa ceinture, déclenchant le brouilleur sélectif.
Aucune main ne se leva. Parfait. "Très bien, je pense que je pourrais être en mesure d'atteindre un bureau du FBI à proximité sur les ondes courtes, si on a de la chance. Asseyez-vous tous sur l'herbe, ou détendez-vous juste. Quelqu'un est-il blessé ?" D’autres murmures répondirent par la négative, et il se tourna de nouveau vers son partenaire. "Nous devrions nous connecter à la fréquence."
Jim hocha la tête, sortit la radio compacte d'un compartiment sur sa ceinture et passa son doigt sur le scanner biométrique sur le dessus. Il gazouilla en s’allumant, et une voix métallique en sortit, "Sigma 22, me recevez-vous ?"
Jim cliqua sur le bouton sur le côté de la radio, "Sigma 22, je vous reçois 5 sur 5. C’est Rho et Delta pour le rapport de l'étape 25. Demande d’une confirmation sécurisée, terminé."
La voix cliqua en réponse, "Bien reçu. Rho et Delta, quelle tombe demeure vide sous la garde de Lincoln ?"
Jim pressa son doigt contre le scanner biométrique alors qu'il cliquait à nouveau sur le bouton, "Son secrétaire Bill, bien sûr."
La voix cliqua une fois de plus, "Agents sécurisés confirmés. Quelle est la situation ?" Jim donna une brève description de ce qui s'était passé jusqu'à présent.
"Demande de permission pour un entretien et un confinement provisoire. Nous allons aussi avoir besoin d'amnésiques et de moyens de transport pour au moins vingt personnes. Potentiellement vingt-deux."
La voix de la station radio de la Fondation s'arrêta pendant plusieurs secondes. "Bien reçu. La seule FIM que nous avons dans la région est les Gardiens des Promesses. Aurez-vous besoin d'outils ou d'objets spéciaux ?"
"Inconnu. Nous vous contacterons pour davantage de détails. Veuillez obtenir une liaison satellite dès que possible, nous activons les micros." Jim porta le microphone à sa gorge et ferma les yeux alors que le choc du microphone intégré à côté de ses oreillettes s'activait. "Confirmez la connexion."
La voix du central de la Fondation retentit comme si elle était juste derrière lui, "Confirmée". La voix de Sam suivit un instant plus tard.
Après quelques minutes à séparer les passagers entre potentiellement anormaux et non-anormaux, Sam Denton s’assit en face d’une mère et de son fils. "Alors, d’où venez-vous, madame ?"
Elle détourna le regard pendant un instant avant de regarder à nouveau l’Agent Denton, "Quelle importance ? Je pensais que tout ce bazar était un accident ou quelque chose comme ça ?"
Il sourit de façon rassurante et hocha la tête. "Bien sûr, désolé. La force de l’habitude, comme je suis un agent, tout ça." Il fit un petit rire décontracté. "Pourquoi ne m’en diriez-vous pas un peu plus sur vous-même ? Vous êtes la seule avec un enfant à bord, je me disais que j’allais m’assurer que tout allait bien pour vous, c’est tout."
Elle se détendit légèrement et lui sourit nerveusement en retour. "Nous venons de Tulsa, pour aller vivre avec son père. Il a déménagé plus au nord pour son travail, et nous le rejoignons, puisqu'il a une maison là-bas, maintenant."
Denton hocha la tête, "Je comprends. Ma femme est quelque part dans l’ouest, et je suis tout le temps à Washington pour le travail. J’ai l’impression d’habiter dans ces bus." Il plongea sa main dans la poche de sa veste et en sortit une autre barre nutritive pour leur offrir, "Un creux ?"
Elle la lui prit et la sortit de son emballage en souriant un peu plus authentiquement. Elle en cassa un gros bout et le tendit au jeune enfant sur ses genoux. Il ne pouvait pas avoir plus de quatre ans et avait des bras et des jambes légèrement dégingandés. Il y avait vraiment un truc bizarre à son sujet. Dans sa tête, il entendit la voix de Jim disant au central, "QG de la Fondation, envoi de données de scan en cours. Analyse et retour, merci."
"Reçu, analyse en cours…" Plusieurs secondes s’écoulèrent, "… signes anormaux confirmés. Le sujet est devant la femme non-anormale. Elle ne dégage que des niveaux d’exposition. Le motif vocal du sujet indique qu’il s’agit de Janet Sinclair. Ancienne employée de la Fondation, présumée morte après un accident l’année dernière."
Le cœur de Jim se serra. Le gamin. Évidemment que c’était le gamin, qu’est-ce que ça pouvait être d’autre. Jim grimaça et sous-vocalisa à nouveau, "Temps d’arrivée estimé des Gardiens des Promesses avec de l’équipement de confinement ?"
Le central cliqua dans leurs têtes, "Un instant." Plusieurs secondes tendues passèrent, "Une dérogation de Niveau 4 vient d’arriver. Vous devez trouver d’où vient l’ARS. La rupture de votre couverture est autorisée."
"Force létale ?" dit Jim, de l’espoir dans sa voix.
"Avez-vous des amnésiques en votre possession ?"
"Non," l’espoir quitta sa voix.
"Autorisée et recommandée." La voix mit fin à la communication sur un ton définitif. Jim se demanda qui avait fait cet appel. Une vingtaine de vies, soit juste le prix à payer dans le métier pour potentiellement prendre en embuscade un enfant de quatre ans.
Sam resta assis sans bouger pendant un moment, avant de dire en soupirant, "M’dame, je peux vous demander comment vous vous appelez ?"
Elle sourit en penchant légèrement la tête, "Janet."
Sam posa un regard lourd et plein de regrets sur elle en la regardant dans les yeux, "Janet, où avez-vous trouvé une Ancre à Réalité de Scranton, et pourquoi escortez-vous l’anomalie ?"
Janet se figea et ses yeux s’écarquillèrent. Elle recula légèrement, et son dos heurta les jambes de l’Agent McDowell. "Je-je ne, q-que voulez-vous dire ?"
Sam se pencha sur les informations qui se déroulaient sur son téléphone depuis la station radio, "Janet Sinclair. Niveau 2, chargée du confinement de plusieurs objets SCP utilisables comme armes biologiques. Également présumée morte lors de la destruction de l’avant-poste-27-Gamma. Ça explique où vous avez trouvé l’ARS. Maintenant, expliquez ça," dit-il en désignant l’enfant dans ses bras.
Janet commença à sangloter en baissant la tête sur sa poitrine, "A-après l’explosion de l’avant-poste, il ne restait personne. Le docteur Mayer était mort. Nous faisions des expériences sur des enfants. Des enfants, pour l’amour de Dieu. Je n’en pouvais plus. J’ai pris le petit et je me suis enfuie. Je laissais l’ARS alimentée dans mon appartement, mais… ils ont fini par nous retrouver."
Jim sous-vocalisa, "Confirmez l’objectif de l’Avant-poste Gamma-27". La station lui répondit en cliquetant, "Désolé agent, vous n’avez pas d’accréditation suffisante." Jim sous-vocalisa quelque-chose d'abrupt dans sa barbe, sans activer son micro.
Sam hocha la tête, prenant une attitude attentionnée, mais tendue. Il était prêt à bondir au moindre problème, mais jusqu'à ce que cela arrive, il n’y avait pas besoin de la brutaliser. "Qui était-ce ?"
"Les Sarkites. Ils veulent Tommy," dit-elle en montrant l’enfant qui s’était endormi dans ses bras, "C’est une de leurs créations, une sorte de bio-ingénierie. L’ancre à réalité a aidé à réprimer ses pouvoirs, et nous avons essayé de ne jamais rester au même endroit…" Son visage était désormais secoué par des hauts-le-cœur, et des tressaillements la secouait lors des sanglots les plus forts.
Jim s’accroupit à côté d’elle et lui tendit un mouchoir. Elle souffla fort dedans et serra l’enfant contre elle. "Je… Je ne vous laisserai pas le prendre. Pas pour que l’on fasse des expériences sur lui à nouveau." Son œil commençait à tressaillir, mais son regard était plus ferme.
Sam secoua la tête, "Écoutez, je n’essaie pas d'emmener qui que ce soit avec nous. Un bus a explosé. Il y avait une putain d’Ancre à Réalité de Scranton à l’arrière. On fait notre boulot. Évidemment, le gosse n’est pas dangereux, c’est juste un gamin. Je ne pense pas qu’ils vont essayer de l’enfermer quelque part. Sam remit ses divers équipements sur sa ceinture, et se pencha en avant pour poser une main réconfortante sur son avant-bras, "Je suis désolé que votre expérience ait été si traumatisante. Je pense qu’il est temps que vous rentriez et que nous donnions à Tommy l’aide dont il a besoin."
Elle acquiesça de la tête, et un silence confortable les enveloppa tous les trois tandis qu’ils attendaient l’équipe de confinement. Une demi-heure s’écoula, qu’ils passèrent à compatir sur leurs expériences à la Fondation. Janet était devenue silencieuse, mais ne résistait pas. Elle était restée adossée au bus la plupart du temps, avec une respiration difficile de temps à autres.
Jim pencha sa tête en tenant immobile le mouchoir souillé dans sa main ; il n’arrivait pas à se défaire d’une étrange sensation. "Central, je vous envoie un échantillon. Analyse et retour, profil humanoïde, confirmation d’identité. La totale." Il passa le petit échantillon de mucus et de sang sur une petite bandelette de papier, qu’il inséra dans le bracelet.
Seize secondes plus tard, une voix cliqueta dans leurs microphones, "Confirmé. Le sujet n’est pas Janet Sinclair. Le sujet possède un ADN comparable aux analyses de l’Incident Gamma-27."
Jim activa immédiatement son micro d’un bruit sec, "Baie de sureau."
Sam hésita pendant une microseconde avant d’exécuter une roulade arrière aussi vite et violemment que son ossature vieillissante le lui permettait. Il fit deux pas rapides tout en en dégainant son pistolet.
"Janet" sembla confuse un court instant avant que son visage ne se torde en un rictus hargneux. Elle se releva vivement tandis que ses doigts fusionnaient ensemble pour former un tentacule grotesque, puis elle bondit vers Denton. Elle hurla et projeta son autre bras en avant, un morceau de chair s’en détachant et filant vers l’Agent Denton. Il essaya d’esquiver sur le côté, mais le bout de chair humide et répugnant suivit son mouvement, visant droit vers son cœur. La boule collante de peau sanglante claqua contre l’hume-res jaune fluo sur sa veste, siffla un instant, puis se détacha. Le morceau d’hume-res se consuma en une poudre noire fumante et s’écailla.
L’Agent Denton vida son pistolet de service sur la créature en mutation rapide en face de lui tout en essayant d’enlever les cendres de sa veste. "Janet" zigzagua entre toutes les balles, et ses membres s’étendirent en des griffes transperçantes. Elle réduit rapidement l’écart entre elle et sa proie.
Il faut reconnaître que l’Agent Denton ne recula pas. Sa main fila vers sa taille en un clin d’œil et dégaina le long couteau du fourreau à l’arrière de sa ceinture. La lame était incrustée de divers composants électroniques et insérée dans une garde et un pommeau noirs et lourds.
La griffe de Janet, tranchante comme un rasoir, fila vers le visage de l’Agent Denton, sifflant en traversant l’air, désormais à seulement deux pas de la chair vulnérable de Denton.
L’Agent Denton serra plus fort la poignée jusqu'à entendre un déclic, et la garde du couteau lourd s’ouvrit pour révéler des contacts métalliques. Il fit un pas de côté et amena la lame du couteau juste sur l’articulation du coude de Janet, tandis que ses doigts appuyaient sur les deux contacts sous la garde. Une décharge d’électricité fila de la poignée dans la garde.
Le bras de Janet se tordit de douleur pendant un instant, submergé par les décharges électriques qui remontaient jusqu'à son cerveau. L’Agent Denton courut sur deux pas, et sa main libre attrapa le poignet de Janet, qui était devenu glissant à la fois à cause du sang mêlé de pus et du sang humain normal. Il se tourna et enfonça le poignet de Janet dans sa propre poitrine palpitante. Denton tira sur le bas du couteau, coincé entre le corps et le bras de Janet. Le couteau sortit deux lourdes griffes d'acier depuis sa garde, emprisonnant sa chair dans un bretzel serré. Il hurla, "C’est maintenant ou jamais, McDowell !" alors qu'il donnait un coup de pied à l'un de ses genoux, ce qui ne lui donnait plus qu’une bonne jambe sur laquelle s’appuyer.
Le corps de Janet se tordit avec une grâce désossée alors qu’elle tendait son autre bras par-dessus sa propre tête, à quelques centimètres du visage de Sam. Le bras commença à s'allonger, les os nus de sa main étirée se cambrant vers l'œil de Sam Denton. Il déglutit difficilement, les muscles tendus contre la force du monstre pressé contre lui. Je jure devant Dieu, si je survis à ça, je retournerai à la salle, mais ne me lâche pas maintenant. pensa-t-il en lui-même, en priant toutes les divinités auxquelles il pouvait penser et plusieurs qu'il inventa sur le moment.
Derrière elle, six balles retentirent en succession rapide, l'efficacité des munitions explosives permettant de transformer la femme en mutation rapide en quelque chose qui ressemblait à de la pâte. Le petit enfant qu'elle escortait restait, lui, immobile au sol, à plusieurs mètres de là.
Sam laissa échapper un souffle tremblant alors qu'il remettait en place les différents morceaux du couteau, l'essuyant sur sa veste avant de le replacer dans son fourreau. "Par la mère de Las Chupacabras, c’était pas trop tôt !"
Jim braqua son arme sur les passagers du bus, faisant un signe de la main peu rassuré à Sam. "Je ne vais le dire qu'une fois. Tout le monde reste sur place et tout ira bien. Personne d'autre ne sera abattu. Mais si vous courez, je vous tuerai."
Il faut reconnaître que les passagers se figèrent sur place ou tombèrent sur leurs derrières sous le choc. Sam s'approcha du petit enfant et le retourna. En y regardant de plus près, il réalisa que ce n'était pas du tout un enfant, mais un homme atteint de nanisme. Sam fouilla dans sa ceinture et lui administra la syrette de stimulants à large spectre afin de contrer tout ce qui se trouvait dans son organisme. Il prit rapidement un échantillon de cheveux et l’inséra dans le bracelet pour obtenir une lecture immédiate de l'ADN. "Docteur Mayer ?"
L'homme cligna des yeux en direction de l'agent, alors qu'il se réveillait de la brume groggy dans laquelle il avait été placé, "Où suis-je ?" sa voix était teintée d'un lourd accent allemand. "Et qui êtes-vous ?"
Jim regarda Sam et secoua la tête, "Je le jure devant Dieu, Sam. Il fallait que tu insistes pour économiser soixante dollars avec un trajet en bus."