Charnier Élégant

- Une étoile spéciale pour un jour comme un autre. De Makyr.

Il était une fois le Vide.

Il était immensément grand. À tel point qu'on pourrait remplir ce Vide avec des milliards de nébuleuses étirées, cela ne suffirait pas. Et oui, le Vide était très infini, surtout du côté où se sustentait la grande crevette rouge. Espérons que la fin de la galaxie qu'elle consume soit rapide, ne serait-ce que pour ses pauvres habitants.

Pourtant ce Vide n'était pas la partie la plus importante de l'Univers. Il existait de petits ilots de matière en trois dimensions, dispersés comme des nuages de poussière et tous étaient bien plus intéressants que le Vide. Il y avait des galaxies, des nébuleuses, des étoiles, des astéroïdes, des planètes et d'autres choses aussi sans nom, faute de pouvoir les voir. Très peu de ces choses faisaient du bruit.

Il était aussi une fois, un groupe de créatures très ennuyeuses et assez ennuyées par les choses sérieuses qu'elles faisaient, qui prétendait être la fondation de leur monde (sans son accord). Ce groupe était persuadé que seule une partie de l'Univers était intéressante, et donc ils s'étaient mis en tête de vouloir la cartographier.

Mais elles n'avaient pas les meilleurs outils pour accomplir une telle tâche. Après tout, elles n'étaient qu'un minuscule grain de sable dans la grande piscine à balles de l'Univers.

C'était donc sans espoir. Courageux, ambitieux, prétentieux, dispendieux mais complétement sans espoir. Pourtant ces entités se fichaient pas mal des contraintes posées par la lumière par exemple. La lumière ne parcourt "que" 300 000 kilomètres par seconde dans le vide. La chose la plus rapide du monde de la physique conventionnelle et pourtant, c'était comme prendre des clichés vieux de plusieurs siècles avec. Pas pratique pour tracer une carte. De temps en temps, les fondateurs envoyaient bien… des choses dans l'espace pour les aider à réaliser cette tâche. Mais c'était dur de les réaliser, et encore plus de leur faire faire ce qu'ils voulaient, pour un résultat qui ne valait pas toujours la peine.

Néanmoins, les entités avaient réussi à voir d'autres étoiles, de nouveaux mondes, et quelques choses impossibles ou effrayantes. Elles ont parlé avec des avatars chaleureux des étoiles, vu des titans s'échouer dans leur orgueil, observé en silence des prédateurs qui n'attendaient qu'une seule étincelle de vie ou d'amour pour ne faire qu'une bouchée des mondes.

Oui, décidément, c'était perdu d'avance. Mais cela n'empêchait pas les fondateurs d'essayer. Leurs tentatives ont fait l'objet de rires, de convoitises, d'admiration et d'horreur. Des relents d'échec et d'amertume qui faisaient écho dans le monde de l'étrange et de la magie et traversaient toutes les frontières. Certaines de ces lamentations, changeaient la vie de ceux qui avaient le malheur d'être effleurés par ces paroles, ce désir ardent et terrifiant de connaissance, noirci par l'impuissance.

Comme par exemple ce Vincent Labore. Au début, il n'était rien. Mais après avoir été éclairé par une certaine étoile et fait quelques rencontres intéressées… il est devenu encore moins que rien. Mais il se pourrait qu'il ait été satisfait de son sort. Et son histoire commence dans un box gris, de l'observatoire spatial secret numéro XB9T de la Fondation SCP.

Vincent Labore était affalé à son bureau, dans un box ennuyeux d'un observatoire de la Fondation. Certains pourraient croire qu'il avait là un boulot important, qu'il protégeait l'humanité des menaces d'origine extra-terrestre qui étaient souvent sous la forme de gros cailloux un peu trop attractifs, mais le problème était que seul le boulot était important.

Vincent lui, n'était pas important.

Vincent n'était qu'un engrenage humain, qui se devait de regarder des milliers de clichés du ciel étoilé et les comparer avec d'autres centaines de milliers de clichés qui servaient de référence. De nos jours, les astronomes ne regardaient plus amoureusement dans la lunette du télescope, surtout si celui-ci mesurait plusieurs centaines de mètres de diamètre.

Non, tout était informatisé. Ainsi, le moniteur de l'ordinateur faisait office de ciel étoilé et accompagnait Vincent pour toute une journée de travail. Des fois il lui arrivait de confondre son fond d'écran avec le ciel, quand il rentrait du boulot. Mais il ne pouvait rien y faire et c'était désormais sa vie.

Quand il y avait une différence entre le cliché de référence et celui pris par le télescope automatisé, Vincent se devait de faire une sélection en boite de l'anomalie et attendre l'analyse du logiciel. Ce dernier signalerait alors le secteur d'intérêt à ses supérieurs pendant que le télescope quadrillait le ciel étoilé, un cliché à la fois.

Vincent Labore ne faisait donc que son travail lorsqu'il encadra une partie de la photo, où se situait une étoile qu'il ne reconnaissait pas. C'était le logiciel qui ne fit pas son boulot lorsqu'il afficha "1,7 % de différence. Insuffisant pour un signalement."

Vincent se dit que sa sélection n'était pas assez précise et diminua la taille de l'encadrement.

"2,1 % de différence. Insuffisant pour un signalement."

C'était bizarre. Il y avait clairement une étoile qui n'était pas là auparavant et le logiciel ne la voyait pas. Cela signifiait qu'il était temps de laisser l'humain prendre le pas sur l'ordinateur.

Il envoya donc le cliché à quelques uns de ses collègues et alla se prendre un café pendant qu'il attendait leur réponse.

Vincent n'était pas à l'aise aujourd'hui, encore plus vide et mélancolique que d'habitude. Mais comme l'engrenage humain qu'il a appris à être, il décida d'ignorer ces sentiments jusqu'à ce qu'il soit rentré chez lui, après quoi il les noierait dans le sommeil habituel. Mais il se surprit à jeter d'occasionnels coups d’œil par dessus les faux murs de son box et à espérer plus d’interactions avec ses collègues qu'à l'accoutumée. Étrange mais à quoi bon, Labore ne faisait plus attention à l'étrange.

Quelques tasses et rêveries plus tard, il reçut un message. Il n'y avait pas d'étoile dans le secteur évoqué.

Pourtant, lui la voyait. Une étincelle sur un cliché blanc et noir, bien distincte. Il alla se rincer le visage, sa vision lui jouait peut-être un tour.

Non, toujours rien. L'étoile n'avait pas disparu.

Alors il était l'heure de passer à la phase supérieure. Vincent sortit de son ennuyeux et gris box pour aller demander des enregistrements de ce secteur en temps réel. L'autorisation prendrait des heures, mais il pourrait toujours avancer son travail pendant ce temps.

Les photos défilèrent devant ses yeux lassés de cet exercice et lui criant d'aller changer d'activité, mais Vincent avait depuis longtemps décidé de faire la sourde oreille à son corps capricieux. Et pourtant, une étincelle naquit dans son regard, dans l'espoir que son quotidien morose change enfin. Encore et toujours des clichés, tous en noir et blanc.

Et au moment où il commençait à oublier l'anomalie qu'il avait trouvée et finalement il reçut une notification, disant qu'il aurait un accès limité au télescope en temps réel.

Vincent se précipita donc sur la clé d'accès, et dirigea le télescope vers le secteur en tête. Sans surprise, il y trouva bel et bien une étoile, située entre deux autres astres sans intérêt. La surprise fut ailleurs.

L'étoile était verte. À la mention de la couleur, l'esprit poussiéreux de Labore commença à remuer ses connaissances en astronomie.

Les étoiles avaient des couleurs froides (bleus et violets) lorsqu'elle étaient grandes et bien chaudes ou simplement jeunes, et des couleurs chaudes (rouges, oranges, jaunes) lorsqu'elles étaient petites, froides ou vieilles.

Il n'y avait pas de place pour une étoile verte dans l'Univers. Ce devait être une pensée prédatrice dont il n'arrive plus à se séparer. Ou une machine extra-terrestre confinée dans l'espace, un phénomène inconnu, une tumeur dans son cerveau. À moins que ce soit le télescope qui était spécial.

Mais non, cela ne pouvait pas être autre chose qu'une étoile, ça avait un éclat constant et se déplaçait à la même vitesse que les autres astres.

Vincent se dépêcha de diffuser ces images à tout l'observatoire. Il avait trouvé une anomalie, lui ! Mais il fut rapidement désenchanté. Tout ce qu'il a reçu c'était une mise en garde contre l'abus de l'accès prioritaire au télescope.

Ainsi donc il y avait une étoile mais il était le seul à la voir.

Vincent aurait voulu insister, leur dire qu'il voyait là une étoile inhabituelle. Et puis il se rappela du sort réservé à ceux qui étaient "spéciaux". Enfermés dans une cage standardisée et déshumanisés par un numéro générique. Cette couleur verte venue du ciel et qui clignotait désormais dans sa tête le narguait et commençait à rendre Labore encore plus misérable et amer qu'il ne l'avait été.

À quoi cela sert de voir une anomalie s'il était le seul. Vincent aurait voulu avoir quelqu'un avec qui partager ce moment étrange en toute sécurité.

Et puis, mû par cette succession d'événements inhabituels, l'esprit dépoussiéré de Vincent se rappela de quelque chose en plus. Cela ne pouvait être qu'une coïncidence stupide, astronomiquement impossible et pourtant, quelque part il sut que ce devait être lié à cette étoile qu'il était le seul à voir.

C'était son anniversaire. Et bien que l'univers était rarement aussi fainéant, ça devait être lié.

Mais il y avait aussi autre chose. Il y avait de l'agitation dans les couloirs, comme si quelque chose arrivait. Quelqu'un d'important ou de dangereux.

Le pauvre Labore. Tout ce tourment venu du ciel, qui ne lui appartient même pas. Il ne sait pas encore dans quoi il s'embarque. Moi non plus, cela dit.

Je vais voir si je peux l'aider. Peut-être on pourra regarder cet astre ensemble, tête à tête.


Je prends la relève. De Holt.

Vincent se leva alors. Son premier réflexe fut de songer à se cacher. Se recroqueviller sous son bureau était l'instinct le plus fulgurant, mais aussi le plus stupide. Il essaya de calculer une route de sortie vers une issue incendie mais il était probablement déjà trop tard pour ça. L'une de ses seules options restantes pour une échappatoire réussie était de contourner un éventuel intrus en se cachant derrière la photocopieuse et d'en faire le tour en même temps qu'il passe, mais cela nécessitait timing, souplesse et une photocopieuse un peu plus grosse.

Il décida alors de faire comme si de rien.
Il n'était pas concerné, et même s'il l'était, alors quoi ? Il n'a fait que se tromper. La preuve, il n'y a rien sur ces photos ! Ils n'allaient pas le considérer comme un SCP juste parce qu'il avait été un peu insistant sur une erreur humaine, si ? Autrement, il faudrait en confiner beaucoup, des abrutis comme lui !

C'était ces pensées, son échappatoire. Il les utilisa pour se convaincre, se raidir sur sa chaise de bureau et perfectionner sa gestuelle attentive de l'employé modèle occupé. Quand il avait la colonne vertébrale aussi droite, il se sentait prêt à affronter n'importe quelle supernova, sans doute grâce au souvenir impérissable des photos de son père lors de son service militaire où il avait l'air d'être un homme sur lequel on pouvait…

"Monsieur Labore."

L’intruse interrompit la narration, mais ce n'était pas grave. Ce sont les aléas d'une histoire dont les éléments ne sont pas maîtrisés par tous les narrateurs qui se succèdent.

Vincent, lui, sentit que sa colonne vertébrale n'était pas si forte que ça, à cet instant. La voix était celle d'une femme d'à peu près son âge, mais avec l'autorité, et sans doute le poste, d'une personne qui avait dix ans de plus que lui. Il se sentit petit immédiatement, mais ça ne l'empêcha pas de répondre, sans se retourner, avec un flegme feint :

"C'est moi, oui. Vous désirez ?"

"C'est bien vous qui avez signalé la présence d'une étoile verte l'autre jour ? »

Il ne pouvait alors que se retourner. C'était son moment, le moment où il allait affirmer haut et fort que ce n'était qu'une erreur, et que maintenant il fallait le laisser travailler parce qu'il n'avait pas que ça à faire, et que s'ils comptaient emmerder tous les employés qui faisaient des gaffes, alors…

"Oui, ou non, Monsieur Labore ?"

Cette femme n'aimait décidément pas que l'on s'attarde sur les pensées des personnages. Elle était grande, bien habillée, avec une cravate bleu sombre et une coupe au carré sans doute taillée au laser. Le marron de ses cheveux était comme une souche de bois mort d'automne sur le gris de ces bureaux, souche que ses talons hauts auraient sans doute percé comme dans du beurre.
Son regard, en revanche, était loin d'être mort. Ses iris dont l'aura violente n'était contenue que par la bienséance professionnelle étaient perdus, minuscules au milieu du blanc de ses yeux.

Elle n'avait pas d'agents de sécurité avec elle. Elle n'en avait pas besoin.
D'ailleurs, il n'y avait plus aucun souffle de vie dans les bureaux alentours. Il n'y avait plus que Labore.

"Je… Oui, mais…"

"Alors, suivez-moi."

Et la narration suivit.

Elle ne suivit que Labore, toutefois, dans un premier temps. La femme était trop rapide et ses mouvements brusques pour slalomer dans les virages des couloirs rendaient sa description difficile. Vincent regretta les quelques secondes d'indécision qu'il avait eu avant de se lever : pour la rattraper, il eut à trottiner et à piteusement faire preuve de son manque d'exercice et d'hygiène de vie générale. Il regarda autour de lui en avançant.
Les bureaux étaient vraiment déserts.
Elle parla.

"Oubliez vos plannings, vos réunions, vos pauses, tout. Il n'y a rien de grave, pour l'instant, et tout vous sera expliqué à notre arrivée."

Vincent, essoufflé, resserra sa cravate et…

"Pour l'instant ? Notre arrivée ?"

…Et coupa la narration de part sa nervosité. Elle se retourna tout en marchant et siffla :

"Économisez votre souffle, nous partons au sous-sol et il n'y a pas d'ascenseur."

Et elle commença à dévaler les marches de l'escalier de service d'une démarche fluide, comme un mime pressé, sa main droite frôlant la rampe de métal froid.

"Faites-moi penser, si j'oublie, à vous coller un programme sportif en parallèle, vous en aurez besoin pour votre nouveau poste."

Il se pressa derrière elle, déjà en nage.

"Mon nouveau poste ? Attendez, qu'est-ce que…"

Mais cette fois-ci, ce fut la narration qui le coupa, car il était temps à un autre de prendre la relève tandis que l'on s'enfonçait dans des entrailles insoupçonnées du Site.


Insérer ici la suite. Bonne chance, fondateur.


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- Makyr

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