I Don't Want To Set The World On Fire...

Le Ice-Burg était de loin le meilleur bar-restaurant de tout le Comté de Douglas— les milkshakes y étaient crémeux, leurs burgers chauds et les frites au fromage n'avaient pas l'air d'être des surgelées à moitiés cuites. Les gens venaient de Sloth's Pit à Superior afin de goûter leur "pizza-burger", que le Dr Christopher Hastings tentait de déguster à ce moment.

Une main tenait le burger, l'autre son téléphone, naviguant à travers un bulletin de la Fondation à propos de feux de forêt à l'autre bout du pays. Il vit sa réflexion dans l'écran lorsqu'il l'éteignit montrant un homme à la moitié de sa trentaine aux cheveux blonds décoiffés ressemblant presque à des cornes. Il touchait son burger sans enthousiasme.

"Ça va, chéri ?" demanda Ruby Williams en lui volant une frite et la trempant dans de la sauce fromagère.

"C'est officiel. La Polystichum xenosa est éteinte à l'état naturel."

"Oh." Ruby fronça les sourcils. Elle s'était intéressée à la para-botanique depuis qu'elle et Chris sortaient ensemble, elle savait donc ce que cela signifiait. "La Polystic à épées longues ? Vraiment ?"

"La totalité de leur habitat a été ravagé par les feux causés par des trous du cul à une fête de la révélation." Il rit jaune. "Félicitations, votre stupide parasite d'enfant est responsable de la disparition d'une espèce très rare et très anormale de fougère pouvant potentiellement guérir le cancer. Les seuls spécimens restants sont ici au 87, au 29, et au 53." Il secoua la tête. "Le fait que l'on mange dans un bar-restaurant en octobre est une preuve que le monde est en feu et que personne ne veut y faire quoi que ce soit." Il mordit dans son burger en grognant. "Et bordel, j'aide pas du tout. La vache tuée pour faire ça a produit assez de méthane pour tuer un homme et la surface de forêt tropicale rasée pour le faire va probablement rapprocher notre apocalypse climatique de cinq ans, tout ça parce que des gros américains débiles veulent manger leur putain de bœuf."

Ruby soupira, reconnaissante qu'ils étaient les seuls clients— c'était le milieu de la journée en semaine, alors le pire qu'ils pouvaient recevoir étaient les regards jugeant des employés. Elle but une gorgée de Pepsi. "Tu as déjà entendu parler de l'adaptation "merde" ?"

"Tu me l'as déjà dit avant," il soupira. "Si tu ne peux pas contrôler quelque chose, dis "merde" et oublie que c'est un problème. Mais je ne peux pas, parce que je fais partie de la seule putain d'organisation sur la planète qui peut faire quelque chose, mais vu que la moitié du foutu Conseil se fait de l'argent sur les énergies fossiles—"

Ruby leva la main. "Tu repars en mode conspiration, chéri."

"Désolé," il soupira. "Mais. Merde, mon boulot, c'est d'étudier les plantes et on les détruit en masse pour notre cupidité et notre gourmandise. J'ai l'impression que…" Il regarda le bâtiment rouge face à celui qu'occupait l'Ice-Burg, un authentique cinéma en plein air des années 50 en bordure de ville, derrière lequel se tenaient les bois. "Je sens qu'on mérite tout ce qui pourra arriver."

La fin du repas se déroula en silence, excepté la flasque sortie par Ruby pour mélanger son contenu avec le milkshake de Chris.


Elle était nommée ainsi à cause de la feuille de la fougère ressemblant à une épée, assez grande et coupante pour correspondre à son nom— le coin nord-ouest de la Serre 3 était entièrement occupé par la plante, s'élevant à presque deux mètres au-dessus de la tête de Chris à son point le plus bas. Il toucha ses feuilles et soupira.

"Peut-être que tu vas bientôt nous donner des graines," espérait-il. "Puis on peut essayer de te faire repousser dans ton milieu naturel. Et avec un peu de chance, peut-être que la Fondation en a loupé quelques-uns… Je sais que tu peux survivre dans des grottes et qu'il doit y en avoir certaines là-dehors, n'est-ce pas ?" Il secoua la tête. "N'est-ce pas."

Il se retourna pour faire face au reste de la serre. Il faisait un doux 21 degrés dans la serre chaude, plus froid que dehors, un fait que Hastings n'appréciait pas. La Serre 3 avait été créée pour le confinement de spécimens originaires des forêts tempérées humides et était de loin sa préférée, entre les bonsaïs Jengawood, les genêts vantards et la section des plantes carnivores. En parlant de ces dernières, c'était l'heure du dîner.

Chris sortit un burger qu'il avait emporté de l'Ice-Burg et se dirigea vers les plantes carnivores. Elles avaient l'air tout droit sorties de La Petite Boutique des horreurs, car elles l'étaient— lorsque le lycée avait fait sa comédie musicale, quelqu'un du club de science s'était essayé aux mutations génétiques et avait créé une Dionée attrape-mouche de la taille d'une voiture pouvant chanter, danser et faillit tuer l'actrice jouant Audrey.

Il jeta le burger dans la gueule de la chose— lorsqu'un gouffre se forma au centre de la serre, aligner sur le béton au-delà de la terre, là où il arrêta son expansion. Mais il allait s'élargir d'un moment à l'autre.

Les arroseurs se mirent en marche et Chris se retrouva trempé. Il s'apprêtait à jurer lorsqu'il réalisa que les arroseurs n'étaient pas ceux de l'arrosage des plantes— c'était ceux du système incendie. Et l'alarme ne s'était pas allumée.

Il se rua vers la porte de la serre et se mit à la pousser. Elle était bloquée. Il agita la poignée, tira, la poussa de tout son poids, mais elle ne bougeait pas d'un pouce. Il prit un marteau utilisé pour les réparations et tenta de briser la vitre— mais rien. Et les arroseurs continuaient à asperger.

Mais ce n'était pas de l'eau qui en sortait— aussi croupie qu'elle pouvait être, ça ne sentait pas comme tel. Ça avait presque la même odeur que… "De l'essence." Il écarquilla les yeux. "Merde."

Il se jeta sans hésiter dans le trou de béton, hurlant des excuses aux plantes en son fond.


Le Café Rudy était une petite enseigne dans le centre-ville de Sloth's Pit. Il était en bas de la rue de la bibliothèque, à une intersection, avec des tables à l'avant et à l'arrière. Sa devanture était une vitrine avec un grand panneau affichant "VEUILLEZ PORTER UN MASQUE À L'INTÉRIEUR" à l'intérieur et une photographie de Rudolph Dyer derrière, souriant aux clients avec la garantie que, malgré ses mains différentes, sa cuisine était toujours aussi bonne.

Alison Carol et Robert Tofflemire s'assirent tous les deux dans l'arrière-salle sur une grande table. Robert mangeait son casse-croûte, tandis qu'Alison faisait défiler quelque chose sur son téléphone en s'assurant que Robert ne pouvait pas le lire.

Retour d'informations pour vous (je tag spécialement @plongeurduterrierdulapin) à propos de toute cette migration phobique. De nouvelles informations venant de Chicago sur une famille terrorisée par des visions de leur chien se faisant déchiqueter par quelque chose ressemblant à leur voisin (connu pour maltraiter les animaux). Le chien allait bien, mais tout cela a mené au meurtre par balle dudit voisin.

Une semaine plus tôt, une enfant à Carol Stream fut piégé dans une cabine de toilettes publiques par un "homme aux doigts crochus" et fut mutilé, mais heureusement en vie et stabilisé. Les autorités n'ont rien déclaré de plus.

Il y a eu une douzaine d'incidents dans la zone de Chicago et ils semblent se déplacer quelque part vers le nord. Si la chronologie que j'ai fait est correcte, alors ils sont arrivés à Milwaukee le 15 septembre, le même jour qu'une congrégation à l'Église luthérienne de Grace a rapporté avoir vu une image du Christ descendant de sa croix et proclamant qu'aucun d'entre eux n'a été sauvé…

"Pryce n'est pas de Carol Stream ?"

"Hmm ?" Robert leva les yeux de son pain au chocolat. "Ouais, je crois. Pourquoi ?"

"Juste par rapport à un truc que je viens de lire." Elle retroussa le nez, grognant légèrement et le frottant. "Aïe."

"Encore des séquelles du test COVID ?" demanda Robert en regardant au-dessus de ses lunettes. "C'est pour ça que j'ai les miens l'après-midi. Ça évite de te gâcher la journée."

"Mmm." Alison prit une gorgée de thé glacé derrière son masque, la paille passant par-dessous. Elle regarda son partenaire d'un air insistant. "Depuis quand tu portes des lunettes ?"

"Je porte des lentilles depuis qu'on se connaît, mais ils ont arrêté de les produire avec…" Il agita sa main. "Ouais."

"Merde. Désolée."

"Ça ne devrait pas me gêner pour les opérations." Il fouilla dans sa poche, puis en sortit des lunettes tactiques. "Des lunettes correctrices tactiques. Tu arrives à croire tout ce qu'on peut imaginer des fois ?"

La réponse d'Alison fut étouffée par le son de camions de pompier sortant de la station, les sirènes sonnaient pour la seconde fois de la semaine. D'après ce qu'elle entendait, ils se dirigeaient vers l'est, et—

Et à l'est de la ville, là où le Site-87 devait être, une colonne de fumée noire s'élevait.


Les plantes autour de Christopher brûlaient.

La surface mouillée de la chose au fond du trou l'aida à se protéger du feu dont il ne pouvait pas trouver la source. Mais alors qu'il escaladait le trou de béton, un tee-shirt couvrant son visage par-dessus son masque pour minimiser l'inhalation de fumée, il savait que ce qu'il voyait ne pouvait pas être possible.

Le travail de toute une vie, ses amis, brûlaient autour de lui. Et plus que ça— le Site ? La ville ? La porte de la serre semblait ouverte à présent, et il était sûr qu'il voyait le Site-87 en feu, teinté de vert par les substances toxiques brûlant dans le site.

"C'est pas possible." Il se tira les cheveux. "C'est pas possible. Tu étais dans le trou pendant seulement trois minutes. Aucun feu ne se propage aussi vite à moins que ce soit nucléaire ; et si c'était nucléaire, tu serais une ombre sur le sol. C'est un genre d'espace bizarre qui essaye de te rendre fou. Ce n'est pas réel. Ce n'est—"

Il s'appuya sur la barrière entourant le trou de béton, laissant s'échapper un hurlement de douleur alors que ses mains brûlaient. Malgré le fait qu'elle n'en avait pas l'air, la rambarde était assez chaude pour créer des cloques sur sa main. Et ce n'était pas que son hurlement qu'il entendait.

"Aide nous !"

"Tu nous as abandonnés !"

"Pourquoi ne nous as-tu pas aidé !"

"C'est de ta faute ! Pourquoi nous as-tu fait ça ?!"

Il se prépara à résister à la chaleur et s'avança vers la sortie de la serre, vers le décor en flamme au-delà. Les habitants étaient autour des ruines brûlantes du site et essayaient de passer par les fenêtres— non pas qu'ils pouvaient accéder au site de la bonne manière.

Ceux n'étant pas en feu avaient l'air d'avoir été exposés à de drôles de mutagènes— leurs jambes étaient trop longues, leurs bras avaient trop de mains, leur cou sans tête. Une femme traînait une silhouette inerte dans ses bras que Chris pensait être un tas de vêtements, mais il réalisa que c'était un enfant, suffoquant et hurlant dans le miasme étouffant.

Et à l'unisson, le Site-87 et la ville brûlaient et hurlaient. Et Christopher savait, au fond de lui, que c'était de sa faute ; qu'il aurait dû être meilleur, qu'il aurait dû prendre ses responsabilités et forcer la Fondation à réparer ça avant que tout cela arrive.

"Pas réel," dit-il, serrant ses poings brûlés et s'éloignant de la serre. "Pas réel. Ce n'est pas réel."


Lorsque Alison et Robert arrivèrent devant le site, ce dernier n'attendit pas que la voiture s'arrête complètement pour en sortir, soulevant la terre alors qu'il accourut vers l'arrière du bâtiment.

"—peut pas être une coïncidence !" Il entendit Ruby Williams crier à son frère. "Une seconde il s'énerve sur le changement climatique, la suivante il est bloqué dans un bâtiment en feu ?"

"C'est suspect, je te l'accorde," répondit Blake Williams, "Mais on doit laisser les pompiers faire leur boulot. On ne peut pas se jeter là-dedans."

"Qu'est-ce qui brûle ?" Robert était sorti de la place passagère de la voiture et accouru vers les jumeaux Williams. "Que se passe-t-il ?"

"L-la Serre 3," Ruby déglutit. "Chris était dedans, depuis qu'on est revenu de notre pause. Bon Dieu…"

Robert entendit au moins trois lances à incendie s'ouvrir, tentant d'éteindre le brasier. Sloth's Pit n'avait qu'une poignée de camions de pompier et, à première vue, au moins la moitié était présente. "Personne n'est encore entré ?"

Ruby secoua la tête. "Ils disent que… quelque chose ne va pas. Il y a de la chaleur et de la fumée, des choses brûlent, mais ils ne peuvent pas voir de feu."

"Ça met les choses au clair alors." Robert s'étira le cou. "Je vais entrer."

"Quoi ?" Alison arriva derrière le bâtiment alors qu'il parlait. "Comment ça, "je vais rentrer"?"

"J'étais pompier pour la Garde nationale. Je connais la procédure."

Ruby, Blake et Alison regardèrent Robert montrer son badge à un pompier— non, au capitaine des pompiers— et demanda son matériel.

Alison arriva à côté de lui en montrant son propre badge. "On va avoir besoin d'une autre place."

"Alice, non—" Robert leva une main tremblante.

"Tu veux sérieusement entrer dans un bâtiment en feu, anormal qui plus est, seul ?" Elle fronça les sourcils lorsqu'elle remarqua ses tremblements. "Ça va ?"

"Un mauvais souvenir. J'ai découvert l'anormal quand j'ai dû combattre un feu de forêt vivant." Il prit la veste alors que le capitaine commençait à se déshabiller. "Si tu entres, je ne peux pas promettre de te sortir toi et Hastings."

Alison réfléchit, puis acquiesça. "Tu gardes ton oreillette allumée. Si ça chauffe trop, tu évacues."

"On dirait presque que tu t'inquiètes pour moi," Robert secoua la tête. "Je m'en sortirai, Alice. Vraiment."

Après quelques minutes, Robert, habillé et transportant une bouteille d'air en plus dans la main, entra dans la serre en flammes.


Les pensées de Christopher alternaient entre "Pas réel" et "Ma faute". Ça ne pouvait pas avoir lieu, mais ça avait lieu, mais la ville ne pouvait pas brûler, mais elle l'était. Des choses brûlantes et mutées ayant été auparavant humaines le fixaient quelques fois, hurlantes, grognantes. Il pouvait voir la haine dans leurs yeux, la faute qu'elles jetaient sur lui et lui seul.

"Ma faute," souffla-t-il. "C'est ma faute. Tout. Tout ça…" C'est alors qu'il s'éloigna du Site-87 et se retrouva dans les bois. Les arbres étaient engloutis par les flammes, l'entièreté de la forêt historique entourant la ville en feu, tout de sa faute, tout de la faute de la Fondation. Ils auraient dû agir avant d'en arriver là, tout le monde aurait pu. Mais personne ne l'a fait.

Il trouva l'une des quelques parcelles d'herbe qui n'avaient pas été touché par le brasier et s'assit dessus. Il ne pouvait pas réfléchir. Il avait du mal à respirer, son cœur battait la chamade, il suait sans que cela soit lié à la chaleur, et— depuis quand pleurait-il ? Que se passait-il ? Il prit une inspiration qui se transforma en un sanglot faisant souffrir son torse.

Il ferma les yeux et posa ses mains sur les oreilles, bloquant la lumière et le rugissement des flammes. La dernière chose qu'il voulait faire c'était mourir lors d'une crise d'angoisse.


Robert Tofflemire entra dans la serre, se trouvant dans ce qui ressemblait à Sloth's Pit en flammes. Mais… ça ne l'était pas. Le feu avait l'air d'être sortit d'un projecteur à bobine. La masse brûlante de personnes n'étaient que des épouvantails déformés en feu. La fumée âcre ? Elle au moins était réelle. Elle sentait le pneu brûlé même à travers l'appareil respiratoire.

L'herbe sous ses pieds s'écrasait naturellement, puis il réalisa que c'était un genre de gazon artificiel. Tout ici avait l'air d'être une maison hantée qu'il avait croisé dans une fête foraine vers Halloween une fois— une maison hantée d'extérieur. Mais Tofflemire ne pouvait pas s'empêcher de se dire que tout cela devait avoir l'air très différent pour le Dr Hastings.

"Ok, espèce de maison hantée extra-dimensionnelle à la mords-moi le nœud, je te présente la technologie moderne. Hé, Helen ?" Une tonalité sortit de son oreillette. "Quelle est ma position relative au Dr Christopher Hastings ?"

«Le Dr Hastings est à environ cinq-cent mètres à l'ouest de ta position. Les données GPS sont indisponibles.»

Tofflemire commença à fouiller dans le paysage, jusque dans les bois. Ils étaient tout aussi mal réalisés, avec les mêmes flammes projetées et ce qui ressemblait à de la fausse neige imitant des cendres. Tous les arbres étaient les mêmes : de seconde main.

Au loin, il vit une silhouette en blouse recroquevillée sur elle-même, basculant d'avant en arrière et gémissant. Tofflemire pressa le pas.


Hastings entendit quelque chose s'approchant de lui à travers le brasier et leva la tête pour voir une silhouette s'approcher de lui, en flammes, hurlant. Il se leva et recula. "Recule putain !"

"Haaasshhtiiiiings !" Appela-t-elle, tendant un bras enfouit dans un gant. "Haaaaashtiiiiings !"

Hastings trouva un couteau dans sa main— d'où venait-il— et l'agita vers la chose s'approchant de lui. "Je-je suis désolé ! Je-je ne voulais pas !"

La chose s'arrêta— son visage, à travers ses morceaux fondus, était visiblement confus.

"Je-j'aurais dû f-faire plus ! J'aurais pu a-arrêter ça ! Le m-monde brûle et c'est de ma faute et je suis désolé et—"

La créature leva la main et Hastings agita son couteau dans sa direction. "J-Je suis désolé, s'il vous plaît ! Je— Je—"

La chose recula et sortit quelque chose de ce que Hastings pensait être une poche— une photographie de Ruby, curieusement épargnée par le feu.

Hastings la fixa et s'agenouilla pour la récupérer. La chose ne l'empêcha pas. Elle ne fit rien d'autre que de rester là alors qu'il la récupérait. "Où avez-vous eu ça ?" demanda-t-il, la brandissant à la créature. "Alors ? Dites quelque chose !"


Mars 2020

"… tu ne vas rien dire ?"

Le Chercheur Christopher Hastings fixait la table face à lui, puis leva les yeux vers Ruby. "Qu'est-ce qu'il y a à dire ? J'ai merdé, et bien. J'ai bredouillé pendant toute ma soutenance."

"Hé, la plupart des gens n'ont même pas de thèse pour soutenir leur doctorat." Ruby ouvrit une autre bouteille de bière et commença à la boire. "Et c'est… plutôt une formalité, non ? Genre, ta thèse a été évaluée et tout."

"Mais même !" Chris se tira les cheveux, les rendant encore plus ébouriffés. "Bordel, le nombre de fautes de frappe que j'ai trouvé après l'avoir envoyé."

"Un ou deux points en plus ne vont pas te retirer la thèse, chéri…" Ruby regarda le dessus de la reliure sur la table à côté de lui et l'ouvrit. "Mais c'est la première fois que je la vois sur le papier. "Nécropsie Botanique de SCP-097"."

"Quel titre sans âme." Hastings secoua la tête.

"Chéri— Chris. Regarde, tu stresses pour un rien. Ce qui est fait est fait. Le passé est mort, il ne peut plus te faire de mal."

"… Tu ne viens pas de me citer Night Vale." Chris cacha un sourire derrière ses mains. "Tu l'as lu ?"

"Bien sûr. Je n'ai pas tout compris, mais ce que j'ai fait… Le travail qu'Hubble a fourni pour faire pousser 097-1 aussi grande et contenir quelque chose d'aussi malveillant. J'aurais aimé lui avoir plus parlé."

Le téléphone de Chris vibra— un texte fut affiché sur l'écran. Il soupira. "Partridge veut me voir. Peut-être pour m'annoncer la mauvaise nouvelle en personne."

"Tu as déjà entendu parler de l'ajustement "merde" ?" Ruby prit une autre gorgée de bière. "Si tu ne peux pas contrôler ce qui arrive, si c'est totalement hors de ton contrôle, n'y prête pas trop attention. Dis juste "merde" à haute voix et passe à autre chose."

"Alors… si je n'ai pas mon doctorat, je dis juste "merde" ?"

Ruby acquiesça.

"D'accord. Eh bien. Merde, je suppose."

Le Dr Christopher Hastings sortit de la salle de pause pour recevoir la meilleure nouvelle de sa vie.


"Ouais." Hastings se gratta le nez. "Merde. Juste… merde. Je ne peux rien faire, alors merde."

La réalité fit un bwoup et il se trouva à nouveau dans la Serre 3 manifestement en bon état, un pompier à côté de lui. Il lui fallut un moment pour regarder à travers le masque, mais il finit par réaliser que c'était "Tofflemire ?"

"C'était quoi ce bordel ?" demanda Tofflemire en l'aidant à se relever, "Et pourquoi le fait de dire "merde" a pu le régler ?"

"Je ne sais pas." Il regarda la photo dans sa main. "Où as-tu trouvé ça ?"

"Mes poches magiques." Tofflemire fouilla dans sa poche de veste de pompier et sortit trois bonbons différents, un tube d'aspirine et un rouleau de bandages. "Un effet secondaire de tout le bazar du Paresseux du Gouffre. Pas mal, hein ?"

"Pratique." Hastings regarda la photo et soupira. "Je lui dois des excuses. C'est une longue histoire. Oh !" Il se précipita vers l'autre bout de la serre et soupira de soulagement lorsqu'il vit que la Polystic à épées longues était intacte.

Puis, Christopher Hastings s'effondra de fatigue


Le lendemain matin…

"C'était Ruby à l'hôpital." Tofflemire rangea son téléphone dans sa poche. "Ils gardent Tofflemire sous surveillance. Ils ont parlé de "niveaux d'adrénaline accrus"."

Alison cracha du dentifrice dans le lavabo et regarda Tofflemire, se massant la nuque. "Tu as fait du bon boulot, même si tu n'avais pas besoin de la combinaison. Il s'est passé quoi, d'ailleurs ?"

"Si je devais deviner ?" Tofflemire chercha sur son téléphone, avant de le lancer à Alison. "Lis ça."

Le téléphone affichait un article. "À propos des occurrences de manifestations phobiques en Amérique moderne" par… Randall Owings ? C'est qui ?"

"Un phobologue qui travaille à un site en Arkansas. Son travail est classifié de ouf, je ne sais pas pourquoi. Mais cet article décrit des… événements où des peurs deviennent réalité."

"Et tu penses que c'est ce qui est arrivé ?" Elle grimaça. "De ce que tu as dit, c'était plus une mauvaise maison hantée."

"Je ne pense pas que c'était pour moi. On dirait que c'était fait pour Hastings et j'ai troublé l'illusion en y entrant." Il fronça les sourcils. "Ils pensent sortir February de son coma dans quelques jours."

"Tu penses qu'une… "manifestation phobique" l'a eu, lui aussi ?" Alison retroussa son nez. "Il a… peur des flics depuis un moment. Ça vaudrait le coup de jeter un œil."

Il y eut un cognement sur le mur à l'extérieur de la salle de bain. Ils se tournèrent et virent l'Agent Seren Pryce, aux cheveux blonds et la queue de cheval en pagaille, qui les cherchait. "J'ai tiré la courte paille à ta place, Carol. L'une des machines de la laverie automatique a essayé de manger quelqu'un, on s'en occupe. Toff, tu es avec Grey— on a des perturbations spectrales au Wal-mart."

"Génial." Alison posa sa brosse à dents dans un sac et hocha la tête en direction de Robert, avant de partir.

"Essayes de ne pas mourir d'excitation !" lança-t-il.

"Vas te faire foutre !" lança Alison en riant.

Puis, ce fut le silence.

Sauf mention contraire, le contenu de cette page est protégé par la licence Creative Commons Attribution-ShareAlike 3.0 License